Commande publique - Capacité économique et financière des candidats : la CJUE rappelle les règles du jeu
Dans un arrêt du 18 octobre 2012, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) rappelle les règles permettant à un pouvoir adjudicateur d'apprécier la capacité économique et financière des candidats. Elle précise aussi comment un opérateur économique, candidat à l'attribution d'un marché, peut prouver sa capacité économique et financière quand le pourvoir adjudicateur en fait la demande.
Dans les faits, un pouvoir adjudicateur hongrois avait engagé une procédure restreinte pour l'attribution d'un marché public de réalisation de travaux d'infrastructures de transport. Le pouvoir adjudicateur a demandé aux candidats de produire un bilan comptable ; puis fixé un niveau minimal de capacité économique et financière en exigeant que le résultat repris au bilan ne soit pas négatif pour plus d'un exercice sur les trois derniers exercices clôturés.
La société Hochtief Hongrie, succursale hongroise de la société allemande Hochtief Solution AG, soutenait que l'exigence économique fixée par le pouvoir adjudicateur ne permettait pas de faire une comparaison objective des candidats, était discriminatoire et violait certaines dispositions de la loi hongroise transposant la directive 2004/18/CE relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services. En effet, un contrat de transfert de bénéfices obligeait la société Hochtief Solution AG à transférer chaque année les bénéfices qu'elle avait réalisés à sa société mère, Hochtief AG. Elle ne pouvait donc pas satisfaire à cette exigence économique car le résultat mentionné dans ses bilans était systématiquement nul ou négatif.
La société Hochtief Hongrie a donc saisi les juges nationaux qui ont décidé de surseoir à statuer et formé un recours préjudiciel devant la CJUE. Cette dernière répond en deux points :
L'appréciation du niveau minimal de capacité économique et financière par le pouvoir adjudicateur
Les juges de la Cour européenne rappellent que les articles 44 paragraphe 2 et 47 paragraphe 1 de la directive 2004/18 permettent à un pouvoir adjudicateur d'apprécier la capacité économique et financière des candidats, en fixant un niveau minimal de capacité, et d'exiger que les candidats fournissent leur bilan. La demande formulée ne doit pas porter sur le bilan en général, mais sur un ou plusieurs éléments particuliers de ce bilan, que le pouvoir adjudicateur choisira librement. De plus, il est nécessaire que le niveau de capacité minimal soit lié et proportionné à l'objet du marché.
L'exigence économique ne peut en principe être écartée pour la seule raison que ce niveau porte sur un élément du bilan qui peut diverger en fonction des différents Etats membres. En effet, les législations des Etats membres concernant les comptes annuels ne font pas l'objet d'une harmonisation complète. Des divergences peuvent exister concernant l'élément particulier du bilan souhaité par un pouvoir adjudicateur pour apprécier le niveau minimal de capacité.
Les candidats dans l'impossibilité de satisfaire à cette exigence économique peuvent faire appel à une autre entité
Conformément à l'article 47 paragraphe 2 de la directive, l'opérateur économique qui ne peut satisfaire à un niveau minimal de capacité économique et financière peut "faire valoir les capacités d'une autre entité quelle que soit la nature juridique des liens existants". Par conséquent, le candidat qui est dans l'impossibilité de satisfaire à une exigence économique à cause d'une convention l'obligeant à transférer ses bénéfices à la société mère, pourra faire appel à une autre entité.
Référence : CJUE, 18 octobre 2012, N° C-208/11