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Changement de nom : le Sénat vote un texte largement détricoté

Les sénateurs ont notamment supprimé la possibilité d'un changement de nom de famille par demande en mairie et ont écarté plusieurs dispositions relatives au nom d'usage.

Le Sénat à majorité de droite a largement détricoté mardi 15 février en première lecture la proposition de loi LREM visant à faciliter le changement de nom, soutenue par le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, mais aussi par la gauche de l'hémicycle (voir notre article du 27 janvier). Si les sénateurs et les députés ne parviennent pas à trouver une position de compromis en commission mixte paritaire, l'Assemblée nationale aura le dernier mot le 24 février.

Présentée par le ministre comme un texte "qui répare", attendu par "beaucoup de nos concitoyens pour apaiser la douleur de porter un nom", qui rappelle une histoire intime malheureuse, la proposition de loi du député Patrick Vignal "relative au choix du nom issu de la filiation" vise une entrée en vigueur en juillet.

Mais elle s'est heurtée aux objections de la droite sénatoriale. "Bonjour, comment vous vous appelez ? Et toi, c'est quoi ton nom?". La rapporteure LR Marie Mercier a mis en scène son intervention pour mieux marquer l'importance du nom dans l'identité et la reconnaissance sociale d'une personne.

Malgré l'argumentaire déployé par le ministre, le Sénat s'est opposé à la mesure phare de la proposition de loi, concernant le changement de nom de famille, celui qui figure obligatoirement sur tous les actes de l'état civil. Le texte adopté par les députés ouvre la possibilité pour tout majeur de demander, une fois dans sa vie, à prendre, ou ajouter, le nom de son autre parent, par une simple démarche en mairie, et non plus par décret pris à l'issue d'une procédure longue et fastidieuse passant par le ministère de la Justice. Défendant "les vertus du formalisme", la rapporteure a proposé en lieu et place une procédure spécifique, simplifiée, mais passant toujours par le ministère de la Justice.

L'autre point d'opposition des sénateurs concerne le nom "d'usage", le nom d'usage le plus répandu étant celui de la femme mariée qui peut utiliser le nom de son mari à titre d'usage. Les sénateurs ont approuvé la possibilité pour les majeurs de substituer, à titre d'usage, le nom d'un parent à celui de l'autre, en plus de l'adjonction qui est déjà possible. En revanche, ils ont retoqué la substitution de nom pour les mineurs. De même, ils se sont opposés à la possibilité pour un parent de décider seul d'adjoindre à titre d'usage son nom de famille au nom de l'enfant.

L'objectif de cette disposition, qui répond à une demande du collectif "portemonnom", est de faciliter la vie quotidienne des parents dont les enfants ne portent que le nom de l'autre parent, en particulier pour les mères après un divorce ou une séparation. Malgré une loi de 2005 permettant aux parents de choisir le nom qu'ils transmettent à leur enfant (père, mère ou les deux accolés), huit enfants sur dix nés en 2020 ont en effet pris le nom de leur père. Pour la rapporteure, qui a invoqué "l'intérêt de l'enfant", la question du nom devrait être systématiquement abordée au moment de la séparation.

Le garde des Sceaux a regretté un "retour à la case départ" qui "ne permet plus de répondre aux préoccupations des mères séparées". La sénatrice écologiste Mélanie Vogel a porté sans succès plusieurs amendements tendant à aller encore au-delà du texte initial, proposant notamment de systématiser le double nom dans la déclaration de naissance.

Référence : proposition de loi relative au choix du nom issu de la filiation (le dossier législatif du Sénat)
 

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