Chasses traditionnelles à l'alouette : le Conseil d'Etat suspend de nouveau les autorisations du gouvernement

Le Conseil d'État a suspendu le 21 octobre des autorisations de chasses à l'alouette des champs à l’aide de filets (pantes) ou de cages (matoles) accordées par le ministre de la Transition écologique pour la saison 2022-23 dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées-Atlantiques (lire notre article). Dans son ordonnance, le juge des référés du Conseil d'État, saisi par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et One Voice, a estimé que les arrêtés pris par le ministre risquaient de contrevenir au droit européen sur la protection des oiseaux et qu'il existait ainsi "un doute sérieux quant à leur légalité".

En octobre 2021, les arrêtés autorisant les chasses traditionnelles à l'alouette et à d'autres oiseaux (grives, merles noirs, vanneaux, pluviers dorés) avaient déjà été suspendus pour des motifs semblables, via cette procédure d'urgence du référé. Sans attendre la décision sur le fond de ces dossiers, le gouvernement avait repris des décrets d'autorisations, uniquement pour l'alouette. "J'assume la décision qui a été prise", avait déclaré le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, sur France Info le 8 octobre, au lendemain de la publication des arrêtés. Les textes autorisaient d'une part la capture de l'alouette "à l'aide de paires de filets horizontaux ('pantes')" en Gironde, Landes, Lot-et-Garonne et Pyrénées-Atlantiques, du 1er octobre au 20 novembre, avec des quotas allant jusqu'à 56.672 dans les Landes. D'autres textes autorisaient la chasse à l'aide de cages pièges ("matoles") dans les Landes et le Lot-et-Garonne du 1er octobre au 20 novembre, là aussi avec des quotas.

Le débat se concentre sur la directive européenne "oiseaux" de 2009, qui interdit les techniques de capture massive sans distinction d'espèces. Une dérogation est possible à deux conditions, rappelle la haute juridiction administrative : d'abord, "qu’il n’existe pas de technique alternative pour capturer une espèce particulière" et "que cette technique ne permette de capturer que cette espèce-là, ou d’autres espèces mais en très faible quantité et sans dommage".

Or, "le ministre n'a pas démontré que ces méthodes de chasse traditionnelles seraient les seules permettant de capturer des alouettes des champs dans ces départements", un résultat qui peut être obtenu "par la chasse au tir ou l'élevage", explique un communiqué du Conseil d'État. De plus, le juge "relève que les méthodes ainsi autorisées (...) ne peuvent pas être considérées comme sélectives", puisqu'"au moins 15 à 20% d'autres espèces d'oiseaux sont en effet capturés par des matoles". "Le ministre n'apporte aucun chiffre pour les 'pantes', dont les filets peuvent mesurer jusqu'à 50 m², avec des mailles ne permettant pas aux autres oiseaux de s'échapper", note encore le juge, au risque de "dommages non négligeables" sur des espèces protégées.

"Si les décisions contestées mettent en avant l'objectif de conserver une méthode de chasse dite 'traditionnelle', ce motif a été regardé par la CJUE [Cour de justice de l'Union européenne] comme n'étant pas suffisant", conclut le communiqué.

 

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis