Archives

Les centres commerciaux demandent une date de réouverture

Le Conseil national des centres commerciaux (CNCC) juge "illégale" la fermeture des grands centres depuis le début de l'année et demande une réouverture des sites sous confinement le week-end (dans les régions de Nice et Dunkerque à ce jour) "le plus rapidement possible". Si les centres commerciaux ont limité la casse en 2020, avec une baisse globale de 6,4% seulement de leur chiffre d’affaires (hors périodes de confinement), ils s’inquiètent des répercussions sur des secteurs comme l’alimentation-restauration, l’équipement de la personne, et pour certaines typologies de sites, comme les centres régionaux et ceux situés en centre-ville. Alors que 6 millions de m2 sont en friche, le CNCC propose l'idée d'une "prime à la reconversion".





 

"Il y aura une réouverture par phases mais il n’y a pas de date annoncée et nous attendons les prochaines annonces suite au conseil de défense. Nous militons pour une réouverture des centres commerciaux sous confinement le week-end (décrété dans les régions de Nice et de Dunkerque depuis fin février, ndlr) la plus rapide possible avec un protocole sur lequel nous travaillons avec les cabinets d’Alain Griset et de Bruno Le Maire." C’est avec un mélange de volontarisme et de résignation que Jacques Ehrmann a résumé les échanges du 16 mars 2021 avec les ministères concernés au sujet de la réouverture des commerces. Le président du Conseil national des centres commerciaux (CNCC) s’exprimait à l’occasion d’une conférence organisée le 17 mars pour tirer le bilan de l’activité en 2020 et donner les perspectives pour 2021. Depuis le début de la crise Covid-19, les centres commerciaux sont en souffrance. Ils enregistrent une baisse de 6,4% de leur chiffre d'affaires en 2020 (en dehors des périodes de confinement). La baisse de la fréquentation atteint quant à elle -12,4%. Mais les différences sont importantes selon les typologies et les secteurs. Certains secteurs ont ainsi été fortement touchés, comme les agences de voyages, le divertissement (et le cinéma notamment), l’alimentation et la restauration qui accusent une baisse de 16%, et l’équipement de la personne (-8,9%). D’autres s’en sortent mieux, voire même ont augmenté leur chiffre d’affaires. C’est le cas pour l’équipement de la maison qui voit son chiffre progresser de 5,1% hors période de confinement. La beauté, la santé, les loisirs, le sport, la bijouterie, la parfumerie, l’optique arrivent à tenir.

"Ces fermetures sont illégales"

Ce sont surtout les centres commerciaux régionaux et ceux situés en centre-ville qui ont souffert de cette période. Les premiers perdent 6,3% de leur performance par rapport à 2019, les seconds 9%. Mais "dès qu’on laisse les commerces rouvrir, les clients reprennent assez rapidement le chemin des centres commerciaux", a assuré Jacques Ehrmann. Ce qui pousse le conseil à demander la réouverture au plus vite de ses sites, alors que les galeries marchandes et commerces de plus de 20.000 m2 sont fermées depuis le 30 janvier (un seuil abaissé à 10.000 m2 depuis le 5 mars dans les 23 départements placés sous vigilance renforcée), et ce pour la troisième fois en un an. "Ces fermetures sont illégales, a même clamé le président du CNCC, Jean Castex ne nous a jamais apporté la preuve que les gens se contaminaient davantage dans nos centres commerciaux." 

Paradoxalement, au moment où le gouvernement étudie avec les fédérations la possibilité de réouverture par phases progressives, il s'apprêtait ce mercredi soir à serrer la vis dans certains territoires : Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Hauts-de-France pour des raisons sanitaires. Si les phases pour l’ouverture des bars et restaurants sont sur la table (autorisation pour les clients d’hôtels de prendre leur petit-déjeuner dans la salle de restauration, terrasses et salles intérieures des cafés et restaurants dans la limite de 50% de leur capacité d’accueil, et ouverture complète sans jauge mais dans le respect d’un protocole sanitaire renforcé), rien n'est annoncé pour les commerces fermés pour le moment, si ce n’est la mise en oeuvre d’un nouveau protocole sanitaire renforcé en cours d’élaboration. Seule garantie : les aides sont maintenues. Les aides publiques (activité partielle, prêt garantie par l’Etat-PGE, fonds de solidarité, crédit d’impôt pour les fermetures du mois de novembre, couverture des charges fixes) ont permis aux centres commerciaux de tenir bon. "Une négociation est en cours avec Bruxelles pour une indemnisation à 100% des charges et loyers de la période de fermeture depuis février 2021, sans plafond et sans durée, a aussi indiqué le président du CNCC. Nous en saurons plus d’ici quelques semaines avec un décret à venir".

Une prime à la reconversion

Au-delà des aides, la fédération relance le débat sur le rééquilibrage fiscal entre le commerce physique et le e-commerce. "Le constat est maintenant partagé très unanimement, a insisté Jacques Ehrmann en allusion aux rapports remis sur le sujet ces dernières années, pas moins de cinq en trois ans. Le dernier en date issu de France Stratégie, du Conseil général de l’environnement et du développement durable et de l’Inspection générale des finances doit être suivi par une mission intégrant une concertation des acteurs du e-commerce et de la logistique pour définir les conditions du développement de filières de e-commerce et de logistiques responsables. Dans l’idée de la fédération, un assujettissement des entrepôts du e-commerce à la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) permettrait en outre de financer le fonds de recyclage des friches créé dans le cadre du plan de relance et doté de 300 millions d’euros et de participer à la reconversion de ces zones. Le CNCC propose même la création d’une "prime à la reconversion", dans le même esprit que la prime à la casse automobile. "Il y a toute une série de boîtes à chaussures commerciales qui polluent les entrées de villes, ce sont des passoires thermiques, il y a en tout 6 millions de mètres carrés dont on n’a plus vraiment besoin. Il faudrait les supprimer et les transformer, a détaillé Jacques Ehrmann, pour cela il faut à la fois aider les locataires commerçants à se réimplanter dans des endroits modernes et énergiquement vertueux, dans les centres-villes ou les centres commerciaux qui ont de la vacance, et aider les propriétaires s’il y a une différence de valeur". Une idée qui d’après le CNCC "fait un tabac" mais qui reste pour le moment bloquée en raison de nombreux lobbies. Autre demande : proroger les autorisations d’exploitation commerciale de deux années (au lieu des trois mois déjà accordés).

Enfin, les centres commerciaux sont vent debout contre les dispositions prévues dans le cadre du projet de loi Climat. "Nous millions pour une écologie incitative et pas punitive telle que présentée dans ce texte, a signalé Jacques Ehrmann, nous avons le sentiment que le commerce physique est le bouc-émissaire. Nous n’avons même pas été auditionnés par la convention citoyenne alors que plusieurs articles nous concernent". Le CNCC fait notamment allusion à l’article 52 qui interdit toute création de surfaces commerciales sur des terres non artificialisées. "Tous les outils existent, a insisté le président citant la loi Elan de 2018, les nouvelles exigences en CDAC et CNAC, ou encore la circulaire du Premier ministre du 24 août 2020 demandant aux préfets d’être vigilants dans la conduite des procédures d’autorisation, et les chiffres des autorisations sont en diminution, cet article était superflu, d’autant plus quand on sait que le commerce ne représente que 4% de l’artificialisation des sols."