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Santé / Social - Contraception gratuite et confidentielle des mineures : l'Igas pointe de fortes disparités entre départements

L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) a rendu public, le 16 décembre, un rapport - daté d'avril 2015 - sur "L'accès gratuit et confidentiel à la contraception pour les mineures". Ce rapport intéresse très directement les collectivités, dans la mesure où la compétence sur les centres de planification et d'éducation familiale (CPEF) a été transférée aux départements lors de l'acte II de la décentralisation, en 2003-2004.

Deux mesures des LFSS 2013 et 2014 pratiquement inappliquées

Si l'Igas s'est déjà penchée à plusieurs reprises sur la planification familiale (voir nos articles ci-contre du 1er août 2011 et du 4 février 2010), le présent rapport portait plus précisément sur le bilan de deux mesures instaurées par les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2013 et pour 2014 : la gratuité de la délivrance des contraceptifs remboursables pour les mineures de 15 à 17 ans, ainsi que le droit au secret pour toutes les personnes mineures (LFSS 2013) et la mise en place d'un tiers payant pour la consultation et les analyses biologiques sur la part prise en charge par l'assurance maladie obligatoire, pour les mineures de 15 à 17 ans" (LFSS 2014).
Au vu du rapport, il est difficile de ne pas considérer que ces deux mesures sont des échecs. En effet, "moins de 1% des délivrances de contraceptifs aux mineures utilisent les mesures de gratuité et de secret". Les résultats ne sont sans doute pas meilleurs - même s'ils ne sont pas traçables - sur la mise en œuvre du tiers payant, car "la mission a constaté sur le terrain que ces mesures étaient méconnues des professionnels". Au demeurant, leur intérêt apparaît discutable aux yeux de l'Igas, dans la mesure où les laboratoires pratiquent en général le tiers payant.
Au final, "la mission estime que ces mesures sont insuffisantes car elles n'atteignent pas un objectif de gratuité et surtout empêchent la confidentialité en impliquant les organismes complémentaires qui ne peuvent pas, au regard des clauses contractuelles qui les lient aux ouvrants droit, anonymiser les relevés de remboursement".

Des incohérences dans les dispositifs

En outre, le rapport considère que les besoins des mineures en matière de contraception sont difficiles à identifier, "même si la confidentialité semble plus cruciale que la gratuité". Il souligne également une incohérence pour les mineures de moins de 15 ans, "même si les pratiques sexuelles sont rares avant 15 ans" : la LFSS 2013 leur garantit le secret, mais ne leur offre pas la dispense d'avance de frais, ce qui rend pratiquement impossible la mise en œuvre du secret.
Face à ces constats, la mission passe en revue deux scénarios et deux "options techniques" pour une meilleure prise en charge. Elle recommande aussi de mener deux expérimentations : l'une sur l'extension du rôle des infirmières scolaires en milieu rural, l'autre sur la possibilité de laisser les pharmaciens prescrire les pilules microprogestatives microdosées sans ordonnance dans le cas d'une primo-délivrance, afin de faciliter l'accès à cette contraception et d'éviter la discontinuité dans la prise de ce contraceptif.

Une forte hétérogénéité entre départements dans les prises en charge

Au-delà de ces considérations générales, le rapport met également en évidence le rôle des CPEF et des départements. Il est ainsi frappant de constater les écarts de pratiques entre départements sur l'extension des mesures de gratuité et de secret au-delà de 18 ans. Si la plupart d'entre eux la pratique de fait, les âges sont très variables, certains départements allant jusqu'à 20 ou 21 ans, voire au-delà. Une différence de traitement qui peut paraître surprenante, mais qui est néanmoins logique, la décentralisation de la compétence permettant à chaque département de fixer ses propres règles sur cet aspect "extralégal".
De même, les prises en charge des mineures sont très hétérogènes, aussi bien en ce qui concerne les prestations incluses dans les coupons des "pass contraception" que dans les montants de prise en charge. Les remboursements maximum par coupon peuvent ainsi aller d'un peu plus de 100 euros par coupon en Limousin à près de 300 euros en Pays de la Loire...
 

 

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