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Économie circulaire : la consigne sort de son bocal

Le 3 novembre, des expériences d'ancrage local et d'économie circulaire ont été mises à l’honneur lors des rencontres techniques nationales de la consigne et du réemploi, auxquelles une dizaine de collectivités ont répondu présentes. Quels freins restent à lever ? Quels opportunités à concrétiser ? Réponse avec le Réseau Consigne, qui organisait ces rencontres.

Il n’y pas une consigne mais des systèmes variés de consignes. Alors que les débats furent virulents, tout particulièrement lors la préparation du projet de loi sur l'économie circulaire, sur la question de la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique (voir cet article résumant ces épisodes), le retour de la consigne pour réemploi, qui s'applique principalement aux bouteilles de verre qui sont collectées, lavées et à nouveau remplies, suscite un consensus et donne lieu à de stimulants travaux et projets. Des rencontres nationales initialement prévues en mai et reportées en distanciel le 3 novembre ont donné un aperçu de cet engouement qui ne faiblit pas. Un succès dû au dynamisme du Réseau Consigne, qui fédère les acteurs du secteur et organise depuis 2012, soit l’année de son lancement, cet événement appuyé par l’Ademe et les collectivités qui l’accueillent tous les deux à quatre ans.

Bientôt un guide de retours d'expériences

Les dernières rencontres du genre remontaient à 2016. Depuis, du chemin a été parcouru : "Le réseau croît à une bonne vitesse et fait bénéficier ses 160 membres de son expertise, de sa visibilité, tout en jouant son rôle de plaidoyer. Nous pouvons mettre en relation les collectivités intéressées avec des porteurs de projets", avance Alice Abbat, chargée de mission au sein du Réseau Consigne. Si des avancées notables ont été obtenues, sur le plan législatif comme technique, l'impression domine que beaucoup reste à faire. La série d’ateliers proposés ont attiré une centaine de participants avec, parmi eux, des dizaines de chargés de mission déchets exerçant dans des collectivités territoriales. Des collectivités dont la place et le rôle pour développer la consigne suscitent des attentes mais aussi des interrogations. Les retours d'expérience restent rares, si bien que le Réseau Consigne s’attelle à les recueillir et les compiler, en vue de publier l’an prochain un guide qui sera utile aux collectivités.

L’entrée dans la boucle des collectivités

Proche de Zéro Waste France qui milite pour le "zéro déchet", l’association compte aussi parmi ses partenaires fondateurs deux syndicats intercommunaux de gestion des déchets dont le Sived NG. Présidé par un maire, ce syndicat du Var gère les déchets d’une cinquantaine de communes et soutient la mise en place d’un système de consigne. Porté par Consigne de Provence, l’action a ciblé les producteurs de jus de fruits, de vin et de bière avant de s’élargir. Pour créer la boucle vertueuse qui fait qu’une bouteille consommée est réemployée localement, toute une logistique et chaîne d’acteurs est à mobiliser. Car les lieux de ventes sont aujourd’hui éloignés des lieux de production…
Les projets partent souvent du producteur et d’un type de contenant. "Convaincre les gros producteurs pour atteindre un certain volume de bouteilles n’est pas le plus compliqué. Il faut aussi les équiper, leur apporter des solutions concrètes, intéresser les enseignes de la distribution pour qu’au niveau des magasins le mécanisme de consigne s’enclenche. Le constat, c’est que là où une collectivité s’implique, le retour de la consigne a une chance de prendre vite", observe Bastien Vigneron de l'association Ecoscience Provence, co-fondatrice du Réseau Consigne. Ces projets prennent du temps : Consigne de Provence se laisse plusieurs années pour convaincre une centaine de producteurs, distributeurs et pour atteindre un gisement suffisant, à même de bâtir un modèle économique concurrençant l’usage unique et justifiant l’achat d’une laveuse industrielle, une machine devenue rare en France.
"Les acteurs de la consigne se sont diversifiés, et ne sont plus seulement des restaurateurs et associations mais aussi des apporteurs de solutions logistiques et industrielles pour le réemploi et le lavage des emballages, lesquels se sont eux-mêmes diversifiés : pots, bocaux, colis consignés du e-commerce, bacs inox de la restauration collective, etc.", éclaire Clémence Richeux, membre du Réseau Consigne et à l’initiative d’une start-up drômoise de collecte et lavage de bouteilles (Ma bouteille s'appelle reviens !). Autour de Rennes, un circuit de réemploi de contenants en expérimentation (projet ZeroWest) implique une dizaine de producteurs et entreprises. Les contenants rapportés en magasin passent dans une laveuse avant de repartir chez le producteur. Derrière l’aspect convivial et économe de la consigne sont donc prégnants des enjeux de retour logistique, de standardisation des contenants, de traçabilité ou contrôle qualité et de maillage de laveuses. "C’est pour cela que les échelons régional ou départemental sont pertinents pour avancer", commente Bastien Vigneron. Cela se confirme en Vendée, où le syndicat départemental de valorisation des déchets Trivalis soutient l’association Bout’ à Bout’ pour donner vie à la consigne. En Île-de-France, un premier centre de lavage va ouvrir le mois prochain à Neuilly-sur-Seine. Autre annonce à l’occasion de ces rencontres : la création d’ici la fin d’année d’un pictogramme pour identifier les contenants, bouteilles ou bocaux consignés. "Des visuels locaux 'Rapportez-moi pour réemploi' existaient, là il s’agira d’un pictogramme national", conclut Clémence Richeux.