Économies budgétaires : le gouvernement recule à pas feutrés, le Sénat avance ses pions
Face aux diverses levées de boucliers face au projet de budget pour 2025, le gouvernement a commencé, par petites touches, à se montrer prêt à revoir ses exigences en termes de réduction des dépenses. Dont celles devant toucher les collectivités.
Dernière concession en date : ce dimanche 17 novembre, le ministre du Budget s'est dit "prêt" à accepter de diviser par deux la contribution sollicitée auprès des patrons français. Soit 2 milliards d'euros, contre les 4 milliards de réduction d'allègements de charges patronales initialement prévus dans le budget. Après le ministre de l'Économie, Antoine Armand, qui avait déjà souhaité début novembre "atténuer" la hausse des cotisations patronales sur les bas salaires, sans chiffrer ce compromis, Laurent Saint-Martin a enfoncé le clou sur LCI, estimant qu'il ne fallait pas "pénaliser les salariés au Smic" dont les employeurs auraient vu alors "le coût de ce travail-là augmenter".
De premières concessions se dessinent aussi pour les collectivités locales. Vendredi devant les départements réunis pour leurs Assises, Michel Barnier a ainsi promis une réduction "significative" des économies qui leur seraient demandées. "Tenant compte de votre situation très spécifique, nous allons réduire très significativement l'effort qui vous est demandé", a rassuré le chef du gouvernement, sans avancer de chiffres, estimant que ce serait au Sénat de préciser les choses dans le cadre de son examen du projet de loi de finances (voir notre article de vendredi sur l'intervention du Premier ministre).
Saluant ce "pas en direction des départements", le président du Sénat, Gérard Larcher, a invité samedi le gouvernement à "aussi se pencher sur le prélèvement sur les recettes pour 450 grandes collectivités, ponctionnées souvent sur des critères discutables". Il s'est dit favorable à ce que l'effort financier des collectivités dans leur ensemble soit réduit à deux milliards d'euros, contre cinq prévus.
"Il (...) manque trois (milliards) par rapport à ce que prévoyait le gouvernement. Nous les trouverons ailleurs", affirme-t-il dans une interview au JDD mise en ligne samedi, quelques jours après que le Sénat se soit emparé en commission de l'examen du PLF (voir notre article) et du PLFSS (voir notre article). "Les collectivités représentent 70% de l'investissement public" et "ne sont pas coupables du creusement du déficit", "n'en déplaise Bruno Le Maire", tient-il à rappeler. "La commission des finances du Sénat est en train de remodeler en profondeur ces dispositifs de financement pour protéger les départements et les communes", précise-t-il.
"C'est ce que nous voterons", a affirmé dimanche le président du groupe centriste au Sénat, Hervé Marseille (UDI) : "On a décidé de faire beaucoup moins. Le président du Sénat l'a dit encore ce matin (...) ce ne sera pas cinq milliards de prélèvement, ce sera deux", a-t-il indiqué dimanche sur France 3. En sachant qu'à eux deux, les groupes LR et Union centriste détiennent la majorité au Sénat. Si le gouvernement persiste, "il faudra qu'on discute pour (...) la commission mixte paritaire, le moment venu, avec nos collègues de l'Assemblée nationale, parce que nous ne pouvons pas accepter une pression aussi forte", a-t-il ajouté.
Enfin, à l'approche du congrès des maires qui s'ouvre ce mardi 19 novembre à Paris (voir notre édition spéciale), la ministre du Partenariat avec les collectivités, Catherine Vautrin, a une nouvelle fois souhaité apaiser le débat, comme elle l'a fait au fil des congrès d'élus locaux successifs. Interrogée dimanche par Le Figaro, elle a redit que "le projet de loi de finances n'(était) ni parfait, ni définitif", assurant que "les élus locaux ne sont pas responsables de la situation budgétaire du pays". "Le gouvernement sera à l'écoute des propositions du Sénat", a-t-elle promis, mais "dans le cadre d'une vigilance que nous partageons tous : réduire à 5% en 2025 le déficit public dans une juste répartition des efforts". L'intervention de Michel Barnier jeudi 22 novembre en clôture du congrès des maires devrait apporter quelques éléments supplémentaires même si l'on risque de devoir attendre la version Sénat du PLF, puis celle de la commission mixte paritaire (CMP) pour être vraiment fixés.
Le PLF doit être examiné en séance au Sénat à partir du 25 novembre. En cas d'adoption, le gouvernement devrait convoquer cette CMP. Le texte commun devra encore être approuvée par les deux chambres. Et avant le PLF, c'est du PLFSS dont le Sénat s'est saisi ce lundi 18 novembre.