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Congrès des maires - Finances locales : "Les voyants sont au vert"... Pas si sûr, affirme l'AMF

Il y a bien eu amélioration de la santé financière des communes et intercommunalités en 2015, avec une hausse des recettes de fonctionnement liée en partie au dynamisme des recettes fiscales. Mais cette amélioration devrait être temporaire. Selon une enquête de l'Association des maires de France (AMF), les dépenses de fonctionnement pourraient en effet déraper cette année (les décisions gouvernementales sur la fonction publique y seront pour beaucoup), et ainsi compromettre les chances de redémarrage de l'investissement.

La situation des finances des communes et de leurs intercommunalités serait-elle en voie d'amélioration malgré la baisse des dotations ? La synthèse des comptes de gestion 2015 que l'Association des maires de France (AMF) a communiquée à la presse, ce 31 mai, à l'ouverture de son congrès annuel, le laisse à penser. L'an dernier, le produit des impôts directs locaux a progressé de 2,2 milliards d'euros. Une hausse dont le quart seulement provient du relèvement des taux (+ 1,2%). Mais si une majorité de communes et groupements n'a pas actionné le levier fiscal, un certain nombre ont pris des décisions qui conduisent à une augmentation des sommes dues par les contribuables. Les élus locaux ont par exemple réduit des abattements, ou supprimé des exonérations de fiscalité. En outre, les autres recettes de fonctionnement ont progressé d'1,5 milliard d'euros, notamment sous l'effet d'une hausse des tarifs des services publics et d'une augmentation des cessions de patrimoine.

Des dépenses maîtrisées...

Au final, la baisse de 2,1 milliards d'euros des dotations du bloc local n'a effacé qu'une partie du supplément de ressources obtenu. Les recettes réelles de fonctionnement ont donc affiché en 2015 une progression d'1,53%. Une marge de manœuvre qui, en outre, n'a pas été entièrement neutralisée par la croissance des dépenses de fonctionnement. Les efforts pour maîtriser celles-ci ont été payants : après avoir progressé de près de 2,5% en 2014, les dépenses de fonctionnement n'ont crû que d'à peine plus d'1% l'an dernier.
Pour les collectivités locales, "les voyants sont au vert", concluait le secrétaire d'Etat au Budget, le 25 mars dernier, lors de la publication par l'Insee des chiffres sur le déficit public (voir notre article du 29 mars 2016). Optimiste, il entrevoyait une relance de l'investissement local en 2016.

... qui risquent de repartir à la hausse

Mais, après avoir chuté de 13,4% en 2014 et d'autant en 2015, les dépenses d'équipement des collectivités locales pourraient ne pas entamer de reprise, répond l'AMF. "En 2015, le bloc local a pu compenser la baisse des dotations. Il a pu le faire une année, mais il n'y parviendra pas trois ans de suite", prévient Philippe Laurent, président de la commission finances de l'association. Pourtant, du côté des recettes, la tendance ne s'annonce pas mauvaise pour 2016. Les recettes réelles de fonctionnement des communes et groupements pourraient progresser au total de quelque 2%, selon une enquête que l'AMF a menée au début de l'année. Sans, d'ailleurs, que les collectivités aient recours massivement au levier fiscal : seulement le quart des 440 communes et moins d'un tiers des 30 EPCI interrogés prévoyaient d'accroître leurs taux, et ce dans des proportions limitées à 1% ou 2%. Problème : les dépenses réelles de fonctionnement pourraient déraper, celles des communes augmentant de 3% et celles des EPCI de 9% ! Malgré une possible baisse des effectifs (- 1% pour les communes du panel), les dépenses de personnel pourraient progresser de 2%. En cause notamment, l'augmentation de la valeur du point d'indice de la fonction publique et la revalorisation des carrières des agents décidées par le gouvernement. Les deux mesures coûteront 1,5 milliard d'euros par an aux employeurs publics locaux. Quant aux intercommunalités, elles vont payer au prix fort les transferts de compétences et de personnel prévus par la loi du 7 août 2015 sur l'organisation territoriale. Avec le retour de l'effet de ciseau dès cette année, une relance de l'investissement local paraît compromise, conclut l'AMF.

La capacité d'autofinancement dégradée d'un milliard d'euros

Il n'est pas impossible toutefois qu'une majorité des collectivités locales augmentent leurs dépenses d'équipement : 60% des communes et 68% des EPCI du panel "espèrent" y parvenir.
Pour investir, les communes et les EPCI doivent "reconstituer" leur autofinancement, souligne André Laignel, premier vice-président de l'AMF. Entre 2013 et 2014, ce ratio égal à la différence entre les produits réels de fonctionnement et les charges réelles a dévissé de 9,1 à 7,8 milliards d'euros pour les communes et EPCI et, en 2015, il ne s'est amélioré que de 0,3 milliard. Seule solution pour l'AMF : que l'exécutif annule la dernière baisse des dotations, de 3,7 milliards d'euros en 2017. C'est pourquoi, dès le début du congrès, ce 31 mai, les responsables de l'association continuaient à faire pression pour tenter d'obtenir en leur faveur un arbitrage au plus haut niveau. Réponse ce 2 juin lors de la clôture du congrès par François Hollande.