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Enseignement supérieur - Geneviève Fioraso : le plan Campus est un "véritable échec"

A l'occasion d'une réunion le 25 octobre 2012 avec la Fédération des villes moyennes, Geneviève Fioraso a précisé sa vision de l'enseignement supérieur : un maillage des universités permettant de tirer partie de l'excellence qui existe sur tout le territoire. La ministre de l'Enseignement supérieur, qui attend un rapport sur le plan Campus, estime que cette opération est un échec dans son développement, et compte lui donner les moyens pour avancer plus vite.

"Je suis particulièrement heureuse d'avoir eu cette réunion avec la Fédération des villes moyennes (FVM) pour affirmer ensemble la nécessité d'avoir un maillage territorial de l'enseignement supérieur et de la recherche", s'est réjouie Geneviève Fioraso, le 25 octobre 2012, à l'issue de sa rencontre avec les responsables de la FVM. La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche a affirmé qu'elle souhaitait "développer de véritables universités territoriales, qui ne fonctionneront pas comme des bunkers retenant toutes les informations mais de manière plus fluide, à l'image de ce qui se fait en Allemagne ou au Japon". Objectif de cette stratégie : ne pas créer une compétition entre quelques "sites élus", mais "tirer partie de l'ensemble de l'excellence qui existe sur le territoire", avec des sites maillés, groupés.
"Nous sommes opposés aux châteaux forts qui ne communiquent pas entre eux. On a davantage besoin de remettre de la transversalité pour avoir des territoires partout nourris de talents", souligne la ministre, qui envisage un regroupement non pas physique mais réalisé grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. "Ce n'est pas en décrétant l'excellence que nous serons excellents, a-t-elle insisté. On doit partir du potentiel des territoires."
Le plan Campus lancé en 2008 par le précédent gouvernement avait quant à lui misé sur une douzaine de sites d'excellence, qui se sont vu accorder des crédits de la part de l'Etat (5 milliards d'euros au total) pour devenir des campus d'excellence, véritable vitrine de la France dans ce domaine. Le gouvernement actuel est très sceptique sur cette politique. "C'est un véritable échec, confie Geneviève Fioraso à Localtis. Il n'est pas normal qu'après quatre ans et demi il n'y ait pas la moindre pierre posée et aucune convention signée." La ministre y voit un problème de méthode. "Pourquoi ça n'a pas marché ? Parce qu'on n'a pas mis dans la boucle les collectivités territoriales", explique ainsi Geneviève Fioraso.

Une plateforme sur l'enseignement supérieur en villes moyennes

Un décret publié au Journal officiel le 13 octobre 2012 doit permettre de corriger le tir. Il permet aux établissements d'enseignement supérieur de mettre en place des partenariats public-public, alors que jusqu'à présent seuls les partenariats public-privé pouvaient être envisagés. Une situation qu'Alain Rousset, président de l'Association des régions de France, avait dénoncée le 3 octobre 2012, parlant de "mécanique infernale".
Le rapport de Roland Peylet sur les partenariats public-privé et le plan Campus doit être remis prochainement à la ministre, qui pourra ainsi décider des nouvelles orientations à donner. L'objectif est d'accélérer la réalisation du plan Campus et "de ne pas imposer la même règle à tous", souligne la ministre, qui a ajouté que "le plan Campus n'était pas antinomique de la volonté d'étendre l'offre sur tout le territoire". "Il y a un potentiel de 13.000 logements. Il faut faire en sorte qu'il rayonne sur tout le territoire", a-t-elle souligné.
La plateforme internet lancée par la FVM le jour de la rencontre avec la ministre va dans ce sens. Geneviève Fioraso l'a accueillie avec enthousiasme. Le site www.enseignement-sup-villes-moyennes.fr est destiné à offrir un panorama global des formations post-bac dans les villes de 20.000 à 100.000 habitants. Il donne des informations sur les formations proposées par ville, par diplôme et par discipline dans 264 sites d'enseignement supérieur.
Cette plateforme offre également des renseignements sur le logement, la restauration, les transports, la santé, la culture et les initiatives locales. "La plateforme a pour objectif d'améliorer la lisibilité de l'offre de formations en enseignement supérieur pour aider les familles dans leur choix, et d'augmenter la visibilité de l'enseignement supérieur en villes moyennes", a signalé Christian Pierret, président de la FVM, lors de la présentation du site.
Actuellement, les villes moyennes accueillent 17% de l'effectif étudiant avec un taux de réussite supérieur à la moyenne nationale des universités. "Face aux menaces de fermeture de formations, de filières ou d'antennes universitaires, il est nécessaire d'augmenter la présence des villes dans ce domaine", a-t-il argué.

Promouvoir l'innovation

Autre objectif de la plateforme de la FVM : promouvoir l'innovation. "Les implantations d'enseignement supérieur et de recherche fournissent au tissu économique local des jeunes qualifiés dont les entreprises ont besoin, écrit ainsi la FVM dans un communiqué. Etant au plus près des filières locales de l'industrie et des services, ces sites d'enseignement sont un acteur majeur du transfert de technologie."
Au-delà de cette nouvelle plateforme, la FVM s'est dite force de proposition pour les Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche qui ont été lancées cet été. Pour la fédération, ces assises doivent être l'occasion de "poser le principe d'une implantation équilibrée sur tout le territoire et d'une offre diversifiée de formations supérieures accessibles". Elles doivent aussi favoriser la consolidation des sites de proximité, alors que certaines universités remettent en cause leurs implantations délocalisées pour réduire leurs coûts.
Autres revendications de la FVM : l'implantation de dispositifs de recherche (fondamentale et appliquée) et de transfert d'innovation technologique dans les villes moyennes et leurs agglomérations, et le lancement d'un plan national pour la vie étudiante, avec la remise à plat des dispositifs d'aides existants.
Les contributions aux assises sont ouvertes jusqu'en novembre. Puis en décembre sera rédigé un rapport synthétisant les avis et propositions des contributeurs. Un projet de loi devrait ensuite être présenté début 2013 au Parlement, apportant des modifications à la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) et à la loi de programme pour la recherche.

Emilie Zapalski

Référence : décret n°2012-1147 du 12 octobre 2012 relatif à la délivrance de titres constitutifs de droits réels par les établissements publics d'enseignement supérieur.