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Gestion quantitative de la ressource en eau et des situations de sécheresse : le décret est paru

Soumis à consultation publique en début d'année, le très attendu décret relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse a été publié au Journal officiel ce 24 juin, au lendemain de sa présentation en conseil des ministres. Ce texte entend mieux encadrer les autorisations de prélèvement, notamment pour les cultures, et renforcer le rôle du préfet coordonnateur de bassin.

Après sa présentation en conseil des ministres ce 23 juin, le décret relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse a été publié au Journal officiel du 24 juin. Lors de la première réunion du comité d’anticipation et de suivi hydrologique (Cash) le 17 mai dernier, la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, Bérangère Abba, avait assuré que le texte, qui a fait l'objet d'une large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés (associations de collectivités, représentants de la profession agricole, pêcheurs de loisirs et professionnels, associations environnementales, etc.) réunis au sein du Comité national de l’eau, serait publié "avant l'été". C'est donc chose faite, après la consultation publique organisée en début d'année qui a suscité plus d'un millier de commentaires.

"Gestion équilibrée et durable de la ressource"

"Alors que le changement climatique a déjà pour conséquence de modifier le cycle de l’eau, cette ressource doit être gérée et partagée collectivement car sa disponibilité est essentielle pour de nombreux usages : domestiques, mais aussi économiques (pour l’agriculture, l’industrie, la production d’énergie), ont rappelé Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, et Bérangère Abba en présentant le décret. Protéger la ressource en eau, c’est aussi protéger la biodiversité et les milieux naturels." "Ce décret vise à améliorer la gestion quantitative de l’eau, tant sur le plan structurel, en vue d’une gestion équilibrée et durable de la ressource, que conjoncturel, pour une meilleure gestion des crises et des sécheresses qui seront probablement amenées à se multiplier dans les prochaines années, ont-elles poursuivi. Il permet à tous les acteurs, et notamment aux agriculteurs qui sont en première ligne face aux impacts du changement climatique, de pouvoir mieux traverser les épisodes de sécheresse, en leur donnant des outils permettant de conduire des projets d’irrigation respectueux des grands équilibres des écosystèmes leur permettant de s’adapter aux conséquences du changement climatique", ont-elles assuré.

"Volumes prélevables"

Pour déterminer les autorisations de prélèvement, la notion de "volume prélevable" est jugée essentielle. À l’origine de l’annulation contentieuse de nombreuses autorisations uniques de prélèvement, elle permet de définir les quantités d’eau qui peuvent être prélevées dans les milieux naturels sans les mettre en danger, ont rappelé la ministre et la secrétaire d'État.
Le texte fixe donc un cadre et une définition explicite permettant à l’ensemble des acteurs (agriculteurs, industriels, élus des collectivités territoriales responsables de la gestion de l’eau, mais aussi gestionnaires d’espaces naturels) d’agir pour préserver et partager la ressource dans un contexte juridique sécurisé, soulignent-elles. Le décret stipule que pour chaque demande d'autorisation unique de prélèvement, déposée par un organisme unique de gestion collective, l'étude d'impact ou l'étude d'incidence du projet doit comporter une série de documents tels que "l'historique sur les cinq à dix dernières années des volumes prélevés" ou un "argumentaire justifiant que les volumes demandés sont compatibles avec le respect du bon fonctionnement des milieux" (art.2).
Le volume prélevable (défini comme le volume pouvant statistiquement être prélevé huit années sur dix en période de basses eaux dans le milieu naturel aux fins d'usages anthropiques) est "issu d'une évaluation statistique des besoins minimaux des milieux sur la période de basses eaux. Il est réparti entre les usages, en tenant compte des enjeux environnementaux, économiques et sociaux" (art.3).

Rôle majeur du préfet coordonnateur de bassin

Le décret renforce le rôle du préfet coordonnateur de bassin avec la mise en place, dans les bassins en déséquilibre structurel, d’une stratégie d’évaluation des volumes prélevables, qui permet de développer des activités humaines dans le respect des écosystèmes (art.6). Pour chaque étude, le préfet coordonnateur "s'appuie sur un comité de concertation" où sont représentés "les intérêts de la protection de l'environnement, de la pêche, des usages agricoles, industriels et domestiques de l'eau". "Sont représentés également, lorsqu'ils existent, la commission locale de l'eau, l'établissement public territorial de bassin (…), l'organisme unique de gestion collective (…), les gestionnaires d'ouvrages de régulation de la ressource en eau, et les services chargés du prélèvement d'eau destinée à la consommation humaine (…)". "Sur la base du cadrage du préfet coordonnateur de bassin, ces études peuvent être prises en charge par la commission locale de l'eau (…)  avec l'appui du comité de concertation".
"À défaut de commission locale de l'eau sur le périmètre adapté ou d'incapacité technique ou financière de celle-ci à porter de telles études, ces dernières ainsi que la répartition des volumes peuvent être prises en charge par un établissement public territorial de bassin ou tout autre groupement de collectivités territoriales compétent à l'échelle concernée".

Gestion de crise

Le texte renforce aussi l'encadrement et l'harmonisation à l'échelle du bassin et du département de la gestion de crise sécheresse dans les zones d'alerte (art.4). Il appartient ainsi au préfet coordonnateur de bassin de fixer par un arrêté d'orientations pour tout le bassin "les orientations relatives aux conditions de déclenchement, aux mesures de restriction par usage, sous-catégorie d'usage et type d'activité en fonction du niveau de gravité, aux conditions selon lesquelles le préfet peut, à titre exceptionnel, à la demande d'un usager, adapter les mesures de restriction s'appliquant à son usage, et aux modalités de prise des décisions de restrictions."
"Pour les agriculteurs, les autorisations de prélèvement pour l’irrigation sont mieux encadrées et plus robustes sur le plan juridique, ce qui leur donnera de la visibilité et réduira les risques de contentieux qui souvent retardent le développement des projets, estiment Barbara Pompili et Bérangère Abba. Afin de faire face à des situations de manque d’eau récurrentes, les autorisations de prélèvement pourront autoriser temporairement des prélèvements supérieurs aux ressources, à condition de s’inscrire dans une perspective de retour à l’équilibre quantitatif aux échéances fixées par les schémas directeurs de gestion de l’eau, conformément à la directive-cadre sur l’eau."
"Avec ce texte, la gestion des crises liées à la sécheresse, qui tendent à se répéter, sera également mieux organisée, mettent en avant la ministre et la secrétaire d'État. Les acteurs pourront ainsi mieux anticiper et organiser dans la durée leurs activités, avec en outre une harmonisation des mesures de restriction des différents usages sur le territoire national et une plus grande réactivité dans la prise de décision."
Au-delà de ces aspects règlementaires, le Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique lancé le 28 mai dernier par le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et la secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique, chargée de la biodiversité, entend identifier les outils d’accompagnement des agriculteurs "vers une meilleure résilience aux changements climatiques à venir".

 
Référence : décret n° 2021-795 du 23 juin 2021 relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse, JO du 24 juin 2021, texte n°2.



 

 

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