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Marchés publics - Groupements fictifs, offres de couverture : l'Autorité de la concurrence sévit

Dans une décision du 24 septembre 2018, l'Autorité de la concurrence a sanctionné une entreprise pour avoir mis en place des groupements d’entreprises fictifs et pour avoir sollicité le dépôt d’offres de couverture de la part d'autres sociétés.

En l’espèce, les sociétés J.Grenot, Fiard Electrique, DM Régulation et Lapize ont fait l’objet d’un rapport administratif d’enquête diligenté par la brigade interrégionale d’enquête de concurrence. Ces trois dernières entreprises ont accepté la transaction proposée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. La société J.Grenot ayant quant à elle refusé cette transaction, l’Autorité de la concurrence a été saisie. Plusieurs marchés publics dans le secteur de l’éclairage public étaient en cause dans cette affaire.

Groupements fictifs

La commune d’Annonay avait lancé deux marchés publics. Pour y répondre, les sociétés J.Grenot et Lapize se sont réunies pour répondre en groupement. L’objet de ces groupements était de se répartir les marchés en évitant de se faire concurrence. Pour leur défense, les sociétés indiquent qu’il s’agit d’ "un choix historique qui date de nos grands-pères". Pourtant, selon l’Autorité de la concurrence, "aucune justification économique ou technique objective" ne permettait de justifier la constitution d’un groupement. De nombreux échanges par mails entre les deux sociétés démontrent clairement leur volonté de réduire la concurrence. L’Autorité de la concurrence a donc qualifié cette pratique d’entente anticoncurrentielle au sens de l’article L. 420-1 du code de commerce.

Offres de couverture

Pour deux autres marchés publics, respectivement lancés par les communes de Peaugres et de Saint-Julien-Vocance, la société J.Grenot a cette fois-ci demandé à l’entreprise Lapize de déposer des offres moins intéressantes que les siennes. Les prix proposés par la société Lapize étaient effectivement volontairement supérieurs de 20 à 30% que ceux de la société J. Grenot. Mails à l’appui, les sociétés ont bien échangé des informations telles que le bordereau de prix unitaires. Appelée "offre de couverture", cette pratique vise à favoriser l’offre d’un candidat par l’émission d’une offre moins intéressante. Pour sa défense, la société J. Grenot a indiqué que cette pratique ne pouvait pas être sanctionnée puisqu’elle n’avait finalement pas obtenu l’un de ces marchés. Confirmant sa jurisprudence classique, l’Autorité de la concurrence a toutefois rappelé que "de telles pratiques sont répréhensibles du seul fait de leur existence, peu importe que leur auteur ait, en définitive, obtenu ou non le marché". Dès lors, l’Autorité de la concurrence a considéré que la société J.Grenot avait "parfaitement conscience de tromper la collectivité et ne pouvant ignorer le caractère illicite des pratiques constatées". Ces ententes anticoncurrentielles ont également été sanctionnées au titre de de l’article L. 420-1 du code de commerce.

Devis de complaisance

Enfin, en vue de remporter un marché public lancé par la commune de Roussillon, la société J.Grenot a demandé à deux entreprises de lui fournir des devis à des prix plus élevés que les siens. Ces deux entreprises n’ont toutefois pas été choisies au hasard. La première, DM Régulation, est une filiale à 99,9% de la société DMR Services, détenant elle-même 70% de la société J. Grenot. La seconde, Fiard Electrique, est un sous-traitant ponctuel du groupe DMR Services. La société J.Grenot a donc demandé à ces sociétés des offres de couverture et ces dernières ont accepté de participer à cette pratique anticoncurrentielle qui a totalement faussé la concurrence. Lors de l’audition, la société Fiard Electrique a indiqué "qu’elle ne possédait pas la compétence pour réaliser les travaux demandés mais qu’elle ne souhaitait pas refuser l’établissement d’un devis de complaisance à la société J.Grenot compte tenu de leurs bonnes relations commerciales".
Pour l’ensemble de ces pratiques anticoncurrentielles, l’Autorité de la concurrence a prononcé une sanction de 19.000 euros à l’encontre de la société J.Grenot.

Référence : Autorité de la concurrence, 24 septembre 2018, n° 18-D-19

 

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