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Habitat / Social - Hébergement : une capacité plus importante, mais pas suffisante

La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux publie les résultats d'une étude sur les places d'hébergement pour les personnes en difficulté sociale. Si la coïncidence tient sans doute du hasard, la publication de ce document - qui porte sur des données 2012 - tombe à un moment très opportun. L'hébergement fait en effet partie des quatorze postes budgétaires sur lesquels le secrétaire d'Etat au Budget vient d'annoncer son intention de procéder à une "revue de dépenses".

Capacité en hausse de 18% en quatre ans... mais 96% de taux d'occupation

L'étude de la Drees - sans se prononcer évidemment sur la question - fournit cependant des pistes de réponse. D'un côté, elle montre que l'offre d'hébergement - CHRS, Cada, résidences sociales, maisons relais... - pour les personnes en difficulté sociale s'est sensiblement accrue, avec une hausse de la capacité de 18% entre 2008 et 2012, pour atteindre un total de 101.000 places réparties dans 2.524 établissements. Mais, d'un autre côté, l'étude montre aussi que la pression sur le dispositif d'hébergement demeure toujours aussi forte, comme le montre le taux d'occupation de 96%, en hausse de trois points entre 2008 et 2012. Un chiffre que l'on ne retrouve guère que dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et qui monte même à 100% - ce qui équivaut à une surcapacité de fait - dans les Cada ou les centres provisoires d'hébergement.
La croissance du nombre de places recouvre toutefois de fortes différences selon les catégories d'établissements. Si les CHRS (41% des places) et les Cada (24%) représentent à eux deux les deux tiers de la capacité d'accueil, les croissances les plus fortes sont à chercher du côté de dispositifs innovants, comme les maisons relais (10% du parc, mais 128% de croissance entre 2008 et 2012).
En termes géographiques, l'étude confirme la concentration sur Paris et l'Ile-de-France, qui comptent 25% des places pour 18% de la population, avec en outre une forte présence des grandes structures (44% des établissements de plus de 200 places se trouvent en Ile-de-France). Si on élargit l'approche géographique, il apparaît toutefois que les quatre premières régions - Ile-de-France, Rhône-Alpes, Paca et Nord-Pas-de-Calais - regroupent près de la moitié de la capacité d'hébergement pour 41% de la population. Une concentration certes, mais qui n'a rien d'excessif au regard de l'attractivité de ces territoires pour les personnes mobiles et pour les demandeurs d'asile.

La qualité et l'accompagnement en forte progression

Au-delà des questions de capacités et de répartition de l'offre, l'étude apporte aussi des enseignements plus qualitatifs. Ainsi, il apparaît un recul de l'accueil d'urgence et de stabilisation (36% des places, mais une baisse de huit points depuis 2008), au "profit" de l'accueil d'urgence au sens strict (+55% sur la période) et notamment des centres d'hébergement d'urgence (CHU). Autre signe d'une relative spécialisation du dispositif : les places de stabilisation pures progressent, elles aussi, de 12% entre 2008 et 2012, de même que l’hébergement pérenne dans des établissements d’accueil mère-enfants (+14%).
Contrairement à une idée reçue, la capacité d'accueil des Cada, après s'être fortement accrue entre 2004 et 2008 (+40%) s'est très nettement ralentie sur la période considérée (+2% entre 2008 et 2012). Mais le taux d'occupation de 100% mesuré en décembre 2012 témoigne d'une surchauffe évidente.
En termes de qualité de l'hébergement, les progrès sont incontestables, comme le montrait déjà le bilan publié, il y a quelques semaines, sur l'humanisation des centres d'hébergement (voir notre article ci-contre du 10 avril 2015). Ainsi, 57% des places sont situées dans des appartements ou des maisons. Les places en dortoir ou "chambres partagées" ne représentent plus que 10% de la capacité.
Enfin, l'étude de la Drees met en évidence le rôle croissant des services intégrés d'accueil et d'orientation, créés en 2010. Un cinquième des admissions en CHRS sont ainsi passées par le biais d'un Siao. Elle montre aussi l'enrichissement de l'offre des structures d'hébergement, de plus en plus nombreuses à proposer des "services d'accompagnement étendus" : 91% des établissements proposent une aide aux démarches administratives et juridiques, 62% une domiciliation (contre 53% en 2008), 59% une aide à la parentalité, 37% une restauration collective...