Instance nationale de la prévention de la perte d’autonomie, la conférence nationale de l'autonomie est lancée

Visant à définir une feuille de route nationale pour la prévention de la perte d’autonomie et à débattre des moyens, la première conférence nationale de l’autonomie a eu lieu ce 9 juillet, en présence d’un grand nombre d’acteurs du secteur et des trois ministres concernés. Les orientations définies au niveau national devront irriguer les conférences des financeurs de la perte d’autonomie. L’accent est mis, pour ce lancement, sur la nécessité d’avoir une vision précise des financements alloués et d’évaluer scientifiquement l’efficacité des programmes mis en œuvre, pour une éventuelle réallocation des moyens. Déjà expérimenté dans neuf régions, le programme Icope de détection précoce des fragilités sera progressivement généralisé. 

"La prévention de la perte d’autonomie est une priorité nationale", a affirmé ce jour la ministre de l’Autonomie Charlotte Parmentier-Lecocq, en ouverture de la première conférence nationale de l’autonomie (CNA), qui s’est tenue ce 9 juillet 2025 en présence également des ministres Catherine Vautrin (Solidarités) et Yannick Neuder (Santé). Ce même jour, paraissait au Journal officiel le décret précisant la composition et le fonctionnement de la CNA (voir encadré ci-dessous), qui a été instaurée par la loi du 8 avril 2024 sur le bien vieillir et l’autonomie (voir notre article) pour "définir les orientations et débattre des moyens de la politique de prévention de la perte d'autonomie". 

"Pendant trop longtemps, la prévention a été la variable d’ajustement de nos politiques publiques. Elle devient aujourd’hui une priorité assumée, pilotée et structurée", affirme Charlotte Parmentier-Lecocq, dans le dossier de presse dédié à la CNA. Le gouvernement rappelle quelques chiffres : 1,5 million de personnes âgées vivent aujourd’hui avec une perte d’autonomie reconnue (GIR 1 à 4) et 40% des situations de dépendance "pourraient être évitées ou retardées par la prévention". Chaque année, 130.000 hospitalisations et 10.000 décès sont dus à des chutes de personnes âgées ; la prévention des chutes "permettrait une économie annuelle estimée à 1 milliard d’euros". Alors que les personnes âgées de plus de 85 ans passeront de 2,4 millions aujourd’hui à 3,8 millions en 2040, l’enjeu, aussi bien sociétal que financier, est de retarder l’espérance de vie en bonne santé. 

Des actions "trop peu accessibles, mal connues ou inégalement déployées"

Depuis l’adoption en 2015 de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, des actions de prévention ont été mises en place dans le cadre des commissions des financeurs réunies dans chaque département. "Ces actions restent trop peu accessibles, mal connues ou inégalement déployées, notamment dans les zones rurales ou les quartiers prioritaires", selon le gouvernement. L’enjeu de la CNA est donc de mettre en place une forme de coordination au niveau national, reposant sur une feuille de route et des indicateurs partagés. Cette "politique de prévention universelle, nationale mais territorialisée et adaptée aux besoins des plus vulnérables" doit également permettre de réduire les inégalités territoriales. Un enjeu sur lequel a insisté Olivier Richefou, président du département de la Mayenne et du groupe de travail Grand Âge de Départements de France, qui invite également les départements à faire exister "ce dialogue" sur la prévention dans le cadre du service public départemental de l’autonomie (SPDA). La coordination des acteurs est indispensable, pour Catherine Vautrin qui estime que des dispositifs tels que MaPrimeAdapt’ n’étaient pas encore assez connus.    

Les financeurs sont nombreux (collectivités, agences régionales de santé, CNSA, caisses de retraite…) et le premier objectif de la CNA est de "mettre à plat l’ensemble de ces financements", selon le cabinet de la ministre de l’Autonomie. Est mis en avant le chiffre global de 1,5 milliard d’euros qui serait actuellement dépensé en matière de prévention de la perte d’autonomie. Cette estimation, issue d’un rapport de la Cour des comptes de 2021 (voir notre article), paraît toutefois surdimensionnée car elle intègre notamment les aides techniques (fauteuils, déambulateurs, cannes…) financées par l’Assurance maladie (458 millions d’euros), aux côtés des crédits dédiés à l’adaptation du logement (224 millions), des conférences des financeurs (203 millions) et de l’action sociale des organismes de protection sociale et des caisses de retraite. 

Évaluer scientifiquement pour "concentrer les moyens sur les dispositifs les plus efficaces"

Si l’heure est plutôt à la restriction globale des moyens, l’entourage de la ministre assure qu’il n’est pas question à ce stade de diminuer les enveloppes allouées à la prévention, mais plutôt d’évaluer, dans le cadre de la CNA, l’ensemble des actions financées au titre de la prévention, dans la perspective de "concentrer les moyens sur les dispositifs les plus efficaces", indique l’entourage de la ministre. La CNSA porte pour cela le centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d’autonomie, qui a été créé par la loi Bien vieillir d’avril 2024. En outre, "afin de garantir une approche transversale, fondée à la fois sur la preuve, l’expérience et l’ouverture, le gouvernement a confié une mission d’accompagnement à deux personnalités qualifiées" : Maria Soto Martin, professeur de médecine gériatrique, et Sandrine Andrieu, professeur en épidémiologie clinique et santé publique et responsable du programme Inserm Aging-Maintain, toutes deux au CHU de Toulouse. 

L’Occitanie et le CHU de Toulouse sont notamment engagées dans l’expérimentation du programme Icope – expérimenté en tout dans neuf régions -, qui vise à un repérage précoce de la perte d’autonomie pour une action de prévention rapide. Le "parcours Icope" comprend quatre étapes : le repérage des fragilités, l’évaluation fonctionnelle des capacités clés (mobilité, mémoire, nutrition, vision, audition, humeur), le plan d’action personnalisé et le suivi régulier. Catherine Vautrin confirme la volonté du gouvernement de généraliser Icope sur tout le territoire. Mentionnant également "la mobilisation remarquable des gérontopôles" qui portent avec la CNSA les programmes "Prenons l’âge du bon côté", Charlotte Parmentier-Lecocq appelle à permettre aux initiatives prometteuses "du succès isolé à la généralisation". Pour le ministre de la Santé Yannick Neuder, la montée en puissance de la prévention nécessite de former davantage de soignants et de réussir le virage domiciliaire. 

› Qui siège à la conférence nationale de l’autonomie ? 

Au total, 75 membres doivent y siéger, dont 12 représentants d’associations du secteur, six représentants de départements, un représentant des communes et intercommunalités et un représentant des régions, sept représentants de l’État (outre les deux ministres de l’Autonomie et de la Santé qui co-président l’instance), un député et un sénateur. Sont également membres les présidents d’instances nationales telles que le Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, les représentants de fédérations hospitalières, de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas) d’organismes de protection sociale (dont la CNSA), les représentants d’organisations de salariés et d’employeurs et quinze personnalités qualifiées.

Selon le décret, la CNA se réunit "au moins une fois par an" et "formule des priorités stratégiques pluriannuelles à l’attention des acteurs nationaux et locaux de la prévention de la perte d’autonomie en faveur des personnes de soixante ans et plus". "Suivies par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie" (CNSA) qui assure également le secrétariat de la CNA, ces orientations "guident les commissions des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie (…) dans la priorisation des actions à financer". Un "rapport d’orientation" (bilan des actions nationales et locales, état des lieux des connaissances scientifiques, préconisations) est adopté à l’issue des travaux de la conférence.

Référence : Décret n° 2025-621 du 8 juillet 2025 relatif aux modalités de mise en œuvre de la conférence nationale de l’autonomie, publié au Journal officiel du 9 juillet 2025. 

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis