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Investissement - InvestEU : le futur fonds européen bien plus favorable aux projets locaux

Répondant aux critiques récurrentes contre le plan Juncker, la Commission souhaite, à travers le futur fonds InvestEU, des financements plus adaptés aux petits projets locaux, notamment dans les "investissements sociaux".

"Atteindre des projets plus petits et locaux sera important." L’objectif est écrit noir sur blanc dans la proposition de règlement du futur plan d’investissement pour l’Europe  "InvestEU" présenté par le président de la Commission Jean-Claude Juncker et le vice-président Jyrki Katainen, mercredi 6 juin. Il pourrait donc s’avérer beaucoup plus intéressant et accessible pour les collectivités que le plan Juncker, dont il est amené à prendre la suite tout en le pérennisant. En effet, InvestiEU regroupera en une caisse unique le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) - le bras financier du plan Juncker - et les autres instruments financiers de l’UE (Cosme, InnovFin…). Rappelons tous ces instruments partagent la même philosophie : utiliser les crédits européens comme garantie publique pour créer un effet de levier sur l’investissement privé, plutôt que sous forme de subventions. La Commission propose ainsi d’injecter 15,2 milliards d’euros dans InvestEU afin d’offrir une garantie publique de 38 milliards d’euros qui, par la magie de l’effet de levier, pourrait engendrer un total d’investissements essentiellement privés de 650 milliards d’euros sur les sept ans de la prochaine programmation 2021-2027. La Commission peut s’appuyer sur le succès du plan Juncker qui "a déjà généré près de 290 milliards d'euros d'investissements qui n'auraient pas été possibles sans lui et a fourni un financement à 635.000 petites entreprises", s’est félicité le président de la Commission. Le plan est en effet à peu près dans les clous puisque la Commission envisageait un investissement de 315 milliards d’euros cette année, puis 500 milliards en 2020. Avec InvestiEU, elle souhaite simplifier son fonctionnement, "faire plus avec moins" et investir davantage dans les "investissements sociaux".
"Le plan Juncker a été lancé pour relancer l’investissement en chute libre en Europe, il s’agissait de faire du volume, de l’abattage avec de gros projets, maintenant on est dans l’après-crise, la Commission mise plus sur le qualitatif, c’est une autre logique qui devrait profiter aux petits projets insuffisamment pris en compte jusque-là", explique un spécialiste. Le pli a déjà pris avec le plan Juncker 2 lancé en décembre sur lequel on n’a pas encore de recul.

Quatre domaines d'intervention

Concrètement, InvestEU investira dans quatre domaines : les infrastructures durables ; la recherche, l'innovation et la numérisation ; les petites et moyennes entreprises ; les investissements sociaux et les compétences. Les trois premières priorités bénéficieraient de 11,5 milliards d’euros de garantie publique et les investissements sociaux de 4 milliards.
Dans la fenêtre "investissements sociaux et compétences", la Commission désigne le microcrédit, l’économie sociale et solidaire, l’éducation et la formation, l’inclusion, l’accessibilité mais aussi les infrastructures sociales telles que les maisons de retraite, les crèches ou encore le logement étudiant… S’agissant des infrastructures durables, il en va du transport, de l’énergie, de la couverture numérique, de l’approvisionnement de matières premières, de la gestion de l’eau ou des déchets…
Autant de domaines qui intéressent les collectivités au premier chef. Or la Commission souhaite permettre aux Etats d’employer jusqu’à 5% de leur enveloppe de fonds structurels pour compléter la garantie. Chacun des quatre domaines d’intervention pourrait ainsi comporter un volet national optionnel. "Les fonds transférés dans le fonds InvestEU bénéficieront de la garantie de l'Union et de sa note de crédit élevée, ce qui augmentera la force de frappe des investissements nationaux et régionaux", souligne la Commission, dans son communiqué. Mais surtout, cela permettrait aux Etats d’être raccords avec le délicat régime sur les aides d’Etat (le règlement sur les aides d’Etat devrait en effet être modifié en ce sens).

Ouverture aux banques nationales et régionales de développement

Une autre grande nouveauté pourrait favoriser les petits projets locaux : la Banque européenne d’investissement (BEI) demeurerait le partenaire privilégié de la Commission pour la mise en oeuvre du fonds mais elle perdrait son monopole dans l’accès directe à la garantie : "Les banques et autres institutions nationales et régionales de développement des Etats membres qui disposent d'une expérience et d'une expertise spécifiques pourront devenir des partenaires financiers, dans certaines conditions", précise la Commission. Dans l’exposé des motifs du règlement d’InvestEU, elle précise qu’elle entend réserver 75% de la garantie aux partenaires susceptibles de couvrir l’ensemble de l’UE. En clair : à la BEI. Les banques publiques d’investissement nationales (NPBI) pourront donc utiliser le quart de cette garantie. Mais avant cela, ces établissements devront recevoir un agrément (le "pillar assessment") certifiant leur robustesse et leur rigueur. Certains ont déjà obtenu l’estampille dans le cadre du volet extérieur de l’Union pour leurs interventions en Afrique, c’est le cas de l’Agence française de développement (AFD), de la KFW allemande ou de la Casa de Depositi italienne. Les autres, comme la Caisse des Dépôts, vont devoir en faire la demande. Mais une règle devrait leur faciliter la tâche. La Commission impose qu’ils couvrent aux moins trois Etats membres avec la possibilité de se constituer en groupe. "Nos institutions présentent de nombreux atouts, elles sont agiles, proches du terrain et des territoires dans lesquels elles agissent au quotidien dans des contextes parfois complexes, fait valoir Laurent Zylberberg, président de l’association européenne des investisseurs de long terme (ELTI) et directeur des relations institutionnelles, européennes et internationales du groupe Caisse des Dépôts. L’accès direct à la garantie de l’Union européenne pour les NPBI qui disposeraient d’un agrément permettra sans nul doute d’élargir et de multiplier les bénéficiaires et ainsi de rendre encore plus perceptibles les actions très positives de l’Union européenne."
 

 

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