La direction interministérielle du numérique renforce ses capacités d'accompagnement des administrations

Avec 40 recrutements et la création de "brigades", la nouvelle feuille de route de la Dinum met l'accent sur la montée en compétences des ministères sur le numérique et la data. Elle reste aussi attachée à la création de "produits" dont certains ont vocation à "infuser" dans les territoires.

La direction interministérielle du numérique (Dinum) va passer d’ici 2024 à 220 agents en recrutant 40 experts supplémentaires. "Un renforcement destiné à nous permettre d’exercer de nouvelles missions", a expliqué le 9 mars 2023 Stéphanie Schaer à l’occasion d’un brief presse consacré à la nouvelle feuille de route de l'administration qu’elle dirige depuis septembre 2022.

Expérimenter et limiter les dérapages

Les nouveaux agents de la DSI de l'État auront pour mission d'accompagner les ministères à monter et conduire leurs projets numériques. Ces "brigades d’intervention" pluridisciplinaires constituées d’une vingtaine de personnes apporteront aux ministères une expertise en matière de design, d'accessibilité, de cloud computing (1) ou encore de management de projet. Et au-delà des recommandations – que la Dinum produisait déjà mais avec un succès limité comme le relève le bilan associé à la feuille de route – elle sera en capacité d’intervenir pour aider à rattraper les projets connaissant des dérapages calendaire et budgétaire. Cette "task force" (2) est par ailleurs complétée par un nouveau service DRH chargé d’aider les ministères à recruter et fidéliser des compétences numériques.

Valoriser les données

Les fondamentaux de la Dinum ne vont ensuite pas véritablement changer. Beta.gouv, pour l’incubation de start-up d'État et de territoires, voit ainsi ses missions confirmées. La philosophie de l’incubateur – partir de problèmes à résoudre, expérimenter selon des méthodes agiles, généraliser ce qui a fait ses preuves, mesurer l’impact par des chiffres – est du reste érigé en ligne de conduite pour la Dinum. Côté data, son objectif reste de faire en sorte que les données (ouvertes ou non) soient davantage valorisées par les administrations. Au-delà des moyens proposés par data.gouv, la Dinum propose désormais les services d’un Datalab - un pôle de datascientist et de spécialistes de l’intelligence artificielle - et un fonds doté de 10 millions d’euros pour aider au démarrage des projets. "Les projets data doivent contribuer à simplifier les formalités des usagers par du préremplissage de formulaire ou rendre l’administration proactive en allant au-devant des demandes des citoyens", a expliqué la directrice.

Le programme TNT conforté

Sur le volet collectivités, le programme Transformation numérique des territoires (TNT), structure de concertation pilotée par la Dinum qui associe représentants des ministères et associations de collectivités, est également conforté. "Il s’agit d’une instance de dialogue avec les collectivités qui contribue à faire réussir les projets numériques de bout en bout", souligne Stéphanie Schaer. Concrètement, la Dinum soutient toutes les formes de mutualisation (à commencer par le logiciel libre) et souhaite que les "produits" qu’elle accompagne, dès lors où c’est pertinent, "infusent" dans les territoires en s’appuyant notamment sur l’ANCT. Cela est vrai de projets comme Pix (évaluation des compétences numériques), démarches simplifiées (usine à formulaires) ou encore France Connect (Fédération d’identité). C’est également envisageable sur la partie outillage des agents publics. Après la visioconférence, le transfert de gros fichiers, la messagerie instantanée, la Dinum souhaite compléter le "sac à dos numérique de l’agent" par une suite bureautique "souveraine", projet qui pourrait être mené en partenariat avec l’Allemagne.

  • Les quatre priorités de la feuille de route de la Dinum

1 - Engager une mutation profonde des organisations publiques pour initier et conduire dans la durée les projets numériques de l’État. La Dinum veut sortir du "solutionisme" technologique et s’inspirer de la démarche startup d'État pour éviter les dérapages observés. La Dinum relève en effet qu'"une part significative des projets, et notamment les plus importants, ne respecte pas le cadrage initial, ce qui conduit à un glissement budgétaire moyen de 24% et un glissement calendaire moyen de 26% à fin 2022 ".
2 - Renforcer significativement les compétences numériques au sein de l’État. La Dinum se donne pour mission d'aider l'État à "attirer, recruter et fidéliser des talents du numérique" et de diversifier les profils, aujourd’hui trop souvent cantonnés aux problématiques de dématérialisation.
3 - Développer l’exploitation effective des données pour un État plus efficace. La Dinum estime que cette exploitation "n’est pas suffisamment déployée au sein de l’État en dépit des bénéfices certains qu’elle pourrait apporter". Elle vise à satisfaire autant les besoins des citoyens, des entreprises que des administrations au sens large.
4 - Préserver la souveraineté numérique de l’État en investissant dans des outils numériques mutualisés. La Dinum souhaite investir dans du logiciel "dès lors qu’une masse critique de contributeurs est réunie, qu’elle soit issue de la société civile, d’entreprises ou d’États". Ces outils doivent prendre en compte l’accessibilité, l’écoresponsabilité, les problématiques d’identité numérique et le cloud.

(1) Le cloud computing, en français l'informatique en nuage, est la pratique consistant à utiliser des serveurs informatiques à distance et hébergés sur internet pour stocker, gérer et traiter des données, plutôt qu'un serveur local ou un ordinateur personnel.
(2) Task force, force opérationnelle en français, est une forme d'organisation temporaire créée pour exécuter une tâche ou activité donnée.