La politique enfance/jeunesse d'un territoire rural en mutation

Face à la rurbanisation de son territoire, la communauté de communes du canton de Monestier-de-Clermont a notamment misé sur la mise en oeuvre d'une politique enfance/jeunesse pour anticiper l'évolution sociologique de sa population et assurer la cohésion sociale. D'une offre d'activités et de services conçue pour répondre à de nouvelles demandes et pallier les manques, elle a su rebondir afin de structurer une politique s'appuyant sur la promotion tant de l'identité des jeunes que de leur appartenance à un territoire rural ouvert sur la ville et la culture.

En moins d'une dizaine d'années, la communauté de communes du canton de Monestier-de-Clermont (Isère) a vu sa proximité avec l'agglomération grenobloise s'intensifier par le développement des voies de circulation. Son bourg centre, Monestier-de-Clermont, ne sera bientôt plus qu'à vingt minutes de Grenoble. Ce phénomène s'est logiquement accompagné de l'installation de nouveaux habitants venus de la ville. "Cette rurbanisation du territoire n'a rien à voir avec l'arrivée des néo-ruraux il y a vingt ans qui fuyaient la ville pour un nouveau projet de vie. Les rurbains continuent à travailler en ville et veulent disposer à la campagne des mêmes services", observe Matthieu Warin, directeur du centre socioculturel intercommunal Le Granjou. Ce centre a été créé par la communauté de communes en 2002. Il marquait le changement d'une politique au départ bâtie sur l'offre d'activités pour évoluer vers une politique enfance/jeunesse définie et structurée.

L'élaboration d'une politique générale de prise en compte des besoins de la jeunesse

Pour pallier le déficit d'activités de loisirs ou de solutions de garde pour la petite enfance, les élus s'étaient engagés dès 1998 sur la signature avec la Caisse d'allocations familiales (CAF) d'un contrat enfance intercommunal, suivi d'un contrat temps libres. Ces deux contrats permettaient à la collectivité, grâce au cofinancement de la CAF, de créer ou de développer de nouveaux services répondant aux besoins des habitants, en s'appuyant sur des initiatives locales (deux haltes-garderies associatives, un relais assistantes maternelles, des accueils et activités périscolaires, un centre de loisirs d'été associatif, trois centres de loisirs portés par la communauté, une ludothèque associative...). L'initiative était déjà originale en soi car, à l'époque, les contrats intercommunaux (signés alors par le Sivom, la communauté de communes sera créée plus tard) étaient rares et les élus anticipaient sur des besoins exponentiels. "Mais ils ont surtout su dire au bout de deux ans : une somme d'actions ne fait pas une politique, et ils ont travaillé à la définition d'un projet pour éviter de devenir un territoire dortoir", salue Matthieu Warin. "Il s'agissait à la fois de faire en sorte que les nouveaux habitants s'impliquent dans la vie locale et que l'offre de la collectivité ne les enferme pas dans une attitude de consommateurs de services, tout en faisant en sorte que les habitants de souche voient cette mutation comme une évolution positive", commente le directeur du Granjou. Le centre socioculturel a été considéré comme l'outil idéal pour favoriser le brassage des populations, pour soutenir les initiatives privées et pour élaborer des services communs, irriguant les 12 communes et ouverts aux 4.500 habitants. La politique jeunesse s'est inscrite comme un moyen de construire cette nouvelle cohésion sociale.
Aux contrats enfance et temps libres, la communauté a ajouté un contrat éducatif local, signé en 2003 avec les ministères de la Jeunesse et des Sports et de l'Education nationale. "Cela nous a permis de développer la collaboration avec les écoles sur le périscolaire mais surtout avec le collège du canton", précise Jean-Paul Repellin, délégué communautaire en charge à la communauté de communes de la commission sports/culture/loisirs qui traite de la politique enfance/jeunesse. Le directeur du centre socioculturel est référent pour ces trois contrats auprès de la communauté et il supervise la coordinatrice enfance/jeunesse de la communauté.
La population collégienne fait ici l'objet d'une grande attention. "La culture des jeunes aujourd'hui est urbaine. Nos jeunes ont tendance à se positionner par rapport à la ville qui fascine tout autant qu'elle fait peur. Ils ont également du mal à revendiquer leur identité territoriale. Certains jeunes vivent douloureusement le passage du collège au lycée qui les amène à rejoindre la ville. Ils trimballent une représentation de la campagne et des a priori tenaces. Nous en avons eu l'illustration lors des premiers échanges entre nos collégiens et d'autres de la ville, les uns se faisant traiter de ploucs, les autres de racailles", expose Matthieu Warin. En lien avec le collège (situé à 50 mètres du Granjou), le centre socioculturel et la coordinatrice de la politique enfance/jeunesse de la communauté de communes organisent diverses activités favorisant l'identité des jeunes du canton et l'appropriation de la ville.

Accompagner les élèves dans leur passage du collège (rural) au lycée (en ville)

"Il ne s'agit pas de donner des piqûres d'urbanité à nos gamins mais qu'ils se sentent bien dans leurs baskets", souligne Matthieu Warin. "Il y a un réel problème de culture entre le rural et l'urbain, le projet -AR- est une bonne réponse", confirme et commente Jean-Paul Repellin. Le projet Aller/Retour consiste en des échanges entre les jeunes du collège et celui de Saint-Martin-d'Hères et différents équipements socioculturels de l'agglomération grenobloise, pendant le temps scolaire, lors d'ateliers de pratiques artistiques ou de sorties de loisirs. "Nos animateurs réussissent à assurer un équilibre entre l'offre d'activités pour ne pas frustrer les gamins  par rapport à ce qui les entoure, comme des sorties ciné à Grenoble tout en favorisant la création, l'animation et leur autonomie, par exemple en les aidant à monter leurs propres associations", apprécie Jean-Paul Repellin.
Autre "fierté" locale, l'Ecole du spectateur, qui permet la rencontre des enfants et des adolescents avec des artistes en résidence (plasticiens, comédiens...). "Des enfants de dix ans peuvent avoir déjà vu sur trois ans une quinzaine d'expositions différentes, rencontrés autant d'artistes et avoir découvert des expressions artistiques très diverses. Outre l'éveil, cela les valorise par rapport aux urbains", se réjouit Matthieu Warin.

Communauté de communes du Canton de Monestier-Clermont

Nombre d'habitants :

3908

Nombre de communes :

12
Parc Louis Samuel
38650 Monestier de Clermont

Jean-Paul Repellin

Délégué communautaire chargé de la commission sports/culture/loisirs

Centre socioculturel intercommunal

9 bis rue de la Longeville
62650 Hucqueliers

Matthieu Warin

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