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Environnement - L'Autorité environnementale en passe de franchir la barre des 500 avis rendus

A l'occasion de la présentation de son bilan d'activité 2014, le 7 avril, l'Autorité environnementale (AE) a rappelé sa doctrine d'intervention. En 6 ans, elle a rendu près de 500 avis sur la bonne prise en compte des enjeux environnementaux par les maîtres d'ouvrage ou autorités décisionnaires, concourant à renforcer son rôle de gardien du temple de l'évaluation environnementale.

Les élus locaux ne la connaissent pas forcément, pourtant l'Autorité environnementale (AE) affiche une certaine originalité et veut le faire savoir, dans la limite de ses possibilités. Particularité en France : cette autorité administrative  n'est pas directement rattachée au cabinet de la ministre de l'Ecologie mais - légère différence avec la plupart des voisins européens - à l'un des services d'inspection et d'expertise de son ministère, le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Son mode de travail est à flux tendu. Moins encore que la Commission nationale du débat public (CNDP), elle n'a guère de visibilité sur son programme à moyen terme. Le court terme prévaut car son activité dépend des saisines des maîtres d'ouvrage, auxquels elle communique des avis à caractère consultatif, transversaux qui sont en même temps rendus publics - ils sont tous mis en ligne.  Suite à ces avis,  les maîtres d'ouvrage présentent s'ils le souhaitent des mémoires en réponse. C'est ainsi qu'au fil du temps, parfois un an ou plus après l'avis rendu, sur des sujets aussi sensibles que le dragage des sédiments portuaires ou la compensation des atteintes à la biodiversité, des projets se bonifient. Du moins, les études d'impact qui les précèdent, étape cruciale s'il en est, mais pas toujours forcément bien conduite par les maîtres d'ouvrage. Des signes de progrès sont néanmoins manifestes, avec "moins de tentatives de contournement qu'auparavant", motive-t-on à l'AE. Pour la première fois, elle capitalise aussi ses retours d'expériences : elle a produit une première note sur les aménagements fonciers, agricoles et forestiers (Afaf), en guise de "synthèse commentée de ses avis et pistes de réflexions", et en sortira une autre à la rentrée sur l'impact en termes de bruit. des infrastructures.

Mettre sur la table des enjeux

En veillant à ne pas se poser en donneuse de leçons, l'Autorité oriente, aiguille, identifie des orientations souhaitables en termes de droit ou de doctrine environnementaux, met sur la table des enjeux mais s'en tient là. Philippe Ledenvic, président de l'AE depuis un an, explique : "Cela ne nous empêche pas de nouer des contacts plus en aval des dossiers avec les commissaires-enquêteurs qui, eux, formulent un avis favorable ou non au projet qui porte donc sur son opportunité, alors que nous nous contentons de passer au crible la qualité de l'étude d'impact. Ils nous rappellent qu'ils ont leur propre grille d'analyse et qu'on n'a pas à s'en mêler. Ce rapprochement n'en est pas moins fructueux. Tout comme l'est celui avec nos homologues européens, entamé avec les autorités néerlandaises et wallonnes. Ces contacts sont d'autant plus pertinents sur des projets de type parc éolien en mer, afin de jauger le niveau d'harmonisation chez eux et sur notre façade maritime". Nouveauté, en effet : l'Autorité vient de rendre un premier avis sur l'étude d'impact du parc éolien en mer de Courseulles-sur-Mer (Calvados, Basse-Normandie) attendu pour 2018. Sachant qu'elle a le don de titiller sur des enjeux émergents - ici l'exercice de la pêche professionnelle à l'intérieur du parc éolien et l'impact en termes de bruit sur les mammifères marins - nul doute que les autres régions intéressées par l'éolien en mer (Pays de la Loire, Bretagne, Haute-Normandie), regarderont de près cet avis, qui pointe notamment un manque de connaissances scientifiques.

Conseil aux élus : plus de saisines coordonnées

L'AE examine moins de projets qu'il y a deux ans relevant de l'aménagement, même s'il perdure un flux de dossiers de zones d'aménagement concerté ou ZAC, et ce sont ceux relevant des transports qui prédominent (plus de la moitié des 11 avis pris en 2014). Les dossiers maritimes liés à l'évolution des zones de mouillage léger augmentent. "Nous avons eu aussi beaucoup de pôles d'échange multimodaux, de nouvelles gares comme celle de Montpellier, des projets d'aménagement des canaux de VNF [Voies navigables de France, ndlr], d'élargissement de 2x2 voies et les projets stratégiques des grands ports maritimes comme ceux du Havre et de Rouen", indique Philippe Ledenvic. Ces deux ports disent en tirer un retour d'expérience intéressant. Et militent pour "une évolution vers une autorisation unique regroupant l'ensemble des actions nécessaires". L'articulation entre les niveaux de procédures n'intéresse pas que les pétitionnaires mais aussi les administrations et les élus. Selon l'AE, certains maires ont récemment montré la voie en effectuant une saisine concomitante, à l'occasion d'une demande de permis de construire, avec le préfet qui, lui, avait une demande de défrichement. Deux demandes différentes donc mais avec une même étude d'impact : "L'AE promeut cette pratique et soutient l'idée d'une autorisation unique, cependant peu opérationnelle pour certains grands projets".

Plans et programmes : problème de séparation fonctionnelle

Dans son bilan, l'AE constate que les autorités compétentes négligent encore parfois la nécessité de disposer d'une évaluation environnementale avant d'approuver un plan ou programme. Elle a rendu plusieurs avis sur divers plans : gestion pluriannuelle des canaux de Bourgogne, quatre plans d'action pour le milieu marin, contrats de développement territoriaux (deux avis sur des avenants de CDT). Ou encore sur les schémas régionaux climat air énergie (SRCAE), dont la chaîne d'évaluation environnementale pose des "problèmes de séparation fonctionnelle" ou, pour dire les choses plus simplement, de juge et partie. L'AE déplore aussi n'avoir reçu aucune demande de cadrage préalable depuis... 2009 ; alors que la Commission européenne a rappelé la nécessité d'en réaliser un, "ce qui n'est actuellement pas la pratique en France". Au sujet des mesures compensatoires, elle note une confusion persistante avec les mesures dites d'accompagnement, un défaut d'articulation réglementaire entre Code forestier et Code de l'environnement (posant des problèmes pour les demandes de déboisement) et, plus globalement, un défaut d'obligation de résultat.
 

 

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