Urbanisme - Le Conseil d'Etat précise les conditions d'exercice du droit de préemption sur les parcelles situées en partie dans son périmètre d'application
Par un arrêt rendu le 10 février 2010, le Conseil d'Etat apporte d'utiles précisions quant aux modalités d'exercice du droit de préemption urbain sur les terrains partiellement situés dans le périmètre institué pour l'application de cette prérogative.
Dans cette affaire, le maire de la commune de Hyères-les-Palmiers a préempté par décision du 20 septembre 2001 la fraction d'un terrain soumise à ce droit. Par lettre en date du 12 novembre 2001, la SA Salins d'Europe, propriétaire du bien, a demandé à la commune de se porter acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière mise en vente, conformément aux dispositions de l'article L. 213-2-1 du Code de l'urbanisme. En effet, cet article permet au propriétaire, en cas de préemption partielle, c'est-à-dire d'une préemption exercée par l'administration sur une fraction seulement d'une unité foncière lorsqu'une opération d'aménagement le justifie, d'exiger que le titulaire du droit se porte acquéreur de la totalité du bien mis en vente. Le maire d'Hyères-les-Palmiers a, par décision du 22 novembre 2001, fait droit à cette demande en se portant acquéreur de l'intégralité de l'unité foncière.
La société Golf des Iles d'Or, acquéreur évincé, a saisi le tribunal administratif de Nice d'une requête tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2001. La cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement rendu par les juges de première instance, qui avaient considéré que les conclusions de la société Golf des Iles d'Or tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2001 avaient été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. En effet, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître des demandes d'annulation d'une délibération d'un conseil municipal ou d'un arrêté du maire, même si l'objet de ces décisions est d'autoriser ou de passer un contrat portant sur la gestion du domaine privé de la commune.
Par ailleurs, la cour administrative d'appel a jugé que cette décision, prise à la demande du propriétaire sur le fondement de l'article L.213-2-1 du Code de l'urbanisme, et n'ayant pas le même objet que la première décision de préemption portant sur la fraction du terrain soumise au droit de préemption, ne saurait être qualifiée de confirmative et pouvait donc bien être contestée devant le juge administratif.
Le Conseil d'Etat a certes validé le raisonnement de la cour administrative d'appel de Marseille sur ce point, mais l'a néanmoins censurée en ce qu'elle a estimé que la délibération du conseil municipal habilitant le maire à exercer le droit de préemption sur la fraction de la propriété de la SA Salins d'Europe soumise à ce droit n'était pas de nature à l'autoriser à décider de se porter acquéreur, au nom de la commune, des parcelles non soumises au droit de préemption.
Il résulte des dispositions de l'article L.2122-22 du Code général des collectivités territoriales que le maire, qui bénéficie d'une délégation du conseil municipal pour exercer au nom de la commune les droits de préemption définis par le Code de l'urbanisme, peut exercer ce droit dans les conditions prévues à l'article L.213-2-1 de ce code et donc, le cas échéant, se porter acquéreur de l'ensemble d'une unité foncière mise en vente dont une fraction seulement est soumise au droit de préemption urbain.
L'annulation de la décision de préempter la totalité du bien sur ce fondement aurait en effet privé d'effet les dispositions de l'article L.213-2-1 du Code de l'urbanisme.
Fanny Morisseau, avocat / Cabinet de Castelnau
Référence : CE, 10 février 2010, Commune de Hyères-les-Palmiers, req. n° 322399 (annulation de l'arrêt 05MA02603 du 11 septembre 2008 de la CAA de Marseille)