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Le Conseil de l'UE donne son feu vert à la future PAC

Les contours de la future PAC sont désormais arrêtés. Le compromis de vendredi entre le Parlement et le Conseil a été paraphé par les ministres de l'Agriculture des Vingt-Sept ce lundi 28 juin.  Au programme : éco-régimes, conditionnalités, développement rural et une nouvelle conditionnalité sociale...

Après l’accord trouvé vendredi entre le Conseil et le Parlement, les ministres de l’Agriculture des Vingt-Sept ont formellement approuvé, lundi 28 juin, au Luxembourg, la nouvelle Politique agricole commune 2023-2027. "L’accord politique est fait. Ce n’est pas pour autant la fin de l’histoire", indique-t-on dans l’entourage du ministre de l’Agriculture Julien Denormandie. Des détails techniques devront être apportés. La nouvelle PAC composée de trois règlements (le règlement horizontal, le règlement relatif aux plans stratégiques et le règlement sur l'organisation commune des marchés) devra encore faire l’objet d’une adoption définitive du Parlement et du Conseil à l’automne. "Il s'agit d'un bon accord pour les agriculteurs et pour l'Europe, qui renforcera le système agroalimentaire européen, en le rendant plus durable et plus équitable pour tous", s’est félicitée Maria do Céu Antunes, ministre portugaise de l'agriculture, lundi. "La nouvelle PAC garantira en outre une répartition plus équitable des aides, notamment pour les petites et moyennes exploitations familiales et les jeunes agriculteurs", a abondé la Commission

Chaque Etat devra parallèlement remettre d’ici au 31 décembre 2021 à la Commission son "plan stratégique national" (PSN). Une première version du PSN français est en cours de finalisation, il fera l'objet d'une évaluation environnementale d’ici la fin de l’été avant d'être soumis à consultation publique à l’automne. Après avoir été ainsi remanié, il sera envoyé à la Commission au plus tard le 1er janvier 2022. Six mois de négociation vont alors  s’engager avec l’exécutif européen. La Commission validera le PSN d’ici un an donc, sachant que le PAC entrera en vigueur au 1er janvier 2023. Entretemps, le régime transitoire adopté fin 2020 continuera de s’appliquer.

Architecture verte

L’accord trouvé lundi repose sur une "architecture verte", à savoir l’articulation entre la future PAC et les ambitions du "Pacte vert" européen (contenues dans les stratégies européennes "De la ferme à la fourchette" et "Biodoversité"). Il s’agit d’encourager les agriculteurs à adopter des pratiques plus écologiques. Pas de contrainte donc, mais des incitations. Le dispositif comporte trois étages :

- la principale nouveauté est l’instauration des éco-régimes (ou "éco-schemes"), primes venant récompenser les efforts des agriculteurs en faveur de l’agro-écologie. Le compromis trouvé porte cette part à 25% des paiements directs mais avec de la souplesse : une période d’ "apprentissage" de deux ans est prévue en 2023 et 2024 avant d’atteindre ce taux. L’enveloppe de ces éco-régimes devrait se monter à 48 milliards d’euros au niveau européen ;

- la conditionnalité des paiements. Pour toucher la totalité des aides, les agriculteurs devront respecter des conditionnalités plus exigeantes que par le passé : protection des sols, rotation des cultures, mise en place d’infrastructures agroécologiques...  La diversification des cultures pourra être considérée comme équivalente à la rotation des cultures. Pour rappel, lors de la précédente PAC, ces conditionnalités ne concernaient que le "paiement vert". Désormais elles conditionneront l’accès à l’ensemble des aides.

- au moins 35% des fonds du deuxième pilier (développement rural) devront aller à l’environnement, incluant la moitié des ICHN (indemnité compensatoire de handicap naturel).

Conditionnalité sociale

La nouvelle PAC se veut également plus "équitable". Pour la première fois, l’Europe va se doter d’une "conditionnalité sociale". Au plus tard en 2025 ou dès 2023 si un Etat le décide. Ainsi, pour pouvoir bénéficier des aides, les bénéficiaires devront respecter le droit du travail et le droit social européens. Par ailleurs, 3% des enveloppes seront consacrés aux jeunes agriculteurs. Un défi énorme : en France, près de la moitié des agriculteurs auront atteint l’âge de la retraite dans dix ans.

Les Vingt-Sept se sont montrés timides sur les accords commerciaux et la réciprocité des normes.  Julien Denormandie aurait obtenu "à l’arraché" une déclaration des trois institutions sur le besoin de prise en compte des normes pour les produits importés. Mais il ne s’agit à ce jour que d’un engagement politique des institutions de se saisir du sujet. "Il y a quelques mois on aurait jugé protectionnistes de parler de cela, l’idée fait son chemin (…) Une prise de conscience est au moins équivalente au fait d’avoir un bout d’article dans un règlement", fait-on valoir dans son entourage. Un rapport de la Commission est attendu pour le premier semestre 2022.

Autres avancées, obtenues notamment à l’initiative de la France : le maintien des aides couplées à 15% de l'enveloppe des paiements directs, l’utilisation de ces aides couplées dans une logique de développement des cultures de protéines végétales, l’éligibilité des mélanges de légumineuses et d'herbe… Autant de mesures qui doivent permettre à la France d’accroître son autonomie protéique et de reconquérir sa souveraineté. "Cet accord donne une visibilité pour les sept prochaines années, au service de la compétitivité durable de notre agriculture, de la souveraineté alimentaire de l'Union européenne, et du financement des transitions environnementales et sociales", s’est félicité le ministre lundi. Il aura toutefois maille à partir avec les organisations environnementales qui jugent ces mesures trop peu contraignantes.

 

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