Le développement de circuits courts : des producteurs locaux aux restaurants collectifs en Sud Charente

Depuis 2002, le syndicat mixte du pays Sud Charente encourage la mise en relation entre les producteurs locaux, les transformateurs et les restaurants collectifs. Les tests réalisés grandeur nature dans des cantines d'écoles primaires ont montré l'intérêt et la faisabilité de circuits courts, mais il reste encore à convaincre les artisans et les parents d'élèves. Cette action s'inscrit dans la politique de développement durable du territoire.

Au moment d'élaborer sa charte, des rencontres territoriales sur le développement durable donnent aux élus du pays Sud Charente l'idée de valoriser les produits du terroir. "Une forte population vit de l'agriculture, raconte Jean-Yves Ambaud, vice-président du pays. En discutant avec les autres élus, nous avons compris que nous pouvions soutenir l'économie locale et nous appuyer sur elle pour proposer d'autres manières de produire et de consommer." Les élus signent une convention avec l'AFIPaR (Association de formation et d'information des paysans et ruraux) pour animer un projet expérimental. L'objectif est double : faire entrer les légumes et la viande produits sur place dans des circuits courts qui réduisent le temps de transport et le nombre d'emballages (facteurs de pollution) et développer une connaissance des produits qui redonne du goût et du relief aux aliments consommés. Trois types de publics constituent le noyau dur de l'expérimentation : une trentaine de producteurs, cinq transformateurs (artisans bouchers et charcutiers et grossistes en légumes) et quinze responsables de restaurants collectifs (cantines scolaires principalement). Fin 2002, un budget de 38.000 euros* (avec des financements mobilisés dans le cadre des contrats avec le département et la région) permet l'embauche d'une "facilitatrice" : son rôle est de mettre le projet sur les rails et de coordonner les acteurs.

Un menu "local" consommé pendant une semaine par les élèves

En juin 2003, quatre cantines d'écoles primaires et une cuisine centrale (qui dessert un collège et une maison de retraite) élaborent leur menu durant une semaine avec les seuls produits du cru. Pour soulager le travail des économes, la mise en place de circuits courts repose sur la facilitatrice qui met les restaurateurs en relation avec les producteurs. "Le plus difficile a été de vaincre les a priori des uns et des autres, explique Jean-Yves Ambaud. Les producteurs comme les restaurateurs étaient persuadés que les produits coûteraient trop cher. Les responsables des cantines pensaient aussi qu'ils ne trouveraient pas tout ce qu'ils souhaitent sur place, comme les lentilles par exemple." Or si certains produits sont en effet plus coûteux que dans l'industrie, le coût de revient total des repas (pour environ 150 repas par jour) est le même. Et grâce à la diversité de la production locale, les restaurateurs ne rencontrent aucune contrainte d'approvisionnement.
Par la suite, le pays édite un catalogue de produits pour les responsables de restaurants collectifs (élus ou professionnels). Il publie également un bulletin mensuel qui présente l'expérimentation, fournit les adresses des producteurs et des transformateurs, donne le prix des denrées et propose un menu "local" du mois.
Parallèlement, tout un travail se fait pour défendre la qualité. "On s'appuie sur les labels existants, dit le vice-président, mais nous voulons aussi que les produits viennent d'exploitations à taille humaine, car cela reste un gage de qualité." Pour faire connaître aux élèves des petites classes l'origine de ce qu'ils ont mangé et sortir le produit de son anonymat, le pays organise des journées portes ouvertes avec les producteurs et les transformateurs. Les élus sont d'ailleurs secondés par une équipe pédagogique très impliquée - les instituteurs des dix écoles primaires (100 à 150 élèves par école) du dispositif - qui prolonge ces visites par des leçons sur les aliments et la nutrition. D'autres portes ouvertes ont lieu dans les cantines pour montrer comment on y cuisine les produits locaux.

Le montage d'une plate-forme de distribution des produits locaux

Avec un chiffre d'affaires de 40.000 euros, sur 2,3 millions d'euros potentiels (pour 1,3 million de repas par an dans les restaurants collectifs du pays), les élus considèrent toutefois que cette action reste "anecdotique" et qu'il faut à présent accroître la quantité de produits agricoles disponibles et faire entrer dans le circuit les collèges et les lycées. Le but de ce projet est qu'il trouve son autonomie. L'idée est donc d'organiser une plate-forme de distribution et de sensibilisation aux produits locaux. La partie purement économique du montage de cette filière est prise en charge par les chambres consulaires, avec le soutien du conseil général (incitation auprès des collèges) et du conseil régional (dans le cadre de sa politique de soutien à la restauration hors domicile). Les chambres prennent à leur charge le poste de la facilitatrice avec la même mission de coordination.
Le pays, quant à lui, continue en 2006 de jouer son rôle d'information, de sensibilisation et de coordination de la démarche. Il souhaite poursuivre son action pédagogique auprès des collèges et des lycées, des établissements difficiles à toucher du fait de leur organisation en groupement d'achat (l'approvisionnement des restaurants est réalisé sur contrats annuels avec les fournisseurs). Pour éveiller ces élèves plus âgés à une nourriture locale et de meilleure qualité, des fiches-produits sont élaborées, elles seront distribuées avec les plateaux-repas de leur self. L'AFIPaR travaille toujours aux côtés du pays comme assistant à maître d'ouvrage, notamment pour co-animer le comité de pilotage.
Pour Jean-Yves Ambaud, les échanges entre professionnels ont été très bénéfiques sur le plan social, bien qu'il ait été difficile de trouver des artisans volontaires (seuls deux bouchers participeront à l'opération), la chambre des métiers ayant été peu présente dans les réunions du comité de pilotage. Il note aussi des changements de perception et de comportements vis-à-vis de la nourriture, notamment chez les enfants. En revanche, il a été beaucoup plus malaisé de mobiliser les parents d'élèves et c'est seulement aujourd'hui, après trois ans d'action, que ces derniers demandent à participer aux réunions de travail.

 

* Ce budget comprend le salaire de la facilitatrice et les actions de communication (catalogue, bulletin). Le budget de 2005 était de 40 000 euros, dont 8 000 euros pris en charge par le pays.

Le conseil des élus

"Avant de s'engager, il faut s'appuyer sur une expérience. Après avoir vu les autres collectivités, on revient chez soi enthousiaste et plein de bonnes idées."
"Il faut trouver le moyen d'associer les parents d'élèves, qui ont une influence sur les élus et les conseils d'administration des établissements scolaires. Motiver ce groupe d'acteurs permet sans doute d'aller plus vite."

Syndicat mixte du Pays Sud Charente

Nombre d'habitants :

35000

Nombre de communes :

89
2 Rue Jean Rémon
16210 Chalais

Sylvain Brisa

Animateur du pays

Jean-Yves Ambaud

Vice-président

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