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Intégration scolaire - Le médiateur de l'éducation nationale pointe "la complexité et la lourdeur" du système

Le médiateur de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur a présenté, le 29 juin, son rapport d'activité 2016. Outre la restitution de ses interventions durant l'année, le médiateur consacre son rapport à deux grands sujets thématiques. Le premier concerne les difficultés de l'orientation post-bac et du dispositif APB (admission post-bac). Le second porte sur la scolarisation des élèves en situation de handicap. Avec un bilan mitigé, qui met notamment en évidence "la complexité et la lourdeur d'un système qui empile des dispositifs et multiplie des fonctions et statuts".

Scolarisation des enfants handicapés : +80% en neuf ans

Côté chiffres, le bilan de la loi Handicap du 11 février 2005 - dont l'impact a encore été renforcé par l'introduction du concept d'"école inclusive" dans la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République - apparaît plutôt positif, même si "la scolarisation d'un enfant en situation de handicap est toujours un sujet de tension" et "peut, du côté de quelques familles, relever encore aujourd'hui du 'parcours du combattant'".
A la rentrée scolaire 2015, 350.300 enfants ou adolescents étaient ainsi scolarisés, dont 278.978 dans les écoles et établissements publics ou privés relevant du ministère : 160.043 dans le premier degré et 118.935 dans le second degré. La scolarisation en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap a ainsi progressé de 80% en neuf ans.
L'investissement humain et budgétaire en faveur de la scolarisation des enfants handicapés est également incontestable : "Le médiateur, dans sa mission, a pu constater combien l'institution travaille sans relâche à améliorer la scolarité des élèves handicapés."

Un empilement de dispositifs

Le principal point faible concerne la complexité du système. Comme l'explique le médiateur, "les parents, quand ils rentrent dans une démarche pour faire reconnaître les droits de leur enfant en situation de handicap à l'école, risquent vite d'être submergés par un ensemble de sigles, de dispositifs, de personnes aidantes, d'institutions qui relèvent soit de l'éducation nationale, soit de la santé [...] qu'ils peuvent avoir du mal à identifier". Et cela même si "chacun des dispositifs, qu'il s'agisse de projets ou de plans, paraît bien répondre aux situations pour lesquelles ils ont été conçus".
Selon le rapport, cet empilement de dispositifs pèse davantage que le manque de moyens (en structures, en médecins, en équipements...), même si le médiateur pointe aussi un "déficit chronique de places" dans les établissements médicosociaux pour accueillir les enfants lourdement handicapés et la persistance d'inégalités dans la répartition territoriale de l'offre de prise en charge. Parmi les principales difficultés matérielles, le rapport cite notamment le "manque récurrent de médecins de l'éducation nationale", mais aussi "une CDAPH (Ndlr : commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées) prescriptive qui doit traiter de nombreux dossiers et une institution scolaire qui n'a pas toujours les moyens financiers et en ressources humaines d'y répondre".

La question centrale de l'accompagnement des enfants

Si l'on s'en tient aux seules interventions du médiateur, la majorité des réclamations formulées par les parents concernent des problèmes liés aux accompagnants : absence d'accompagnants auprès de l'élève, nombre d'heures non conforme à la décision de la CDAPH... Viennent ensuite les réclamations portant sur les aménagements relatifs aux examens, sur l'aménagement de la scolarité, sur des situations conflictuelles (désaccord avec l'établissement, problèmes liés au comportement de l'élève), sur des désaccords concernant l'orientation ou le passage dans une classe supérieure...
Du côté des accompagnants des élèves (AESH, AVS...), les réclamations portent essentiellement sur le contrat et sur le versement de la rémunération.

"Réécrire le corpus réglementaire et infra-réglementaire" pour gagner en lisibilité

Face à ces constats, le médiateur de l'éducation nationale formule un ensemble de propositions. Parmi celles-ci, on retiendra notamment la suggestion de "réécrire le corpus réglementaire et infra-réglementaire pour rendre plus lisible l'ensemble des dispositifs et permettre à chaque élève de bénéficier des droits particuliers liés à sa situation".
Autres préconisations : former les directeurs d'écoles et les chefs d'établissements à un meilleur accueil et au suivi des élèves en situation de handicap, prévoir dans chaque établissement la désignation d'une personne "ressource" pour relayer la politique de la structure et seconder le chef d'établissement, ou encore introduire dans le projet d'établissement un volet "accueil des publics relevant du handicap".
Le rapport recommande également d'introduire le suivi des élèves en situation de handicap dans les obligations de service des enseignants du second degré et de renforcer la formation initiale et continue des personnels, tout en formant suffisamment d'enseignants spécialisés pour enseigner dans les Ulis (unités localisées pour l'inclusion scolaire).

Des recommandations qui tombent à pic

Du côté des AVS (assistants de vie scolaire) et autres auxiliaires, le médiateur préconise notamment de mettre en place, dans l'immédiat, un service unique de traitement des contrats et de simplifier leur procédure d'élaboration, avant de ne conserver qu'une seule catégorie de contrat, "pouvant donner lieu, à terme, à la création d'un corps de la fonction publique [...]".
Un rapport qui tombe a pic, si on se souvient que, lors du débat télévisé de l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron avait consacré les deux minutes "carte blanche" de son temps de parole à la scolarisation des enfants handicapés et que la secrétaire d'Etat Sophie Cluzel - qui lui est directement rattachée - a déjà évoqué la nécessité de revoir un cadre "complexe et générant trop de fonctionnement en silo" lors de sa communication au conseil des ministres du 7 juin (voir notre article ci-dessous du même jour).

 

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