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Rythmes scolaires - Le projet éducatif territorial, cheval de Troie des collectivités ?

Vincent Peillon l'avait promis : sa refondation de l'école donnerait davantage de pouvoirs aux élus locaux. Son outil : le projet éducatif territorial, qui permet aux collectivités de pénétrer dans la forteresse scolaire férocement défendue. Une circulaire en fixera prochainement les contours.

Le ministère de l'Education nationale adressera dans les prochaines semaines aux collectivités territoriales un guide pratique sur la mise en oeuvre de la réforme des rythmes à l'école primaire. Entretemps, il doit boucler et publier trois textes réglementaires.
Premier texte attendu : le décret sur l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires. Le ministère semble bien décidé à conserver le projet de décret tel qu'il l'avait soumis au Conseil supérieur de l'éducation (détails du projet dans notre article ci-contre du 4 janvier 2013) et que ce dernier a rejeté mardi 8 janvier, les syndicats et parents d'élèves jugeant dans leur majorité que le décret donnerait trop de pouvoirs aux collectivités à leurs goûts (voir notre article du 9 janvier 2013).
Sont également attendues une circulaire sur l'organisation du temps d'enseignement scolaire et des activités pédagogiques complémentaires dans le premier degré et une autre circulaire, interministérielle, relative au projet éducatif territorial.

Un engagement contractuel

Impulsé par une collectivité, le projet éducatif territorial (PET ou PEDT) organisera les activités périscolaires prolongeant le service public de l'éducation : il doit, selon le ministère, "permettre de structurer, de diffuser et de mieux articuler le temps scolaire organisé par l'Education nationale et le temps périéducatif". Le ministère le conçoit comme "un cadre fédérateur au niveau local" dont "le but est de mobiliser toutes les ressources du territoire, afin d'offrir à chaque enfant un parcours éducatif cohérent et de qualité". Le tout " en respectant le domaine de compétences de chacun".
Le PEDT associera donc à la collectivité territoriale les acteurs intervenant dans le domaine de l'éducation : les administrations de l'Etat concernées (dont éducation nationale, mais aussi sports, jeunesse, éducation populaire et vie associative, culture, famille, ville… sont citées), les associations, notamment d'éducation populaire, les institutions culturelles et sportives…
Le PEDT constitue alors, pour tous ces partenaires, l'engagement contractuel définissant le cadre de leur collaboration : le périmètre du territoire concerné, la durée de l'engagement, les objectifs, les priorités retenues, les effets attendus sur le territoire, ou encore la méthodologie (diagnostic, qualification des intervenants, évaluation).
Le pilotage partenarial devrait permettre d'assurer la complémentarité des dispositifs portés par les différents acteurs : contrats locaux d'accompagnement à la scolarité (Clas), contrats "enfance jeunesse" (CEJ), volet éducatif des contrats urbains de cohésion sociale (Cucs)…

"Garantir une continuité éducative"

Dans ce cadre, "le rôle de l'Education nationale est notamment de construire, d'orienter et d'évaluer les actions mises en place afin de rechercher la cohérence entre ces dispositifs et les projets d'école", souligne le ministère, qui souhaite que le PEDT veille à "garantir une continuité éducative entre les projets des écoles et des établissements et les activités proposées aux élèves en dehors du temps scolaire, et donc une meilleure articulation des différents temps de vie de l'enfant avant, pendant et après l'école".
Le PEDT aura enfin vocation à organiser le "parcours éducatif" de tous les jeunes scolarisés dans les écoles des communes (ou intercommunalités) concernées. Il précisera notamment les modalités de scolarisation avant trois ans envisagées sur le territoire et c'est lui qui permettra de proposer des aménagements locaux à l'organisation du temps scolaire (choix du mercredi ou du samedi, durée de la pause méridienne, horaires des temps périscolaires…)

L'expérience des CEL

Le PEDT s'appuie sur l'expérience des contrats éducatifs locaux (CEL) développés depuis une vingtaine d'années à différentes échelles : communale, intercommunale (urbaine et rurale), départementale. Selon le ministère, les CEL ont concerné au total jusqu'à 11.000 communes et 2,6 millions d'enfants depuis la fin des années 90.
Pour choisir le périmètre d'action d'un PEDT, il faudra veiller à ce qu'il "corresponde à une problématique éducative territoriale bien identifiée" : le PEDT devra être "un cadre qui fédère des quartiers, des communes, des groupements de communes autour d'un projet éducatif".
Projet éducatif qui devra exprimer une "ambition éducatrice", c'est-à-dire reposer sur la définition de grandes priorités partagées. Cela supposera d'identifier les principales difficultés et forces du territoire, d'appréhender les caractéristiques du public scolaire à partir des échanges avec les responsables de l'éducation nationale et de dresser un inventaire de l'offre d'activités périscolaires dans les champs culturel, artistique et sportif.
Pour y parvenir, le ministère insiste la méthodologie. Comme pour toute démarche projet, il faudra suivre les étapes suivantes : élaboration d'un diagnostic local partagé, définition des priorités territoriales puis des objectifs, mise en œuvre et évaluation.