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Politique de la ville - Le rapport André-Hamel propose la suppression des zones urbaines sensibles

Supprimer le zonage des zones urbaines sensibles (ZUS) et mettre en œuvre à la place une politique de contrats passés entre le préfet et le maire. C'est ce que préconisent Pierre André, sénateur de l'Aisne et président de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), et le député d'Eure-et-Loir Gérard Hamel, membre de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (Onzus), dans un rapport remis le 23 septembre 2009 au Premier ministre. "L'actuelle géographie prioritaire a montré ses limites", explique ainsi le rapport, preuves à l'appui : la superposition des géographies et des dispositifs progressivement mis en place a nui à la lisibilité de la politique et a rendu difficile l'évaluation et le pilotage. La géographie d'identification des quartiers est souvent ressentie comme une injustice. Par ailleurs, ils estiment que l'intervention par zonage est "défavorable à l'indispensable partenariat local", les avantages associés aux zonages ZUS, ZRU (zone de redynamisation urbaine) et ZFU (zone franche urbaine) n'étant pas mis au service d'un projet de territoire. "Aujourd'hui, force est de constater que cette action par zonage n'a pas fait la preuve de son efficacité", signalent ainsi les deux parlementaires. Face à ce constat d'échec, le rapport propose de bâtir une "géographie rénovée de la politique de la ville", en sortant de la logique de zonage et, par conséquent, en supprimant les ZUS. "Le territoire d'éligibilité à la politique de la ville doit désormais être la commune", et non plus des quartiers, analyse le rapport. Premier avantage d'une telle stratégie : "La désignation de la commune place les élus en première ligne pour résoudre les difficultés de leurs quartiers difficiles." Les auteurs considèrent aussi que c'est le meilleur moyen pour que l'Etat concentre ses interventions sur les communes qui en ont le plus besoin : "Dans ce nouveau modèle, une commune pauvre avec un quartier en difficulté sera prioritaire par rapport à une commune plus riche avec un quartier rencontrant des difficultés comparables. En effet, une commune riche avec un quartier pauvre n'est pas dans la même situation qu'une commune pauvre avec un quartier pauvre." Les deux parlementaires précisent que cette politique impliquera "un niveau d'intervention qui devra être déterminé avec souplesse, au cas par cas, en fonction des besoins locaux liés aux territoires et aux personnes". Ainsi le cadre communal pourra laisser place, dans certains cas, à l'intercommunalité.

Quant aux critères de sélection des communes pouvant être retenues pour bénéficier de cette politique, le rapport avance le taux de chômage, la part des jeunes sans qualification professionnelle, la part de HLM, la part de bénéficiaires de minima sociaux et la part des bénéficiaires d'allocations logement. S'agissant de la dotation de solidarité urbaine, la DSU (enveloppe distribuée par l'Etat aux communes confrontées à une insuffisance de ressources et supportant des charges élevées), les travaux actuellement conduits sur les dotations de péréquation par le gouvernement, le Comité des finances locales et le Parlement, devront tirer à terme les conséquences de l’évolution de la géographie prioritaire.

 

Un contrat qui met les acteurs locaux au centre de la politique de la ville

Les parlementaires préconisent également de créer un contrat "unique et global, traduisant l'engagement des partenaires". Ce contrat, conclu pour une durée de six ans (équivalente à un mandat municipal) entre le préfet et le maire (qui seront les pivots du pilotage stratégique et opérationnel de la politique de la ville) devra se substituer progressivement à l'ensemble des outils au travers desquels la politique de la ville est organisée territorialement, à savoir l'accompagnement social des populations bénéficiant des actions de rénovation urbaine, les différents dispositifs attachés aux zonages réglementaires, les dispositifs mis en place pour certains publics ou territoires en difficulté notamment en matière d'éducation nationale, de santé, d'insertion ou d'emploi, et même les contrats urbains de cohésion sociale (Cucs). En effet, ces derniers devant s’arrêter fin 2010, ils se verront ainsi remplacés par ce contrat unique qui sera mis en place progressivement début 2011. Afin de parvenir à une meilleure appropriation de la réalité locale, les deux parlementaires insistent sur l'implication, "dès l'amont de la négociation, d'un large partenariat (Etat, commune et EPCI concerné, département, région, Pôle emploi, agence régionale de santé, bailleurs sociaux, CAF…)".

Le Premier ministre a indiqué avoir pris connaissance "avec intérêt" des recommandations présentées dans le rapport. Recommandations qui serviront de base "à une large concertation avec l'ensemble des parties concernées (collectivités territoriales, partenaires sociaux, associations)" dans la perspective d'une réforme l'an prochain, et qui seront certainement à l'ordre du jour de la réunion ministérielle sur la mise en oeuvre du plan "Espoir banlieues" qui se tiendra le 1er octobre.

Le rapport de cette mission doit être examiné par un prochain comité interministériel des villes (CIV), prévu également en octobre.

 

Emilie Zapalski et Sandrine Toussaint