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Lutte contre l'habitat indigne : le rapport Vuilletet propose de clarifier le dispositif

Le député Guillaume Vuilletet a remis au Premier ministre son rapport sur la simplification des mesures contre l'habitat indigne. Face à une superposition de dispositifs, le rapport propose de sortir de l'approche sectorielle, au profit d'une "approche globale de la santé et du bâtiment". Cela passe notamment par une simplification drastique des polices de l'habitat.

Guillaume Vuilletet, député (LREM) du Val-d'Oise, a remis à Édouard Philippe son rapport sur la lutte contre l'habitat indigne, en présence d'Agnès Buzyn et de Julien Denormandie. Ce document très fouillé doit éclairer les travaux interministériels en vue de la rédaction de l'ordonnance prévue par l'article 198 de la loi Elan du 23 novembre 2018 et qui doit simplifier drastiquement les procédures en la matière. Selon le communiqué publié par Matignon après la remise du rapport, cette ordonnance est attendue "avant la fin mai 2020" (ce qui correspond de toute façon au délai maximal de 18 mois laissé par l'article d'habilitation), en vue d'une application à compter du 1er janvier 2021.

Une cadre juridique devenu illisible

Au fil des nombreux textes législatifs et réglementaires consacrés à la lutte contre l'habitat indigne et les marchands de sommeil, le cadre juridique s'est complexifié au point de devenir illisible. En juin dernier, dans son rapport sur la proposition de loi "visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux", Dominique Estrosi-Sassone, sénatrice (LR) des Alpes-Maritimes et rapporteure du texte, rappelait ainsi que "la réglementation actuelle comprend pas moins de treize polices qui s'appliquent à des situations différentes et qui font intervenir des autorités et des procédures différentes. Cette multiplication des polices n'est pas un gage d'efficacité et peut aussi être source de contentieux" (voir notre article ci-dessous du 5 juin 2019).

Un constat partagé par Guillaume Vuilletet, qui pointe "un arsenal juridique protéiforme", dispersé dans quatre codes différents avec 21 procédures applicables et de nombreux textes réglementaires. Dans un domaine particulièrement complexe, le rapport fait d'ailleurs preuve d'un important effort de pédagogie et de présentation, rare dans ce type de document. Il retrace notamment en détail l'histoire de la lutte contre l'habitat insalubre depuis le 19e siècle et l'accumulation des dispositifs mis en place pour tenter d'y remédier.

La police de l'habitabilité confiée au maire ou au président de l'EPCI

Face à cette superposition de dispositifs, le rapport propose de sortir de l'approche sectorielle, au profit d'une "approche globale de la santé et du bâtiment". Cela passe notamment par une simplification drastique des polices de l'habitat, qui devraient être ramenées à trois ou quatre procédures : pour les locaux, logements ou terrains impropres à l'habitation, pour la réalisation des travaux "d'habitabilité et de sécurité", pour les situations d'urgence et – de façon optionnelle – pour les cas où le coût des travaux est supérieur à celui de la reconstruction.

Ces procédures seraient centralisées dans le code de la construction et de l'habitation et confiées à une autorité unique. L'autorité disposant de la compétence habitat – le maire ou le président de l'EPCI – se verrait ainsi confier la police de l'habitabilité, sous le contrôle du préfet, assorti d'un pouvoir de substitution. Guillaume Vuilletet préconise également de "réinventer les passerelles entre le monde. médicosocial et les collectivités territoriales, notamment en matière de protection infantile".

Côté victimes du mal-logement, le rapport recommande d'harmoniser le droit et la protection des occupants, mais aussi d'adapter les sanctions (avec en particulier l'instauration d'un régime d'amendes) et de "redéfinir une doctrine de substitution publique par l'exécution efficace des mesures ou l'appropriation".

Pour un "plan national de l'habitabilité"

Sur les outils, les progrès à réaliser passent notamment par une amélioration de la connaissance des situations (avec une centralisation des signalements et des procédures, qui préfigurerait un futur registre national du logement), par un accompagnement des propriétaires dans la réalisation des travaux, mais aussi, en cas d'incapacité ou de défaillance, par une meilleure organisation de la substitution publique. Sans oublier bien sûr une indispensable amélioration de l'offre d'hébergement provisoire et de relogement.

Enfin, en termes de gouvernance, Guillaume Vuilletet propose notamment de déployer des plans territoriaux et de renforcer l'appui aux collectivités. Il préconise ainsi de faire du PLH le document de programmation de l'action en faveur de l'habitabilité et de la prévention, mais aussi de "structurer l'expertise nationale et locale pour accompagner les collectivités". Ce dernier point passerait notamment par la création d'une cellule d'expertise interdisciplinaire nationale, dédiée à la requalification des îlots en centre ancien, et couvrant les compétences urbaines, patrimoniales et logement. Dans le même esprit, l'élaboration d'un "plan national de l'habitabilité" – doublée d'une coordination et d'une simplification des financements dédiés à l'amélioration ou à la requalification de l'habitat – permettrait de porter l'ambition nationale en matière de lutte contre l'habitat indigne.

 

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