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Les balbutiements de la gouvernance de la donnée territoriale

Le pendant de la transformation numérique des territoires est la création d’un tsunami de données que les collectivités peinent aujourd’hui à exploiter. Entre recherche de cas d’usage probants et adaptation de leur organisation aux enjeux de la donnée, un webinaire organisé le 27 janvier 2022 a permis de faire le point sur un sujet qui dépasse désormais le cercle des experts.

L’une des avancées de la crise sanitaire aura été de faire que la data ne soit plus un sujet d’expert. La pandémie a en effet montré concrètement l’intérêt d’utiliser des tableaux de bord pour gérer restrictions et campagnes de vaccination. Mais si la data ne fait plus peur aux élus et aux décideurs, le mode opératoire pour exploiter pleinement les gisements de données des collectivités reste encore largement à inventer. Y compris dans les territoires les plus en pointe comme l’a montré le webinaire coorganisé le 27 janvier 2022 par l’observatoire Data publica et la Banque des Territoires, avec la Gazette des communes.

Gouvernance interne et territoriale

Les collectivités doivent ainsi faire face à un tsunami de données, quelles soient produites par leurs services ou des acteurs de leur territoire. La priorité est donc à la mise en œuvre d’une organisation ad’hoc et plus généralement d’une gouvernance territoriale de la donnée. A Toulouse métropole, on réfléchit ainsi à la mise en place d’une "agence de la donnée" pour fédérer les compétences et mieux exploiter les données locales, sans avoir pour le moment trouvé le modèle. En Seine-Saint-Denis, la collectivité s’attèle pour sa part à la "cartographie des données" un inventaire qui se doit d’être tout à la fois "complet, documenté et accessible", explique Grégoire Gousseff, en charge de la mission pilotage de la donnée du département. La collectivité envisage aussi la création d’un "lac de données" répondant aux besoins des directions métier et alimentant une batterie de tableaux de bord à destination des décideurs. Dans le Grand Est, on se préoccupe surtout de la montée en compétence data des petites collectivités et on insiste sur la nécessité de mutualiser sur un sujet pour lequel il n’y a pas de chef de file. "Nous avons lancé l’initiative Data Grand Est l’automne dernier, nous proposons des ressources techniques pour aider au partage des données, un accompagnement des territoires et notre priorité est de créer de la valeur locale", explique Clément Cambon, Délégué à l’innovation à la région.

Partir de cas d’usage concrets

Il ne s’agit cependant pas de "faire de la data pour faire de la data". L’heure est plutôt aux "quicks wins" générant un bénéfice tangible. "Aujourd’hui ils concernent essentiellement la mobilité, l’énergie et la transition écologique", énumère Joël Combin de Datactivist. "A Toulouse, nous avons sélectionné le stationnement, les îlots de chaleur et la lutte contre le gaspillage alimentaire", illustre Sandrine Mathon, responsable des ressources à la direction du numérique de Toulouse métropole. Un algorithme nourri des données de fréquentation des cantines scolaires devrait ainsi bientôt aider la cuisine centrale à prévoir précisément le nombre de repas à préparer. Les données des 70 stations météo de la métropole ont par ailleurs permis de dresser une cartographie des îlots de chaleur par carré de 200 m. A Saint-Quentin en Yveline, la stratégie data va de pair avec son projet territoire intelligent. C’est ainsi que l’agglomération a cherché à mieux exploiter les données d’éclairage public pour optimiser ses dépenses d’énergie. Ces cas d’usage ont le mérite d’amener les collectivités à confronter la théorie à la pratique. A Toulouse, la collectivité s’est rendu compte qu’au-delà de l’insertion de clauses data dans les contrats de DSP, il s’agissait de faire dialoguer entre eux deux systèmes d’information, "ce qui doit être anticipé". A Saint-Quentin en Yvelines, l’exploitation des données d’éclairage public a pour sa part révélé la nécessité de mieux sécuriser les lampadaires, amenant la collectivité à ajouter un volet cybersécurité à sa stratégie smart city.

Les chantiers de l’observatoire Data publica

Soutenu par la Banque des Territoires et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), l’observatoire data publica est animé par quatre sociétés de conseil (Civiteo, datactivist, Innopublica, Parme Avocats). Cette structure entend développer la réflexion sur les usages de la donnée au service de l’intérêt général en s’appuyant sur des chercheurs et des retours d’expériences. Un premier travail est ainsi annoncé pour février 2022 sur la construction d’un cadre de confiance pour le partage des données. Un autre devrait suivre sur la transparence des algorithmes. Ces publications s’accompagneront de rencontres et webinaires.