Habitat - Les chambres de bonnes, un nouveau gisement pour créer des logements à Paris ?
L'Atelier parisien d'urbanisme (Apur) publie une étude originale sur les chambres de service à Paris, sous-titrée "Un potentiel pour développer l'offre de logement ?". Ces chambres - et leur corollaire "l'escalier de service" - sont un héritage du Paris bourgeois XIXe siècle, où tout immeuble - du moins dans les quartiers Ouest de la capitale - se devait de posséder des logements séparés pour les domestiques. La très grande majorité de ces "chambres de bonnes" sont d'ailleurs concentrées dans quatre arrondissements : le 16e (qui en regroupe 30% à lui seul), le 17e, le 7e et le 8e.
114.000 chambres de service à Paris, dont 85% inoccupées
L'étude de l'Apur apporte des informations surprenantes. Ainsi, les chambres de bonnes atteignent le total respectable de 114.400. Sans surprise, elles sont installées majoritairement dans les 5e et 6e étages des immeubles (respectivement 57% et 34%). Elles sont situées dans des immeubles de bonne facture puisque 81% d'entre elles sont installées dans des immeubles en pierre de taille d'époque haussmannienne.
Plus surprenant encore : 85% de ces chambres de bonnes sont inhabitées. Le nombre de chambres de services habitées ne cesse d'ailleurs de diminuer au fil des ans. Selon les données tirées du recensement de l'Insee, Paris comptait encore 66.000 chambres de ce type habitées en 1968, contre 17.300 en 2011.
Des logements inhabités et inhabitables ?
L'idée vient donc tout naturellement d'utiliser ces surfaces pour développer l'offre de logements qui fait cruellement défaut à Paris. Et c'est là que le problème se complique. En effet, la plupart de ces chambres ne sont pas habitables. Selon l'étude, "elles ne disposent pas de WC intérieurs et sont rarement équipées d'une douche. L'équipement le plus courant correspond à un simple évier, souvent sans l'eau chaude".
Autre complication : moins de la moitié de ces chambres disposent de la surface minimale (9 m2) permettant leur mise en location. Depuis le décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, plus de la moitié de ces chambres ne peuvent plus être proposées à la location, même si elles remplissent la condition de surface. Par ailleurs, 81% de ces chambres appartiennent à des personnes physiques et 17% à des personnes morales.
La ville de Paris prête à se lancer, mais à quel prix ?
Malgré ces difficultés, l'Apur estime que "le haut niveau d'inoccupation des chambres de service aujourd'hui conduit à s'interroger sur le réaménagement de ces lieux au profit d'un habitat rénové et de qualité. Les propriétaires et les copropriétés pourraient être encouragés à procéder à des regroupements", notamment sous la forme d'un regroupement de chambres contiguës pour créer un logement.
Ian Brossât, le très actif adjoint à la maire de Paris en charge du logement, s'est aussitôt saisi de l'étude de l'Apur. Sur le site de la ville, un article du 24 novembre indique ainsi que "la ville de Paris envisage différentes pistes pour réhabiliter ces logements, dont celle d'une acquisition par des bailleurs sociaux. La Société de requalification des quartiers anciens (Soreqa) et l'Apur seront mandatées pour la réalisation d'une étude d'ingénierie sur le sujet, qui sera remise au premier semestre 2016". L'utilisation du dispositif "Multiloc" - qui inciter les propriétaires à une remise de leurs biens sur le marché locatif - est également évoquée. Il reste toutefois à en savoir plus sur la faisabilité technique, et plus encore financière, de telles opérations, au regard de réalisations plus classiques.