Littoral - Les collectivités appelées à remettre à flot le sauvetage en mer
La députée socialiste du Finistère Chantal Guittet a remis le 6 juillet au secrétaire d'Etat chargé des transports et de la mer, Alain Vidalies, son rapport sur la pérennisation du modèle économique de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). De six mois de travaux et de rencontres avec des sauveteurs en mer et élus du littoral, la parlementaire tire un premier constat : l'organisation du sauvetage en France, fondé sur la gratuité, le bénévolat et "un principe de solidarité entre les gens de mer hérité des premières sociétés de sauvetage", est efficace - aucun système alternatif ne semble plus pertinent, ou moins coûteux. Elle est essentiellement assurée par une association à but non lucratif, la SNSM, forte de 8.000 bénévoles et constituée d'anciens marins ou de jeunes actifs moins issus que par le passé du monde professionnel maritime, mais aux compétences de plus en plus techniques.
Pas un service public à proprement parler
L'été, leur action prend de l'ampleur, très visible sur les plages (4.500 emplois saisonniers, présents en 2015 dans les 240 postes de secours de 130 communes). Les municipalités emploient alors ces sauveteurs pour sécuriser les activités de loisirs nautiques et donc assumer "une responsabilité qui incombe" aux collectivités. La SNSM assure ainsi la surveillance et la sécurité du tiers des postes de plage installés sur le littoral français. Au même titre qu'elle bénéficie aux usagers de la mer, aux assureurs (par un effet d'allégement des conséquences financières du risque maritime qu'ils assurent), l'action de la SNSM procure également aux collectivités, comme le pointe ce rapport, "un avantage d'image et un intérêt pour l'économie locale". Mais gare à la confusion souvent entretenue, ces sauveteurs ne relèvent pas d'un service public directement assumé mais en quelque sorte délégué : c'est bien la SNSM qui forme (500 nouveaux sauveteurs formés chaque année), entraîne, encadre ces sauveteurs bénévoles, saisonniers, brevetés et les équipe d'une flotte qui lui appartient constituée de 400 moyens nautiques (canots, jets-ski). Cela se retrouve aussi dans son financement : la SNSM dépend à 85% de donateurs et partenaires privés, et pour moins de 15% de fonds publics.
Des difficultés budgétaires
La SNSM rencontre d'importantes difficultés de financement. Cet équilibre financier précaire bloque toute vision d'avenir. D'où l'urgence et l'intérêt de ce rapport parlementaire qui indique que "ce risque budgétaire n'est pas compatible avec l'obligation d'assurer la continuité du service public de sauvetage en mer". Et qu'un certain nombre de stations sont placées "dans une grande difficulté de fonctionnement, en particulier dans les outre-mer où la situation est préoccupante comme l'ont souligné les élus rencontrés". Dans sa recherche d'un financement pérenne, la députée estime que l'Etat doit relever sa part à "un niveau acceptable qui serait de l'ordre du quart du budget d'exploitation de l'association, soit de l'ordre de 7,5 millions d'euros par an". Chantal Guittet suggère de nouvelles ressources fiscales générées par l'activité de plaisance pouvant être affectées au financement de la SNSM, notamment via les 600.000 contrats d'assurance navires signés avec les plaisanciers.
Une aide des collectivités jugée essentielle
Les collectivités directement concernées sont appelées à la rescousse pour rééquilibrer financièrement cette association qui rend service à tous. Elles interviennent déjà pour aider l'association à investir dans la construction et l'entretien de sa flotte. Sous forme de subventions donc : en 2014 cela représentait deux millions d'euros. La loi Notr d'août 2015 a modifié le code des transports et renforcé cette possibilité pour les collectivités de financer dans le cadre de leurs compétences portuaires ces organismes agréés pour le sauvetage en mer. Cet appui des collectivités peut aussi prendre d'autres formes. Le rapport cite l'exemple du département du Finistère qui, "le premier, a contractualisé son aide dans le cadre d'une convention pluriannuelle de partenariat sur la période 2015-2018, fondé sur la sécurité maritime comme vecteur d'attractivité de son territoire". Cette aide départementale en 2015 et 2016 a ainsi atteint plus de 460.000 euros. "Ce mode de partenariat contractualisé, particulièrement adapté au financement des investissements de la SNSM et aux aides des collectivités territoriales, doit être encouragé".
Une contribution sauvetage
La députée propose la mise en place d'"une contribution sauvetage sur les contrats d'amarrage à flot ou sur les places à sec". Si cela dépendait des délibérations des collectivités agissant en tant qu'autorités portuaires, ce serait "difficilement généralisable". L'élue bretonne propose donc de passer par une disposition réglementaire intégrant les obligations de service public présentes dans le cahier des charges type des ports de plaisance. Autre proposition appréciée des premiers élus rencontrés : s'appuyer pour défendre "le maintien des aides des collectivités territoriales à la SNSM par l'intermédiaire des associations des régions (ARF), des départements (ADF) et des élus du littoral (Anel)".
Réveiller les donations
Consolider le financement privé, en particulier par les donateurs individuels, est une autre piste défendue par la SNSM. Anomalie franco-française : les usagers de la plaisance et des loisirs nautiques contribuent peu au financement du sauvetage en mer qui sécurise pourtant leur activité. Sur 600.000 propriétaires de navires de plaisance immatriculés, seuls 50.000 seraient donateurs – au Royaume-Uni pour un système équivalent, ils sont des centaines de milliers. La députée recommande de s'appuyer sur les compagnies d'assurances et gestionnaires des ports pour inciter leurs contractants à adhérer à la société de sauvetage. L'ensemble de ses propositions ont été remises au secrétaire d'Etat Alain Vidalies qui a salué cette contribution et promis qu'un travail interministériel allait s'engager afin d'envisager les conditions de leur mise en œuvre pour préserver les sauveteurs en mer.