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Finances publiques - Les collectivités devront dépenser 11 milliards de moins, le "système social" aussi

Manuel Valls en a fait état ce 16 avril : les 50 milliards d'économies sur 2015-2017 devraient se répartir en 18 milliards pour l'Etat, 11 milliards pour les collectivités, 10 pour l'assurance maladie et 11 pour les dépenses de protection sociale...

De façon imprévue et plutôt inédite - une déclaration à la presse à l'issue du Conseil des ministres -, Manuel Valls a précisé ce mercredi 16 avril la façon dont il compte parvenir à 50 milliards d'économies dans la dépense publique entre 2015 et 2017. Dans sa déclaration de politique générale du 8 avril, il avait simplement indiqué que ces 50 milliards d'économies se répartiraient entre l'Etat et ses agences pour 19 milliards, les collectivités pour 10 milliards et l'assurance maladie pour 10 milliards, "le reste" - soit, tout de même, 11 milliards - devant venir "d'une plus grande justice, d'une mise en cohérence et d'une meilleure lisibilité de notre système de prestations".
Ce 16 avril, les grandes masses ont été un peu modifiées et, surtout, le contenu de ces 11 derniers milliards a été détaillé. Ceci après que le Premier ministre a insisté sur les "trois objectifs" de ces 50 milliards d'économies : pouvoir mettre en oeuvre le pacte de responsabilité et de solidarité (donc avant tout pouvoir "baisser le coût du travail"), "redonner du pouvoir d'achat aux salariés" et réduire le déficit public.
S'agissant du pouvoir d'achat, il a rappelé l'engagement d'une baisse des cotisations salariales au 1er janvier pour les plus petits salaires, mais a aussi indiqué que le gouvernement prendra "dès le mois de juin" une "mesure en faveur des contribuables les plus modestes", sans plus de précision. Cette mesure représentera un effort de l'Etat "aux alentours de 500 millions d'euros", a ensuite indiqué sur LCP le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, évoquant ces "compatriotes qui n'étaient pas imposés" et ont dû payer l'impôt sur le revenu l'an dernier en raison de "mécanismes pris" par le gouvernement Fillon.
Finalement, la part que prendra l'Etat à l'effort est aujourd'hui évaluée à 18 milliards. Qui dit Etat dit fonctionnaires… et traitements des fonctionnaires. Avec, sur ce point, la confirmation d'un revirement : il y aura bien gel du point d'indice, a fait savoir Manuel Valls, précisant tout de suite après qu'en revanche, "les règles d’avancement dans la fonction publique d’Etat seront préservées". Le sujet avait donné lieu, on se souvient, à quelques atermoiements avant les municipales, jusqu'à ce que l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault démente à la mi-février cette hypothèse, alors qualifiée de "fausse nouvelle", lançant qu'on n'était pas "dans le concours Lépine des économies".
Traitements… et effectifs. Là-dessus, le chef du gouvernement a annoncé le maintien des créations de postes prévues dans l’Education nationale de même que "dans la police et la justice". Mais en dehors de ces trois champs, on saura que les effectifs des ministères "continueront de diminuer". Des baisses d'effectifs qui "s’accompagneront de redéploiements afin de préserver nos services publics".
A cela s'ajouteront des économies sur les autres dépenses de fonctionnement des ministères (immobilier, achat) et une "rationalisation" des agences de l'Etat avec, là encore, une réduction des effectifs, sauf pour Pôle emploi et pour les universités, a-t-il été précisé.

Des propositions du rapport Malvy-Lambert traduites dans le PLF 2015 ?

"Les collectivités territoriales devront prendre leur part", a déclaré Manuel Valls. Une part qui sera en fait de 11 milliards d'euros. Mais s'agit-il d'une baisse de 11 milliards des ressources (voire des seules dotations) ou des dépenses ? L'allocution du Premier ministre tout comme le dossier présentant "le détail du plan" évoquent simplement "11 milliards d'économies" sur les collectivités "attendus au cours des trois prochaines années" pour contribuer à la réduction des dépenses publiques. Et Manuel Valls n'a pas prononcé le mot de dotations (pas plus qu'il ne l'avait utilisé dans sa déclaration de politique générale).
A en croire ses propos, il compterait avant tout sur ses réformes de structures ou de gouvernance pour "maîtriser les dépenses" : les nouvelles mutualisations entre communes et intercommunalités telles qu'encouragées par la première loi Lebranchu (Mapam ou Maptam), suppression de la clause de compétence générale des départements et des régions (qui, est-il précisé au passage, devrait être inscrite dans le prochain projet de loi), "rationalisation des syndicats intercommunaux" (n'est-ce pas ce qu'était déjà censé avoir fait la loi de 2010 ?), "meilleure sélection des projets financés"…
Manuel Valls a également mentionné le rapport Malvy-Lambert qui devait être remis quelques heures plus tard à François Hollande en sa présence, se disant "très sensible" aux "nombreuses propositions" des deux élus. D'ores et déjà, le dossier liste un point sans doute inspiré de ce rapport : il est annoncé que "la dotation globale de fonctionnement sera reformée dans le projet de loi de finances (PLF 2015), pour encourager les comportements vertueux et renforcer les mécanismes de solidarité financière entre collectivités riches et défavorisées". Le rapport Malvy-Lambert (sur lequel Localtis reviendra en détail dans sa prochaine édition) propose en effet qu'un "pacte triennal" soit instauré pour les grandes collectivités, pacte qui garantirait à chaque signataire une "dotation de base" à laquelle s'ajouterait entre autres "une majoration, liée au respect d'engagements contractuels". Le retour de l'idée de bonus-malus en somme.
Mais on lit aussi, dans un discret encadré du dossier… que "la baisse de 11 milliards d'euros de leurs ressources entre 2015 et 2017 devrait permettre de contenir la progression de leurs dépenses au rythme de l’inflation". Alors, dépenses ou ressources ? Et quelle part la baisse des dotations est-elle appelée à jouer dans tout cela ? Cela n'est pas encore tout à fait clair.
Du côté de l'assurance maladie, Manuel Valls a listé quelques leviers devant permettre 10 milliards d'euros d'économies, notamment en matière d'organisation des "parcours de soins". Mais les principales annonces concernent les 11 milliards d’euros d’économies attendus sur "la gestion du système social". Avec trois points importants auxquels les acteurs de l'action sociale locale ne manqueront pas d'être attentifs.
Il y a tout d'abord la non-revalorisation pendant un an des prestations sociales hors minima sociaux (RSA, ASS, AAH, minimum vieillesse), qui concernera les pensions du régime de retraite de base et les allocations liées au logement, à la famille et à l'invalidité.
Deuxièmement, le gouvernement a décidé que les revalorisations exceptionnelles décidées dans le cadre du plan Pauvreté de janvier 2013 pour le RSA, le complément familial et l’allocation de soutien familial "seront décalées d’une année". Enfin, on en saura sans doute bientôt plus sur ce qu'impliquera "la poursuite de la modernisation de la politique familiale" qui doit permettre 0,8 milliard d’euros d'économies et une meilleure "équité des aides aux familles".