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Habitat - Les jeunes, premières victimes de la crise du logement

Avoir 20 ans et se loger relève du parcours du combattant. L'Unhaj (Union nationale pour l'habitat des jeunes) a voulu attirer l'attention des pouvoirs publics sur cette réalité, jeudi 25 septembre, rappelant que plus de 11 millions de jeunes de 15 à 29 ans ont besoin de se loger sur un marché de plus en plus étriqué. Or, le phénomène ne touche pas uniquement les 2,2 millions d'étudiants. La moitié d'entre eux sont en effet des actifs : cinq millions occupent un emploi ou sont au chômage. Et avec un taux de chômage des jeunes qui flirte avec les 20% (soit plus de deux fois la moyenne nationale), la France fait partie des derniers de la classe européenne aux côtés de l'Italie, la Grèce, la Pologne et la Slovaquie. "Les 16-25 ans sont la génération qui a le plus de mal à se loger : on exige d'eux beaucoup de mobilité alors que les possibilités réelles de logement sont limitées et le logement social est essentiellement orienté vers les familles", a expliqué Patrick Quinqueton, le président de l'Unhaj. De fait, le secteur conventionné propose rarement des studios adaptés aux jeunes célibataires. A cela s'ajoute le prix exorbitant des loyers dans les grandes agglomérations où  les jeunes viennent trouver du travail. Conséquence : 55% des moins de 26 ans habitent chez leurs parents, selon les données de l'Insee. Le syndrome de Tanguy est devenu la règle mais davantage pour des raisons matérielles qu'affectives. Depuis des années, l'Unhaj et toutes les structures de logement des jeunes qu'elle regroupe tentent de remédier à cette carence par le biais des FJT (foyers jeunes travailleurs) qui proposent des logements temporaires, avec des services complémentaires et un accompagnement en cas de besoin. Les formalités sont réduites au minimum : il est possible de faire sa demande par email. Mais la demande est aujourd'hui très forte, ce qui a conduit l'Unhaj à lancer en 2006 un important programme de développement dont elle a présenté, jeudi, un bilan : 374 projets sont en cours de réalisation dans 290 villes pour un total de 11.600 logements déjà réalisés. 6.855 logements font l'objet d'une réhabilitation sur un parc de 42.000 logements. L'Unhaj bénéficie d'un accord d'ingénierie avec la Caisse des Dépôts. Seulement, elle se plaint aujourd'hui du désengagement de l'Etat. "Les financements de l'Etat deviennent une denrée rare, il n'est pas normal de faire financer les actions de développement par les résidents", a déclaré Patrick Quinqueton. Les collectivités ont en partie pris le relais mais les budgets restent difficiles à boucler. Le problème : aucune collectivité n'est clairement chargée de la politique du logement. "Depuis deux ans, on mène un travail régulier avec l'Association des régions de France. Le but est de développer une méthode à  même d'être dupliquée à travers les régions", explique Patrick Quinqueton, qui reconnaît que l'Assemblée des départements de France se montre "plus hésitante". Le risque est donc de reporter ce manque à gagner sur les loyers. Selon Claude Garcera, le directeur de l'association Jeunesse et habitat, de Tour, "si on n'a pas 50% de subventions, le projet a toutes les chances d'échouer dès les premières années car les loyers seront trop élevés".

 

Michel Tendil

 

Un exemple de réhabilitation réussie à Autun

Le foyer des jeunes travailleurs d'Autun (Bourgogne) connaissait de graves difficultés financières à la fin des années 1990. Cet ensemble avait été construit dans les années 1960 pour accueillir les salariés puis les stagiaires du groupe Dim. Mais dans les années 1970, il a été délaissé suite aux changements intervenus dans la stratégie de l'entreprise. Un moment reconverti en centre d'accueil pour les demandeurs d'asile, il a failli être démoli. La mobilisation de la direction, avec le soutien de l'Unhaj, a permis d'élaborer un vaste projet de refondation démontrant que les besoins ont changé mais qu'ils sont toujours là. "Autun est une ville touristique avec une forte pression immobiliaire découlant notamment de la présence de nombreux acheteurs et investisseurs anglais et hollandais. Les logements n'y sont pas adaptés à la situation des jeunes", explique Sylvie Gauthier, la directrice de l'association Saint Ex qui gère le nouveau foyer.
Trois ans auront été nécessaires avant les premiers coups de pioche. Les deux bâtiments historiques ont donné naissance à  un centre international de séjour pour accueillir élèves ou touristes et à un nouveau foyer de jeunes travailleurs de 58 logements. Coût du projet ? Quatre millions d'euros financés à 64% par les collectivités et les acteurs locaux (CAF, groupe Dim, etc.), sans participation de l'Etat. "Il a fallu convaincre les acteurs locaux de l'intérêt de ce projet, explique Sylvie Gauthier. On était une association en difficulté, on est l'illustration que ça marche."

M.T.