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Handicap - Les médecins protestent à leur tour contre l'obligation de mise en accessibilité

Les généralistes affirment qu'une "application rigoureuse" des textes sur l'accessibilité pourrait accélérer la désertification médicale.

Alors que vient de s'achever le délai légal de dépôt des agendas programmés d'accessibilité (Ad'AP) pour tous les établissements recevant du public (voir notre article ci-contre du 28 septembre 2015), un vent de fronde se lève parmi les syndicats de médecins, notamment généralistes. Le mouvement est porté par MG France, le principal syndicat des omnipraticiens, mais aussi par son ennemi juré, la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français).

Un cabinet accessible "est d'abord un cabinet médical qui n'est pas fermé"

Dans un communiqué du 23 septembre - titré "Un cabinet médical accessible, c'est d'abord un cabinet médical qui n'est pas fermé !" -, MG France rappelle que le cabinet du médecin se situe très souvent dans un local d'habitation. L'organisation estime donc que "le maintien d'une offre de soins de proximité sur tout le territoire réclame des mesures spécifiques pour la médecine générale".
Dans le dossier - au demeurant très complet - qu'il consacre à la mise en accessibilité et aux Ad'AP, MG France se fait plus précis, en affirmant qu'une "application rigoureuse" des textes sur l'accessibilité pourrait accélérer la désertification médicale. Par exemple, "un médecin de plus de 60 ans, confronté à des travaux lourds et coûteux pour maintenir un cabinet qui n'aura pas de valeur marchande à son départ à la retraite aura intérêt à anticiper sa cessation d'activité". Le syndicat se fait notamment l'écho des remontées des certains généralistes affolés par des coûts de travaux pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers d'euros (notamment lorsqu'ils concernent les ascenseurs).
La question concerne essentiellement les médecins installés en ville, souvent dans des immeubles à étages. A l'inverse, les cabinets en zone rurale ou peu dense sont généralement installés de plain-pied dans des maisons - le plus souvent le logement du médecin -, ce qui simplifie les questions d'accessibilité même si des travaux conséquents peuvent être nécessaires (rampe d'accès, largeur des couloirs et des portes...).

Une attitude "cynique et scandaleuse", mais de la souplesse dans l'ancien

En ville, où l'offre de médecins est généralement abondante (au moins pour les généralistes), les demandes de MG France renvoient à un vieux débat sur la définition de l'accessibilité, qui s'est déjà posé pour d'autres secteurs (logement, hébergements touristiques...) : l'accessibilité s'entend-t-elle comme la possibilité, pour une personne handicapée, d'accéder à l'ensemble des cabinets médicaux comme une personne valide ou se comprend-t-elle comme la garantie de pouvoir accéder au service correspondant (la consultation médicale) avec un choix suffisant ?
Avec la notion d'accessibilité universelle, la loi Handicap du 11 février 2005 a clairement tranché en faveur de la première solution, même si certains aménagements ont été actés au fil du temps et des décrets d'application. Mais cela n'a pas pour autant mis un terme au débat, comme le montre ce nouvel exemple avec les médecins.
Interrogée par Le Monde sur la position de MG France, l'APF (Association des paralysés de France) juge que "l'attitude des médecins est cynique, scandaleuse". Mais l'association se montre plus souple sur les modalités en rappelant qu'"il n'est pas question qu'un commerce ou qu'un service ferme en raison des normes handicapés, car si nous sommes intraitables pour les bâtiments neufs, beaucoup de dérogations sont prévues pour l'existant". En attendant, dans un communiqué du 3 septembre, la CSMF "s'insurge contre le manque d'aides données par l'Etat pour ce problème d'accessibilité" et "demande du temps et des moyens".

 

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