Commerces - Les villages de marques : un fort potentiel de développement en France
"Les villages de marques font figure de petit poucet dans le paysage commercial français", indique Neinver, qui a publié un Livre blanc sur le sujet, son coeur de métier, le 25 mai 2016. Ces magasins, appelés "centres de marques", "magasins d'usine" ou "outlets" sont des ensembles commerciaux dont les magasins proposent des stocks, retours et invendus provenant des collections des saisons passées, vendus à prix réduits. Il n'y a pas de montant de réduction minimum fixé par la loi, mais "les opérateurs d'outlets proposent en général un minimum de 30% par rapport au prix de vente appliqué dans les circuits traditionnels lors des saisons antérieures", détaille l'étude. Ils se sont développés au milieu du XXe siècle, d'abord aux Etats-Unis, puis rapidement en Europe dans les années 1980, et enfin en Asie. D'après l'étude, il y en aurait 415 dans le monde, dont 201 aux Etats-Unis, 137 en Europe, et 40 en Asie. La France est relativement encore peu fournie. Elle dispose de 26 centres et 400.000 m2 de villages de marques, à Troyes, Serris, Roubaix, Romans, Cholet, Bordeaux, Mérignac ou encore Toulouse... Ce qui correspond à 4,1 m2 de surface pour 1.000 habitants contre 13,9 pour le Royaume-Uni et 20,8 pour les Etats-Unis. "La France figure ainsi parmi les pays qui présentent encore un potentiel de développement", assure ainsi Neinver. Et d'après les projections du groupe, les enjeux sont de taille. D'ici 2017, les villages de marques pourraient représenter 1,1 milliard d'euros dans les circuits de déstockage dans la mode, juste après les sites de ventes privées (1,8 milliard) et avant les enseignes de déstockage (900 millions). D'après le livre blanc, un potentiel de développement de six nouveaux villages de marques en France est réaliste. Des projets sont en cours à Honfleur, Miramas ou Villefontaine. Mais ils ne font pas toujours l'unanimité. Loin s'en faut. Ainsi à Villefontaine, les chambres de commerce y étaient opposées, utilisant, sans succès, les procédures disponibles. A Douains, de nombreux élus se sont opposés au projet de construction du village de marques de McArthurGlen, craignant de graves conséquences pour Rouen et pour les commerces de centre-ville. Le projet a finalement été validé…
Pas de concurrence pour les centres-ville ?
Pourtant d'après Neinver, ces magasins de marques ne feraient pas concurrence aux commerces de centre-ville. Ils pourraient même les aider ! Une étude menée dès 1999 par la chambre de commerce et d'industrie de Troyes, montre ainsi qu'après la création de deux centres, Marques Avenue et McArthurGlen, le chiffre d'affaires réalisé par les boutiques de prêt-à-porter en centre-ville s'est révélé supérieur à celui réalisé dans les deux villes de comparaison (Poitiers et Saint-Nazaire). L'impact a donc été positif. Les commerçants de centre-ville ont ainsi pu profiter du flux de visiteurs généré par le village de marques…
En tant que promoteur et commercialisateur de magasins de ce type, Neinver défend les atouts du concept, pour les enseignes, puisque leurs invendus représentent entre 30 et 50% des volumes de certaines marques et sont en constante augmentation, mais aussi pour les territoires. "Dans un contexte de développement du e-commerce, les territoires ont intérêt à préserver un commerce physique, susceptible de créer des emplois locaux", insiste le livre blanc. Le centre Roppenheim The Style Outlets (Bas-Rhin) a ainsi créé environ 570 emplois directs et pérennes dans les boutiques, restaurants et services du village, auxquels s'ajoutent 200 emplois pendant la durée du chantier, et une centaine chez les prestataires du centre. Des emplois indirects (hôtellerie, restauration, transport) ont également été créés dans la zone.
Mais pour assurer un développement pérenne de ces centres, il y a certains impératifs à respecter. "Les opérateurs qui les portent doivent être en capacité de gérer une centaine de boutiques indépendantes et d'attirer les consommateurs sans avoir de locomotive alimentaire". Il faut donc que ces centres s'implantent dans des zones d'habitation denses et qu'il y ait une forte capacité de déstockage de la part des marques. Un ratio de dix boutiques traditionnelles existantes pour une en village de marques est un minimum. "Pourtant, la tentation est grande devant le succès rencontré par les centres de marques, de ne pas respecter ces impératifs, alerte toutefois Neinver, et les élus locaux, parfois, se laissent séduire", la perspective de la création d'emplois l'emportant sur tout autre argument...