L'espace public Numerica, 23e et dernier-né dans le maillage numérique de l'agglomération du Pays de Montbéliard

En 2001, les élus du pays de Montbéliard se sont fixé comme objectif la diversification économique, en développant le secteur tertiaire des nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC). C'est l'origine du vaste projet Numerica porté par les élus d'une agglomération qui rassemble vingt-neuf communes et 120.000 habitants. En parallèle, tout un maillage d'espaces publics numérique (EPN) s'est mis en place à l'attention du grand public, installés dans des espaces préexistants (maisons des jeunes et de la culture, maisons pour tous, centres culturels, écoles) aidés dans leur fonctionnement à trois niveaux : complément des parcs machine, prise en charge de la connexion internet, intervention d'une équipe d'animateurs multimédia très compétents. Ces espaces sont équitablement répartis sur le territoire, zones urbaines à forte densité et zones rurales.
Le plus récent, l'espace public Numerica, propose six postes en accès payant permettant de se connecter à internet, d'utiliser des logiciels de bureautique ou encore d'envoyer et recevoir des fax, trois bornes d'accès à l'e-administration permettant, gratuitement et en toute confidentialité, de consulter les sites de l'administration et d'effectuer ses démarches en ligne (déclarer ses impôts, dialoguer avec les Assedic...). A l'étage, une salle de formation dotée de huit postes (plus un pour l'animateur) propose des ateliers de formation adaptées à un public particulier ( personnes travaillant en horaires postés ou personnes ayant une déficience visuelle...), ou des ateliers thématiques spécialisées (composition musicale, utilisation d'un blog citoyen...). Tous ces équipements et services sont accessibles aux personnes handicapées. Leur particularité : ils sont tous équipés en logiciels libres, Linux pour le système d'exploitation et Open Office pour la bureautique. L'espace est ouvert du lundi au samedi.

Animer les espaces et partager les compétences

En 2002, une étude lancée par l'agglomération a permis d'identifier les forces et les faiblesses des espaces numériques publics existant sur le territoire, gérés par différents types de structures, municipales et associatives, explique Anne-Sophie Berthet, actuelle coordinatrice du programme EPN de Montbéliard. Quinze espaces avec les mêmes caractéristiques ont été recensés auxquels l'agglomération a apporté quatre formes de services :
- la prise en charge de la connexion haut-débit ;
- le complément du parc de matériel (fourniture d'ordinateurs en location) avec une maintenance technique assurée pour palier le problème d'obsolescence et d'entretien ;
- la mise à disposition d'une équipe d'animateurs, sous contrats emploi jeunes (quinze heures par semaine). Ce sont des animateurs multimédia, de formation bac+2 poursuivant leurs formations souvent vers un master Produits et services multimédia ;
- la mutualisation des ressources permettant à un espace confronté à un problème technique, de le soumettre aux autres pour trouver une solution. L'objectif est non seulement d'animer les espaces mais de partager les compétences et échanger les savoirs.

En 2007, le nombre d'espaces et l'équipe se sont étoffés avec neuf animateurs en alternance entre leur formation à l'université multimédia de Montbéliard et un temps partiel de 13 heures par semaine, 9 heures d'animation et 4 heures de préparation.

L'université de Montbéliard, partenaire de l'agglomération

C'est une grande chance pour l'agglomération de disposer sur le territoire de différentes formations au multimédia (DUT SRC et IUP du pôle universitaire de Montbéliard qui délivre une licence et un master Produits et services multimédia). Si les débouchés sont multiples, le temps du cursus autorise les jobs étudiants avec des compétences pointues dans tous les domaines du multimédia. L'université est le partenaire le plus important avec qui de gros projets de contenu de stages se développent, ainsi que des systèmes de sauvegarde. Par exemple dans le cadre l'ouverture de l'espace public Numerica et de l'accès aux services publics en ligne, avec l'aide de stagiaires de l'université, un système a été mis au point qui permet aux usagers de stocker toutes les données échangées sur internet sur une clef USB sans que la mémoire de l'ordinateur utilisé ne garde les informations. Il est donc possible de faire sa télédéclaration de revenus sur un ordinateur de l'espace public.
L'enjeu actuel reste de consolider l'équipe car les aides de la région, de l'Europe et de l'Etat pour les contrats jeunes arrivent à échéance. 56% du budget de fonctionnement couvre les frais de personnel. En 2007, les frais de fonctionnement s'élèvent à 360.000 euros et les frais d'investissement à 30.000 euros. Financièrement, les élus de l'agglomération souhaitent continuer, sachant qu'ils vont devoir intégrer le coût engendré par les animations si les différents cofinanceurs se retirent. Il existe une politique tarifaire symbolique dans l'utilisation des EPN. Chaque espace est libre d'offrir ou non le service et ce choix laissé à la discrétion des directions des structures (2 euros l'atelier au maximum).

2.500 personnes ont suivi un stage de formation en 2006

Les résultats sont excellents. En 2006, 2.500 personnes ont été formées soit un total de 25.000 heures d'auditeur de formation dans l'année, sans compter tous les utilisateurs autonomes qui fréquentent les espaces. Les gens restent très longtemps dans un processus d'inititiation, passant d'un atelier à l'autre. Une enquête de satisfaction est réalisée à l'issue de chaque atelier. "Le meilleur indicateur, précise Anne-Sophie Berthet, est que les gens, une fois arrivé au terme d'une formation, souhaitent démarrer un nouvel atelier. Ils ne veulent plus partir." Les personnes qui suivent les formations sont majoritairement adultes. 60% ont plus de 45 ans et on compte de très nombreux retraités. Les 40% restant sont répartis entre moins de 25 ans et 25 à 45 ans. Les plus jeunes utilisent essentiellement les EPN en accès libre. De nouvelles formations, telles que "musique assistée par ordinateur" sont proposées actuellement pour les attirer.

Mutualisation des moyens et des ressources

La difficulté principale reste l'incertitude des financements. La pérennité du système n'est jamais assurée et la collectivité doit prendre seule le risque de continuer l'aventure. Un projet de réseau national des EPN est en cours, car chaque territoire reste trop isolé dans ses pratiques bien que les EPN soient bien référencés sur les moteurs de recherche. Localement, avec la mise en place du réseau, la mutualisation des moyens et des ressources est très importante. Elle est génératrice d'économies pour les communes mais nécessite l'embauche de personnel au niveau intercommunal. Cela fait peur, mais il faut savoir que dans cette activité, la présence de personnel compétent est incontournable. Il ne suffit pas d'avoir les machines, il faut prévoir la maintenance du parc, l'animation des espaces, il faut les faire vivre et aider ainsi la population à s'approprier les usages quotidiens des nouvelles technologies.

Nathalie Froissart pour la rubrique Expériences des sites Mairie-conseils et Localtis