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L’inclusion numérique en manque de bras et d’animation

Un webinaire organisé le 21 janvier 2021 s’est interrogé sur les priorités des territoires investis dans l’inclusion numérique. Si l’offre existante peut mieux faire, il va falloir mobiliser beaucoup plus largement pour répondre à des besoins d’accompagnement gigantesques. Tout l’enjeu sera de coordonner des initiatives encore trop dispersées.

Lors du webinaire organisé par WeTechCare le 21 janvier, SFR et l’Assemblée des départements de France (ADF), quatre priorités, chiffres à l’appui, ont été débattues pour faire avancer le dossier de l’inclusion numérique. Car si les fractures ont été démultipliées par la crise sanitaire, force est de constater que les politiques publiques sont à la peine, même si beaucoup d’espoir est mis dans les 250 millions d'euros du plan de relance (notre article du 17 novembre 2020). Premier constat, le maillage territorial reste très insuffisant. Selon les calculs de WeTechCare, il y aurait à peine trois structures d’accompagnement pour 10.000 habitants. Si l’on prend pour base 20% de la population française touchée par l’illectronisme - un chiffre souvent avancé mais a priori sous-estimé - cela signifie que chacune d’entre elle devrait accueillir au moins 600 personnes par an… À l’évidence le compte n’y est pas, d’autant plus que cette moyenne cache de véritables déserts de l’inclusion numérique. 

Pas assez de formation à l’autonomie

Paradoxalement les structures existantes ne font pas salle comble. Pour preuve, 74% d’entre elles estiment qu’elles pourraient accompagner "plus" dont 20% à moyens constants… En cause un problème de visibilité et de ciblage. 87% des acteurs interrogés estiment ainsi ne pas bien connaitre ce que font leurs collègues… Un constat qui a conduit les Pyrénées-Atlantiques à répertorier l’ensemble des structures présentes sur son territoire. "Même si c’est un peu laborieux, cette cartographie de l’existant évite de perdre du temps dans la phase action", fait valoir Amalia Martinez, en charge du développement des usages numériques au sein la Fibre 64. Car la cartographie trouve une double utilité : identifier les manques mais aussi mieux faire connaitre la diversité des accompagnements (aide, formation, équipement…). Cet accompagnement doit par ailleurs monter en gamme car il y a trop de personnes qui "font à la place de" et pas assez qui forment à l’autonomie numérique. Les médiateurs numériques se révèlent en effet minoritaires (16%) par rapport aux intervenants sociaux (un quart des accompagnants) et aux agents d’accueil des guichets (un tiers). 

L’appel aux bénévoles

Le poids des intervenants sociaux - en première ligne face à dématérialisation - conduit Claude Riboulet, à la tête du département de l’Allier et président de la commission innovation et numérique de l'ADF, à voir le département comme un "échelon des solidarités, un fédérateur des structures d’inclusion numérique". Fédérer mais pas diriger et encore moins financer. "Il faut faire communauté contre l’inclusion", insiste le représentant de l’ADF, construire "un réseau à l’image d’internet, où l’essentiel est que tout soit connecté". L’élu souhaite aussi que les entreprises "assument leur part", tout comme la jeunesse. "Chaque jeune suivant une formation pourrait donner de son temps pour aider ceux qui ont des difficultés. Après tout si l’on regarde les chiffres il y a à peu près autant de jeunes formés que de personnes à former", avance Claude Riboulet. Le bénévolat, à l’image d’Emmaüs Connect, certaines collectivités veulent y croire et Orléans métropole vient par exemple de lancer un appel à candidature.

En tout cas, l’initiative doit venir des territoires, du terrain, car "la politique de l’offre" - comprendre les chèques Aptic – "ça ne marche pas. Il faut aller vers les gens", insiste Isabelle Dechaume vice-présidente du conseil départemental de Saône-et-Loire. Il faut "mobiliser toutes les structures de proximité qui existent. L’essentiel est d’en avoir la volonté", abonde Jean Deydier, fondateur de WeTechCare. Et de souligner que le numérique peut lui-même beaucoup aider à outiller et coordonner les bonnes volontés. Des outils dont peuvent s’emparer tous les guichets de proximité… sous réserve que ces administrations réalisent leur propre transformation numérique. Car là aussi il y a du travail.