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Habitat - Loi Outre-mer : le logement social reste la priorité mais des aménagements sont possibles

Confronté aux réactions des socioprofessionnels, le secrétaire d'Etat chargé de l'Outre-mer a entrepris une tournée dans les départements et territoires concernés. Celle-ci doit notamment lui permettre d'évoquer avec l'ensemble des acteurs le volet consacré au logement social du projet de loi pour le développement économique et la promotion de l'excellence Outre-mer. La conjonction des annonces de Bercy sur la remise en cause des avantages fiscaux spécifiques aux DOM-TOM et l'intention affichée du projet de loi de réorienter les aides à l'investissement dans le logement vers l'habitat social ont en effet suscité de vives réactions chez les socioprofessionnels. Ceux-ci craignent effectivement de perdre le marché fructueux des investissements locatifs défiscalisés sur le marché du logement libre pour des programmations HLM beaucoup plus lentes et aléatoires. Certaines déclarations sur le manque de "maires constructeurs" et "la nécessaire mobilisation des collectivités locales, tout particulièrement en faveur du foncier" ont également été mal reçues. Même l'annonce d'une enveloppe de 350 millions d'euros pour financer ce dernier n'a pas suffi à calmer les esprits. Les chiffres attestent pourtant le retard de l'Outre-mer en matière de logement social. Le 29 mai, le Sénat a ainsi publié le rapport d'information de sa commission des finances intitulé "Des ambitions aux réalisations : retour sur deux ans de politique du logement en Outre-mer". Tout en reconnaissant certains progrès - notamment sur la gestion de la ligne budgétaire unique -, ledit rapport souligne les "dysfonctionnements persistants" et les "effets pervers importants" du système actuel de défiscalisation en matière de logement. Il pointe aussi les difficultés de mobilisation du foncier.
A l'occasion de ses déplacements, Yves Jégo est donc resté ferme sur la priorité donnée au logement social dans le projet de loi-programme. Le 24 mai, en Martinique, il a ainsi indiqué, après avoir rencontré les maires de l'Ile, que "l'Etat a une volonté, une priorité, c'est répondre à l'angoisse de milliers de Martiniquais qui n'ont pas de logement. Il y a 10.000 personnes qui attendent un logement social en Martinique, sans parler des autres types de logement". A cette occasion, il a rappelé la nécessité de "mobiliser les maires parce que ce sont eux les premiers acteurs de la construction". Pour cela, l'Etat est prêt à "mettre à leur disposition tout le foncier" dont il est propriétaire, ce qui permettrait de "construire 1.500 logements sociaux en quelques mois". Yves Jégo a également indiqué avoir "fixé comme objectif au préfet de faciliter le montage de tous les dossiers".
Cette réaffirmation de la priorité donnée au logement social n'empêche pas une certaine marge de négociation pour désamorcer les réactions des élus locaux et des professionnels. Lors de sa visite en Nouvelle-Calédonie, le 29 mai, le secrétaire d'Etat chargé de l'Outre-mer a ainsi indiqué que les restrictions budgétaires ne se feraient pas "sur le dos des Outre-mers". Il a affirmé qu'"il n'y a aucune remise en cause des dispositifs de défiscalisation outre-mer, mais le gouvernement veut les moraliser pour faire en sorte qu'il n'y ait pas une poignée de gros contribuables qui se les approprient". En pratique, plusieurs options sont envisageables pour la version finale du projet de loi-programme qui doit être présentée à un prochain Conseil des ministres. La défiscalisation de l'investissement locatif dans le logement libre pourrait ainsi bénéficier d'une période de sursis, le temps que la réorientation vers le logement social produise son plein effet. Autre hypothèse : le maintien de tout ou partie de la défiscalisation de l'investissement dans le logement libre, mais assorti de conditions limitant les effets d'aubaine pour les gros contribuables.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Projet de loi pour le développement économique et la promotion de l'excellence Outre-mer.