Commande publique - Lutte contre le travail au noir : une pénalité peut être infligée au cocontractant
La loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a renforcé le dispositif de lutte contre le travail dissimulé. Bercy vient de consacrer une fiche technique aux nouvelles règles en la matière. Très détaillé, ce document devrait aider les collectivités à mieux appréhender les nouveaux mécanismes de lutte contre "le travail au noir".
Une vigilance à tous les stades du contrat
Les personnes morales de droit public doivent s'assurer à tous les stades du contrat que leur cocontractant n'emploie pas de personnes rémunérées au noir.
Elles sont ainsi tenues, avant la signature du contrat, de "procéder aux vérifications prévues à l'article L.8222-1 du Code du travail". Cet article dispose qu'à compter du seuil de 3.000 euros HT, le donneur d'ordre doit exiger les pièces prouvant que le futur attributaire s'acquitte des formalités mentionnées aux articles L.8221-3 et L.8221-5 du Code du travail (délivrance d'un bulletin de paie, etc.) et qu'il "est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des organismes de recouvrement", notamment l'Urssaf.
En cours d'exécution du contrat, la personne publique doit également s'appuyer sur deux "dispositifs" permettant de s'assurer que l'attributaire n'emploie pas de personnes non déclarées. Il existe tout d'abord "un dispositif de vigilance" qui consiste à demander à l'entreprise de remettre, tous les 6 mois et jusqu'à la fin de l'exécution du contrat, les mêmes pièces que celles exigées lors de la signature du contrat. La collectivité peut ensuite s'appuyer sur "un dispositif d'alerte". En effet, lorsqu'un agent de contrôle informe une personne publique que "son cocontractant ne respecte pas ses obligations au regard de la règlementation sur le travail dissimulé", celle-ci doit lui enjoindre de régulariser sa situation. Si le titulaire du marché ne régularise pas sa situation, la personne publique pourra le sanctionner.
Une sanction contractuelle plus efficace
Jusqu'à présent, lorsque l'opérateur économique n'était pas en mesure de régulariser sa situation, la personne publique ne pouvait que résilier le contrat, sans indemnités, aux frais et risques de l'entrepreneur. Une telle sanction n'était pas toujours dans l'intérêt de la personne publique qui risquait d'être autant pénalisée que l'entreprise sanctionnée. En effet, en cas de résiliation du contrat, la personne publique est contrainte de mettre en œuvre une nouvelle procédure d'attribution du marché, retardant ainsi l'avancement du projet.
La nouvelle rédaction de l'article L.8221-6 du Code du travail prévoit désormais une sanction alternative, qui se veut plus efficace : la personne publique peut toujours résilier le contrat mais elle peut également décider d'infliger à son cocontractant une sanction financière.
En effet, tout contrat écrit conclu par une personne morale de droit public doit dorénavant comporter "une clause stipulant que des pénalités peuvent être infligées au cocontractant s'il ne s'acquitte pas des formalités mentionnées aux articles L.8221-3 à L.8221-5" du Code du travail. Le montant de ces pénalités "est, au plus, égal à 10 % du montant du contrat et ne peut excéder celui des amendes encourues en application des articles L.8224-1, L.8224-2 et L.8224-5" de ce même code.
Comme toute sanction administrative, ces pénalités ne peuvent être infligées qu'après une mise en demeure du cocontractant et la décision la prévoyant doit être motivée.
L'Apasp
Références : fiche technique consacrée au "renforcement du dispositif de lutte contre le travail dissimulé"; Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.
Une personne publique peut-elle être déclarée solidairement responsable ?
Si le manquement du cocontractant est avéré, la personne morale de droit public peut être solidairement responsable des sommes dues en application de l'article L.8222-2 du Code du travail :
- lorsqu'elle n'a pas vérifié la situation de ce dernier avant la signature du contrat et en cours d'exécution de celui-ci,
- lorsqu'elle ne l'a pas mis en demeure de régulariser sa situation,
- lorsqu'elle n'a pas transmis, à l'agent auteur du signalement, la réponse de son cocontractant à cette mise en demeure,
- lorsqu'elle n'a pas informé l'agent, auteur du signalement, de l'absence de régularisation par le titulaire du marché.