Archives

Transports / Environnement - Lutte contre les nuisances aéroportuaires : l'autorité de contrôle formule de nouvelles recommandations

Dans son rapport annuel paru le 30 mai, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) propose une nouvelle série de mesures pour limiter les impacts nocifs des aéroports. Composé de huit experts nommés par le gouvernement et deux membres désignés par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat cet organisme, créé en 1999, a un pouvoir de recommandation et d'alerte pour tous les aéroports français et des missions particulières pour les onze principaux. Il peut aussi prononcer des amendes administratives allant jusqu'à 40.000 euros.
Sur 335 dossiers instruits en 2015, 236 ont fait l'objet d'une amende, pour un montant de 3,35 millions d'euros. Le montant moyen des amendes s'est établi à environ 14.000 euros et 113 compagnies ont été poursuivies. Depuis sa création, l'Acnusa a prononcé quelque 6.600 amendes représentant 40 millions d'euros.
Dans son rapport 2015, elle reproche une nouvelle fois aux professionnels de l'aéronautique et à la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) de privilégier le développement économique des plateformes au détriment des coûts sanitaires et sociaux des nuisances pour les riverains. Elle formule une vingtaine de recommandations au total dont un petit nombre figuraient déjà dans ses précédents rapports.
Pour remédier au problème des vols de nuit, elle propose d'interdire aux "avions les plus 'nuisants'" d'atterrir et de décoller entre minuit et 5h30 sur les onze plus gros aéroports. Selon elle, seuls les appareils présentant une marge acoustique d'au moins 13 EPNdB (Effective perceived noise decibel)* par rapport à la limite admissible devraient être autorisés. Ce principe a déjà été adopté à Nice-Côte d'Azur et à Toulouse-Blagnac "sans que cela pose de difficultés particulières", souligne l'Autorité qui recommande aussi l'instauration d'"une nuit hebdomadaire sans vols" de 23h à 6h00, du vendredi au samedi ou du samedi au dimanche, "sur l'ensemble des plateformes où ce sera possible". Une mesure à laquelle la DGAC et les gestionnaires d'aéroports "ont systématiquement opposé un refus catégorique" au nom de ses conséquences économiques, indique l'Acnusa, jugeant cette position "assez regrettable".
Concernant les mesures de prévention et de réparation, elle propose la création d'un "fonds de compensation des nuisances" alimenté par les aéroports. Elle juge en effet "équitable et judicieux" que les aéroports qui tirent "directement profit de l'activité à l'origine des nuisances" contribuent à la réparation du préjudice causé. Un tel fonds, destiné à financer des projets d'amélioration de la qualité de vie des riverains, existe déjà en Ile-de-France où il permet d'aider les communes situées autour de Paris/Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly. L'Acnusa propose de l'expérimenter dans l'un des neuf autres principaux aéroports du pays en vue d'une extension.
Pour réduire la pollution atmosphérique, l'organisme demande "la mise en place effective pour 2016 d'un système incitatif à l'utilisation des moteurs les moins émetteurs en NOx" (oxydes d'azote). Il souhaite aussi une loi obligeant les notaires, agents immobiliers et propriétaires à "informer précisément par écrit" les acquéreurs ou locataires d'un bien de sa localisation et du niveau de bruit, "avant tout engagement signé". L'Acnusa demande également au gouvernement de déposer "rapidement" un projet de loi imposant aux aéroports sur lesquels il y a une moyenne d'au moins 20 mouvements par nuit (entre 22h et 6h) d'acheter les immeubles d'habitation situés en zone I du plan de gêne sonore (PGS - bruit fort ≥ 70 dB Lden) "au prix équivalent de celui qui serait le leur s’ils étaient situés dans une zone voisine non soumise aux nuisances aéroportuaires". Enfin, elle réitère sa proposition de porter à 100% du montant plafonné le taux d'aide à l'insonorisation des logements des riverains tout en limitant à 5 ans le délai pendant lequel une demande pourra être déposée.


Anne Lenormand


* unité exprimant le niveau effectif de bruit perçu