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Simplification - Lutte contre l'inflation des normes : pour le Conseil national d'évaluation, des progrès restent à faire

Les nouvelles normes créées en 2014 coûteront 1,4 milliard d'euros par an aux collectivités, selon le Conseil national d'évaluation des normes qui vient de rendre public son rapport d'activité.

Pour les collectivités territoriales, "'le choc de simplification' tarde à trouver sa traduction", estime le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) en conclusion de son dernier rapport public d'activité, qui fait le bilan de l'année 2014.
Les chiffres confirment l'observation faite par l'instance présidée par l'ancien ministre du Budget, Alain Lambert. La commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) et le CNEN qui lui a succédé le 3 juillet 2014 ont examiné, l'année dernière, 303 projets de texte. En comparaison, en 2013, la CCEN avait été saisie pour 219 textes. Quant au coût des nouvelles normes s'appliquant aux collectivités territoriales, il demeure élevé. Pour 2013, la CCEN l'évaluait à 1,85 milliard d'euros en année pleine, en notant que des économies et des recettes "potentielles" pouvaient exister pour des montants respectifs de 181 millions et 469 millions d'euros. En 2014, le coût des nouvelles normes baisse à 1,4 milliard d'euros en année pleine, avec par ailleurs des économies chiffrées à 633 millions d'euros et des recettes potentielles d'un montant de 204 millions d'euros. En tête des projets de normes les plus coûteux pour les collectivités figurent pour l'année dernière les dispositions sur l'accessibilité des personnes handicapées ou dont la mobilité est réduite (466 millions d'euros). Viennent, ensuite, la revalorisation du montant forfaitaire du revenu de solidarité active (420 millions d'euros) et les mesures relatives à l'accessibilité des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public (245 millions d'euros).
Le gouvernement et les administrations de l'Etat ont donc rapidement des progrès à faire pour parvenir dès la fin de cette année à ce que le coût net des nouvelles normes pour les collectivités territoriales soit nul, comme le Premier ministre s'y est engagé à l'automne dernier (voir notre article du 9 octobre 2014).

Des avis rendus trop souvent en urgence

En matière de dialogue avec les élus locaux membres du CNEN, ils ont aussi à progresser. En 2014, le Premier ministre a décrété l'urgence pour plus d'un projet de norme sur cinq, alors que cette procédure devrait revêtir un caractère exceptionnel. En 2013, l'urgence avait concerné 18% des textes examinés par la CCEN, contre 9% en 2012.
Or, la décision n'est pas du tout neutre, puisqu'elle a pour effet de réduire les délais d'examen dont dispose le CNEN de six semaines à 15 jours, voire 72 heures en cas d'"extrême urgence". Faute dans ces délais de pouvoir disposer d'éléments techniques suffisants, l'instance est contrainte de délivrer "un avis de pure forme". En outre, lorsque l'"extrême urgence" a été décrétée, le gouvernement n'est plus tenu de transmettre au CNEN un projet modifié ou des informations complémentaires si l'instance a rendu un avis défavorable. L'obligation d'une seconde délibération, qui s'impose habituellement si l'instance émet un avis défavorable, est donc tout simplement rendue caduque.
Le CNEN en conclut que les services de l'Etat ne se sont pas encore approprié l'obligation de relancer la concertation avec les représentants des élus locaux lorsque ceux-ci ont rendu une première délibération défavorable. "Il faudra sans doute du temps et de la détermination pour que cette innovation majeure produise les résultats attendus", fait-il remarquer.

Evaluation des normes en vigueur

Face à une utilisation, excessive selon eux, de la procédure d'urgence, les membres du CNEN ont réagi : sur les 27 avis défavorables qu'ils ont rendus, 16 sont motivés par cette raison. Dans 14 cas, les élus ont voulu aussi dénoncer "un défaut de concertation" et dans 10 cas, ils ont souhaité pointer "les coûts importants mis à la charge des collectivités".
L'examen par le CNEN des normes en vigueur concernant les collectivités territoriales, nouvelle mission qui lui est confiée, dépendra lui aussi du soutien que le gouvernement voudra lui apporter. "L'identification des normes à simplifier ou à abroger relève d'un travail d'orfèvre", révèle en effet le CNEN. Qui indique qu'il faudra donc attendre le prochain rapport public pour prendre connaissance d'une première évaluation des normes en vigueur.