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PLPFP - Maîtrise des dépenses locales : l'Assemblée nationale valide les ultimes arbitrages de l'exécutif

Au lendemain de la réunion de la Conférence nationale des territoires, le gouvernement a déposé deux amendements au projet de loi de programmation des finances publiques. Ceux-ci exposent toutes les modalités de fonctionnement des contrats désormais envisagées par le gouvernement pour maîtriser les dépenses des collectivités. L'Assemblée nationale a examiné ces amendements la nuit du 15 au 16 décembre.

Pour passer de la parole aux actes, il a suffi de quelques heures au gouvernement. A Cahors, le Premier ministre livrait, jeudi 14 décembre en fin d'après-midi, ses derniers arbitrages sur les rouages de la mécanique contractuelle que les préfets proposeront à la signature des 340 collectivités territoriales dont les dépenses de fonctionnement dépassent 60 millions d'euros. Le lendemain, le gouvernement déposait à l'Assemblée nationale deux amendements (voir ci-dessous) au projet de loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022 confirmant les décisions de l'exécutif et apportant de nouvelles précisions très attendues par les élus locaux. L'Assemblée les a adoptés après les avoir retouchés assez légèrement, dans la nuit du vendredi 15 au samedi 16 décembre, dans le cadre de la nouvelle lecture du projet de loi. On rappellera en effet que lors de leur réunion en commission mixte paritaire, le mercredi 13 décembre, les députés et les sénateurs n'avaient pas réussi à se mettre d'accord sur une version commune du texte.
Les amendements du gouvernement, dont les associations d'élus locaux ont eu connaissance avant même qu'ils ne soient mis en ligne le 15 décembre sur le site de l'Assemblée nationale, procèdent en premier lieu à une réorganisation du projet de loi. Si les "dispositions programmatiques" du dispositif de contractualisation demeurent à l'article 10 du texte, les détails sur le mécanisme figurent quant à eux à l'article 24.

Modulation selon trois critères

Cet article prévoit désormais que les communes et intercommunalités à fiscalité propre avec lesquelles les préfets négocieront un contrat de trois ans sont celles dont "les dépenses réelles de fonctionnement constatées dans le compte de gestion du budget principal au titre de l’année 2016 sont supérieures à 60 millions d’euros". Les budgets annexes - dont les dépenses de fonctionnement, en 2016, ont représenté 5% des dépenses de fonctionnement des budgets principaux des communes, mais 41% de celles des budgets principaux des EPCI à fiscalité propre - ne seront donc pas pris en compte pour déterminer les communes et les groupements vers lesquels les préfets se tourneront pour engager le dialogue sur la limitation des dépenses.
Autre précision apportée par le gouvernement : le taux de croissance annuel des dépenses de fonctionnement que la collectivité ou l'intercommunalité sera "modulé" à la baisse ou à la hausse en fonction de trois critères : l'évolution de la population ou la tendance en matière de construction de logements ; le revenu moyen par habitant ; enfin, l'évolution réelle des dépenses de fonctionnement sur la période 2014-2016. La prise en compte de l'un de ces critères génèrera, selon qu'il s'agit d'un bonus ou d'un malus, une modulation de 0,15 point au maximum en plus ou en moins. Les marges de souplesse ne pourront donc excéder un total de 0,45 point en dessous ou au-dessus du taux d'évolution standard des dépenses réelles de fonctionnement prévu pour la catégorie de collectivités territoriales à laquelle la structure appartient.
Une collectivité qui, ayant signé un contrat, ne respectera pas l'objectif qui lui sera fixé, se verra appliquer une "reprise financière" égale à 75% du dépassement. Une collectivité à qui le préfet proposera de signer un contrat (c'est-à-dire l'une des 340 collectivités dont les dépenses réelles de fonctionnement sont supérieures à 60 millions d'euros) et qui finalement rejettera cette option, se verra appliquer des conditions plus sévères. Pour elle, la reprise financière s'élèvera à 100% du dépassement constaté par rapport au taux d'évolution plafond des dépenses réelles de fonctionnement de sa catégorie. Qu'elle ait ou non signé un contrat, la grande collectivité qui ne sera pas dans les clous ne pourra pas subir un prélèvement supérieur à 2% de ses recettes réelles de fonctionnement, un taux que les députés ont jugé plus adapté que les 3% initialement fixés par le gouvernement. Ils ont rappelé que la ponction sur la dotation forfaitaire des communes s'est élevée en 2017 à 0,94% des recettes réelles de fonctionnement.

Départements : des spécificités budgétaires partiellement prises en compte

Confirmant les assouplissements voulus par l'exécutif sur l'encadrement de l'endettement des collectivités locales, l'article 24 indique que "la trajectoire d’amélioration de la capacité de désendettement" des collectivités dont la capacité de désendettement est "supérieure au plafond national de référence" est "non contraignante".
L'amendement du gouvernement apporte aussi des précisions sur la détermination de l'effort qui sera demandé aux départements et à la métropole de Lyon. Les dépenses correspondant aux allocations individuelles de solidarité ne seront que partiellement exclues des dépenses réelles de fonctionnement prises en compte par les contrats que les préfets négocieront avec eux. Seule sera déduite "la part liée à la hausse des dépenses exposées au titre du revenu de solidarité active, de l’allocation personnalisée d’autonomie et de la prestation de compensation du handicap […] supérieure à 2%." Sur ce point, le groupe de gauche de l’Assemblée des départements de France (ADF) a réagi ce 18 décembre, considérant que le dispositif retenu revient à "confondre les dépenses de fonctionnement émanant des choix budgétaires des conseils départementaux avec celles qui relèvent de la solidarité nationale et qu’ils sont contraints de réaliser à la place de l’Etat". "Malgré la déduction de la part liée à ces dépenses supérieures à 2%, le principe de cette confusion est inacceptable", juge le groupe.
Le Sénat examinera à son tour en nouvelle lecture, mardi 19 décembre, le projet de loi de programmation des finances publiques. Mais c'est l'Assemblée nationale qui aura le dernier mot, lors d'une lecture définitive, jeudi 21 décembre.