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Congrès de l'AMF - Manuel Valls au diapason sur les rythmes, à contretemps sur les dotations

S'exprimant en clôture du 97e congrès des maires, le Premier ministre a annoncé la pérennisation du fonds d'amorçage pour la réforme des rythmes scolaires. Il est en revanche resté inflexible sur la baisse des dotations. Certes, quelques ressources nouvelles sont envisagées : hausse de la dotation d'équipement des territoires ruraux, coup de pouce aux "maires bâtisseurs"... Et le Comité interministériel à l'égalité des territoires de janvier pourrait proposer des mesures en faveur des petites communes. Sur la réforme territoriale, rien de nouveau. Y compris s'agissant du seuil de 20.000 habitants pour l'intercommunalité.

"Finances, réforme territoriale, rythmes scolaires... Que va pouvoir annoncer le gouvernement aux maires ?", s'interrogeait Localtis en prélude au 97e congrès des maires qui devait démarrer le lendemain à la porte de Versailles. Trois jours plus tard, ce 27 novembre, la réponse pourrait être… Pas grand-chose de neuf. Si, une chose précise tout de même : la pérennisation du fonds d'amorçage pour la réforme des rythmes scolaires, que Manuel Valls a du coup proposé de rebaptiser "fonds de soutien aux communes". Pérennisation, et non simple reconduction. La chose est donc actée.
Il est vrai que cette question était l'un des trois gros sujets d'actualité de ce congrès des maires. Le débat organisé la veille autour de Najat Vallaud-Belkacem en avait largement témoigné (voir notre article consacré à cette plénière). Et dans son long discours d'accueil du Premier ministre, le tout nouveau président de l'Association des maires de France (AMF), François Baroin, avait été clair : sur les rythmes, "nous avons une seule revendication – nous ne voulons plus entendre parler de fonds d'amorçage, nous voulons un fonds pérenne".
En marge de cette annonce que l'on avait pu pressentir, Manuel Valls a proposé aux maires d'"établir ensemble une évaluation globale de cette réforme, en juin". François Baroin venait d'indiquer que les maires "feront remonter au printemps des évaluations" venant du terrain. Les choses semblent donc assez raccord.

"L'effort" demandé sera maintenu

Mais au-delà du chapitre éducation, peu des demandes formulées par l'AMF, que ce soit par la voix de François Baroin ou par celle de son premier vice-président, André Laignel - lequel avait été désigné porte-parole de la résolution générale adoptée à l'unanimité du bureau –, auront trouvé une réponse complète dans l'allocution du locataire de Matignon.
Sur le volet finances, notamment, le chef du gouvernement n'a pas bougé concernant la baisse des dotations. "Je sais l'effort qui est demandé aux communes, je sais qu'il y a des discours qui blessent (…), je sais que les maires seront amenés à faire des choix", "je mesure les difficultés à investir pour les petites communes", a-t-il dit aux maires, soulignant que "50 milliards d'économies en trois ans, c'est un effort pour toute la nation".
"La marche que vous proposez est trop haute, elle est inatteignable", avait auparavant averti François Baroin, soulignant que "c'est bien le bloc local qui sera le plus touché" puisque les communes et EPCI représenteront "plus de 60% de l'effort" demandé aux collectivités. Et celui qui fut un temps ministre des Finances d'exhorter le gouvernement à "réduire le montant de la baisse" et à "l'étaler dans le temps". "Acceptez de négocier avec l'AMF. Vous l'avez bien fait avec les départements…"
Mais l'absence de réponse du Premier ministre sur ce point signifie bien que la baisse de 11 milliards des dotations sur 2015-2017 est maintenue telle quelle. Aussi bien sur le volume que sur le rythme.

Fonds de soutien à l'investissement : nouvelles discussions en vue

Une petite ouverture a toutefois été esquissée au sujet du projet de fonds de soutien à l'investissement local. Manuel Valls a rappelé les faits : les députés ont proposé la création de ce fonds dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 ; le choix fait pour l'alimenter, à savoir le recyclage des 423 millions d'euros des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), "a suscité un débat", un débat jugé "légitime" du fait de la vocation des FDPTP en faveur des communes ; le Sénat a donc décidé de supprimer cette disposition du PLF. Le chef du gouvernement "souhaite que les FDPTP soient maintenus" et que l'on "continue à discuter" de la configuration du futur fonds de soutien à l'investissement local.
Deux ressources nouvelles ont en outre été annoncées pour certaines collectivités. D'une part, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), qui permet aux maires de "financer des services de proximité, tels que des maisons de santé par exemple", sera augmentée "d'un tiers", soit 200 millions d'euros en plus.
D'autre part, Manuel Valls a fini par préciser la nature du coup de pouce aux "maires bâtisseurs" dont il avait évoqué l'idée fin août en présentant son plan de relance pour le logement : ces "maires bâtisseurs" bénéficieront d'un fonds d'aide de 100 millions d'euros, "là où les besoins sont les plus importants" – autrement dit dans "les zones tendues", a-t-on ensuite précisé à Matignon –, afin "d'accorder aux communes une aide de 2.000 euros pour chaque logement permettant l'accueil de populations nouvelles".

Réduire les écarts de DGF

Pour le reste, le Premier ministre a listé devant les maires divers leviers financiers déjà existants ou déjà connus. A commencer par celui des normes et le "mouvement de simplification" mené avec André Vallini, avec "l'engagement que dès 2015, la charge nette liée aux normes pour les collectivités devra être de zéro" (le secrétaire d'Etat chargé de la Réforme territoriale avait de son côté indiqué quelques heures plus tôt que chaque "chaque ministère" fournira, "d'ici Noël", "trois normes à alléger ou supprimer").
La "nouvelle génération" des contrats de plan Etat-régions a aussi été évoquée, notamment pour son "volet territorial" qui représentera "presque 1 milliard d'euros".
Les maires ont été invités à se saisir de "tous les leviers de financement" existants, qu'il s'agisse de l'enveloppe de 20 milliards d'euros de prêts de la Caisse des Dépôts ou de la création de l'Agence France Locale.
Enfin, Manuel Valls a redit ce qu'il avait indiqué aux sénateurs fin octobre, à savoir qu'il prévoit bien de mener "une réforme de la dotation globale de fonctionnement" dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 afin de remédier à "l'écart trop important" de DGF qui défavorise les communes rurales.
Ce chantier de la DGF des communes rurales devrait figurer parmi les points à l'ordre du jour du Comité interministériel à l'égalité des territoires qui se tiendra en janvier prochain en point d'orgue aux Assises des ruralités organisées. D'autres "axes" ont de même été cités en vue de ce comité. Parmi eux, l'élaboration d'une "nouvelle politique partenariale plus ambitieuse" permettant, au-delà de la cinquantaine de projets retenus à titre expérimental (dont la liste avait été dévoilée la veille), de "restructurer le réseau des petites villes, des centres-bourg". Mais aussi, pêle-mêle, la "problématique de l'artificialisation des sols", celle du haut débit et des zones blanches de téléphonie mobile (pour exiger des opérateurs "que tout le territoire soit couvert"), les domaines de l'éducation ou de la culture…

Le discours du 28 octobre reste d'actualité

S'agissant enfin de la réforme territoriale, François Baroin, comme André Laignel, avait largement rappelé les multiples points de friction : l'absence de loi-cadre, le risque de "tutelle" induit par les futurs schémas régionaux, la question de l'intérêt communautaire, le refus de toute élection au suffrage universel direct sans fléchage pour les conseillers communautaires… et, bien sûr, le refus d'un "seuil uniforme et rigide de 20.000 habitants" pour l'intercommunalité, un sujet largement débattu lors de la plénière de la veille (voir notre article ci-contre).
Mais sur toutes ces questions institutionnelles, Manuel Valls n'a guère apporté d'élément nouveau. Il faut dire qu'il s'est déjà largement exprimé là-dessus. Ceux qui l'avaient entendu le 28 octobre au Sénat et lors des divers congrès d'élus locaux qui se sont succédé cet automne auront donc reconnu les mêmes éléments de langage.
Il a ainsi redit qu'il compte sur "un dialogue constructif entre le Sénat, l'Assemblée nationale et le gouvernement" pour parvenir à "s'accorder" sur le projet de loi Nouvelle Organisation territoriale de la République (Notr) dont l'examen en séance au Sénat doit débuter le 16 décembre. Il est aussi revenu sur le rôle qu'il entend finalement donner au département et aux élus départementaux, dont certaines compétences pourront être "confortées", par exemple en matière d'ingénierie et de services publics.
Concernant "le couple commune-EPCI" et, plus précisément, le fameux seuil de 20.000 habitants, on aura entendu un copié-collé quasi-parfait du discours du 28 octobre : sur certains territoires, des "aménagements" seront bien nécessaires, en fonction du nombre de communes, de la densité démographique, de la géographie et donc des distances à parcourir. Manuel Valls prévoit donc de "donner aux commissions départementales de coopération intercommunale et aux préfets ce pouvoir de dérogation, de souplesse". Une question, a-t-il dit, de "réalisme". La veille, Marylise Lebranchu avait pour sa part été un tout petit peu plus loin. Elle avait préféré parler d'"adaptation" que de dérogation et avait indiqué que les 20.000 habitants n'étaient qu'un "objectif". Les élus, eux, avaient continué d'expliquer qu'un tel seuil n'avait tout simplement "pas de sens".

 

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