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Enseignement supérieur - Plan Campus : le rapport Peylet discret sur les collectivités

Roland Peylet a remis, lundi 29 octobre, son rapport de mission d'évaluation des projets de partenariats public-privé (PPP) universitaires du Plan Campus à Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. "Cinq ans après son annonce, plus de quatre ans après la désignation des treize sites du plan Campus, aucune pierre n'a été posée, aucun permis de construire déposé et une seule convention de PPP a été signée", déplore Geneviève Fioraso, rappelant que François Hollande, lorsqu'il était candidat à la présidence de la République, avait déjà identifié deux blocages au Plan Campus : la complexité des procédures PPP ("dispositif imposé de façon systématique par le précédent gouvernement") et "la mise à l'écart des collectivités territoriales des instances de gouvernance et de décision des plans Campus, alors même qu'elles cofinancent à plus de un milliard d'euros les opérations prévues".

Une folle envie

Si le premier motif est largement analysé dans le rapport, le second est abordé de manière anecdotique, sans qu'une position claire ne soit présentée. Sur quatorze recommandations, une seule concerne les collectivités. Il s'agit de "hiérarchiser les projets selon les besoins ; il appartient à l'Etat, en concertation avec les universités et les collectivités territoriales, de déterminer, site par site, les besoins prioritaires". Un petit pas pour renverser le constat actuel d'"association insuffisante des collectivités territoriales aux processus décisionnels et à la gouvernance", relevée par la ministre (et non par le rapport Peylet). L'ancienne élue de Grenoble considère en effet comme "une erreur d'évaluation" de l'équipe précédente "de ne pas avoir intégré les collectivités dans les procédures juridiques et de gouvernance", eu égard d'une part à leur compétence en matière d'aménagement et d'autre part à leur contribution financière évaluée à "un milliard d'euros, le plus souvent en cash [sic]". "On ne sentait pas une folle envie de les intégrer", a lâché Geneviève Fioraso en fin de conférence de presse, assurant que "la volonté du gouvernement a changé".

Les quatre majors du BTP favorisées

Un des reproches du rapport Peylet au Plan Campus repose sur l'obligation de recourir systématiquement au PPP alors que la plupart des contextes ne s'y prêtait pas (une de ses recommandations est précisément de poser les procédures classiques comme la règle et le contrat de partenariat comme l'exception). C'est aussi un reproche exprimé par les collectivités, par ailleurs volontaires sur la politique de développement universitaire. "Plusieurs conseils régionaux ont décliné toute participation au financement d'un PPP, tout en acceptant de financer des opérations conjointes ou complémentaires en maîtrise d'ouvrage publique", note le rapport Peylet. Une question avant tout de compétence, puisqu'ils ont fait valoir auprès de la mission qu'ils finançaient "en priorité des investissements nouveaux et n'entendaient pas contribuer financièrement à l'exploitation des locaux". Geneviève Fioraso note également que "les régions ne voulaient pas s'engager dans les PPP, procédures étanches et ne favorisant pas les économies locales", dans la mesure où seuls les quatre majors du BTP ont les moyens financiers et d'ingénierie pour se positionner sur de telles opérations.
Pour autant, la ministre se défend de tout dogmatisme : elle n'est pas a priori contre les contrats de PPP, a fortiori lorsqu'ils sont sur le point d'être signés. Dans ce cas, "rien n'empêche de créer un comité de pilotage partenarial qui intègre les collectivités", souligne-t-elle.

Une société "privée public-public" pour conclure des partenariats public-privé

La ministre semble mettre beaucoup d'espoir dans l'expérimentation menée à Bordeaux, avec la création d'une "société de réalisation". "Cette modalité n'est pas forcément, dans sa première mouture, reproductible ailleurs", émet avec prudence le rapport Peylet. C'est justement pour sécuriser juridiquement le dispositif que Geneviève Fioraso a annoncé qu'un travail était engagé entre son ministère, la Caisse des Dépôts, Bercy, les collectivités locales et les établissements universitaires et scientifiques. Ce serait "l'équivalent d'une Sem", selon la ministre, mais une Sem qui ne pourrait emprunter qu'à la Caisse des Dépôts, précise-t-elle.
Le conseil régional d'Aquitaine a ainsi créé une société de réalisation de droit privé, dont les actionnaires (Pres, conseil régional, Caisse des dépôts) sont toutes des personnes publiques, et qui pourra conclure des contrats de type PPP. "Il s'agit d'un montage de type public-public préalable à la conclusion d'un partenariat public-privé", résume le rapport Peylet, qui souligne que d'autres collectivités sont tentées par la formule car elle permet "de réaliser simultanément plusieurs opérations plutôt que séquentiellement et de s'assurer sur le long terme du financement de l'entretien et de la maintenance des bâtiments ainsi construits". Le projet du campus de Bordeaux sera signé le 12 novembre prochain. "Lyon est également intéressé mais le projet est moins mature", signale Geneviève Fioraso.