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Lutte contre l'exclusion - Plan Pauvreté : un discours de la méthode, en attendant les mesures...

A l'occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre, Emmanuel Macron a lancé le chantier de la future "stratégie de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes". A ce stade, il ne s'agit pas encore d'annoncer des mesures, mais de lancer une "concertation" en vue d'élaborer la stratégie. Le tout dans la perspective d'une présentation d'un plan d'action - et sans doute d'un chiffrage - en mars ou avril 2018. Outre qu'elle répond à la question de la prolongation du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, adopté en 2013, la démarche permet aussi de renforcer le volet social de l'action du président et du gouvernement. Le lancement de cette démarche a d'ailleurs été marqué symboliquement par un déplacement et un déjeuner du chef de l'Etat avec des acteurs associatifs de la lutte contre la pauvreté, à Gennevilliers (Hauts-de-Seine).

Une approche "rénovée et territorialisée"

L'élaboration de cette stratégie figure dans la "feuille de route" adressée par Edouard Philippe à Agnès Buzyn au début de l'été et rendue publique il y a quelques semaines (voir notre article ci-dessous du 27 septembre 2017). Il y est notamment demandé à la ministre des Solidarités et de la Santé de concevoir cette stratégie dans une approche "rénovée et plus territorialisée". A noter : la lettre de mission ne semblait pas cibler spécifiquement la pauvreté des enfants et des jeunes, mais viser un public plus large. Le lancement de l'élaboration de cette stratégie s'inscrit également dans le droit fil de la réunion d'Edouard Philippe à Matignon, le 21 septembre, avec les représentants des grandes associations engagées dans la lutte contre la pauvreté (voir notre article ci-dessous du même jour).
Si le plan d'action reste à venir, les grands thèmes qui devraient y être abordés sont désormais connus. Il s'agit en l'occurrence de la prévention de la pauvreté (les situations susceptibles de faire basculer dans la pauvreté), du repérage et des actions d'accompagnement des personnes en difficulté, de la lutte contre la grande pauvreté (notamment pour les familles monoparentales, qui concentrent environ le tiers des situations de pauvreté) et du renforcement de la gouvernance, afin de garantir l'efficacité du plan d'action. Sur ce dernier point, la commande faite à Agnès Buzyn d'une approche "plus territorialisée" devrait notamment se traduire par une plus grande prise en compte des initiatives de terrain, dont celles initiées par les collectivités territoriales.

Eviter la "reproduction sociale" de la pauvreté

Parmi les autres axes envisagés, la future stratégie devrait intégrer une forte dimension sur l'accès aux droits. De même, Agnès Buzyn a annoncé, sans véritable surprise, que le gouvernement devrait prolonger la plupart des mesures figurant par le plan Pauvreté du précédent gouvernement, à commencer par la garantie jeunes, qui s'adresse précisément aux jeunes de 16 à 25 ans en difficulté d'insertion professionnelle.
En attendant de connaître les mesures de la future stratégie gouvernementale, il semble entendu que celle-ci ne passera pas par une revalorisation du RSA, contrairement à la hausse de 10% hors inflation mise en œuvre sous le quinquennat de François Hollande. Emmanuel Macron entend en effet éviter la "reproduction sociale" des inégalités et, par conséquent, cibler en priorité les enfants et les jeunes. Une position qui n'a toutefois pas empêché des revalorisations programmées en faveur de personnes dépourvues de possibilités de retour à l'emploi (en l'occurrence, la revalorisation annoncée de 100 euros par mois pour l'AAH et le "minimum vieillesse").
Dernier point : il faudra également préciser comment cette "stratégie de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes" va s'articuler avec la "stratégie nationale interministérielle de protection de l'enfance", confiée également à Agnès Buzyn dans sa lettre de mission (voir notre article ci-dessous du 27 septembre 2017). Cet autre plan - qui prolonge la tendance à la reprise nationale en main de la protection de l'enfance - couvrira lui aussi la période 2018-2022 et devra améliorer le parcours des enfants et des jeunes adultes issus de l'ASE. Si les deux sujets ne se recouvrent pas totalement, ils n'en présentent pas moins cretaines synergies.