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Culture - Rapport Lescure : "L'offre numérique en bibliothèque n'est pas à la hauteur"

Le rapport de Pierre Lescure sur "L'acte 2 de l'exception culturelle : contributions aux politiques culturelles à l'ère numérique" ne se penche pas seulement sur le sort de l'Hadopi ou sur l'hypothèse d'une taxation des smartphones. De façon moins médiatique, il s'intéresse aussi à la question de la numérisation des bibliothèques publiques (fiche A13 du rapport, pages 185 à 193). Avec un constat sans appel : "L'offre numérique en bibliothèque, aujourd'hui très peu développée, n'est pas à la hauteur des missions de ces institutions et des attentes du public."

La France à la traîne

Selon le rapport, 1% seulement des bibliothèques françaises (et 4% des bibliothèques de niveau 1) disposent aujourd'hui d'un fonds de livres numériques. Or un rapport de l'Idate (Institut de l'audiovisuel et des télécommunications en Europe) indique que la part des grandes bibliothèques proposant une forme de prêt numérique s'élève, en 2012, à 100% des grandes bibliothèques suédoises, environ 75% des grandes bibliothèques nord-américaines, environ 71% des grandes bibliothèques de Grande-Bretagne et environ 16% des grandes bibliothèques allemandes.
La mission explique cette défaillance française par le fait que "le 'prêt numérique' se heurte à l'absence de cadre juridique adapté : la licence légale instaurée par la loi du 18 juin 2003 ne s'applique qu'au prêt de livres imprimés et aucun accord global n'a été conclu avec les représentants des auteurs et des éditeurs". Une autre raison réside dans la crainte des ayants droit et des distributeurs physiques face au brouillage que l'offre numérique induit entre le circuit commercial et le prêt en bibliothèque. La numérisation remet en effet en cause deux principes de base du prêt physique : la logique d'exclusivité et non simultanéité du prêt.
Faute d'offre et face à l'hétérogénéité des modèles économiques et des dispositifs techniques utilisés, "les bibliothèques peinent à proposer à leurs usagers une offre numérique large, variée et cohérente", ce qui place la France dans une situation de "retard manifeste sur les pays comparables".

Trois mesures pour sortir de l'impasse

Pour sortir de cette impasse, le rapport Lescure propose trois mesures. La première - et la plus importante - consiste à sécuriser le cadre juridique de l'offre numérique en bibliothèque. Pour cela, il préconise d'"inciter les éditeurs à mettre en place, sur une base volontaire, une gestion collective des usages numériques en bibliothèques". Réaliste, la mission suggère, à défaut d'un tel accord, d'ouvrir une réflexion à l'échelle communautaire, en vue d'une éventuelle révision des directives européennes concernées (2001/29 et 2006/115).
La seconde mesure consiste à encourager le développement d'offres reposant sur un contrôle d'accès à l'abonnement et sur des DRM de type “tatouage numérique”. Dans le même temps, il conviendrait de modifier la loi sur le prix unique du livre numérique pour "obliger les éditeurs à proposer une offre claire, transparente et non discriminatoire spécifique en direction des bibliothèques".
Enfin, le rapport préconise d'inscrire dans les dispositifs d'aide publique (Centre national du livre, aides aux librairies...) une incitation au développement de l'offre numérique en bibliothèque. Les aides du CNL à la numérisation pourraient ainsi être conditionnées à la mise à disposition des livres numérisés en bibliothèques. Pour leur part, les librairies bénéficiaires d'aides publiques seraient incitées à conclure des partenariats avec les collectivités territoriales, en vue de développer l'offre numérique en bibliothèque.
 

 

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