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Alzheimer - Rapport Ménard : un plan ambitieux, mais des financements qui restent à définir

Le rapport Ménard relatif à la maladie d'Alzheimer remis ce 8 novembre au chef de l'Etat prévoit notamment la création de "maisons d'Alzheimer" placées sous l'égide des départements et un plan individualisé de soins et de services calqué sur ceux accompagnant l'APA ou la PCH.


La commission présidée par le professeur Joël Ménard, ancien directeur général de la Santé, a remis le 8 novembre au chef de l'Etat ses propositions relatives au plan Alzheimer 2008-2012. Le plan envisagé - qui devrait être très largement repris par le gouvernement - comporte 10 objectifs, 28 recommandations et 48 mesures. Nicolas Sarkozy en avait déjà dévoilé les grandes orientations le 21 septembre dernier, à l'occasion de la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer.
Les propositions de la commission Ménard et des huit groupes d'experts qui l'ont assistée recouvrent plusieurs domaines. Le premier concerne la recherche sur la maladie, jugée aujourd'hui "gravement insuffisante" et trop dispersée. L'"effort sans précédent" - une cinquantaine de millions d'euros - envisagé en ce domaine devrait être mené sous l'égide d'une fondation de coopération scientifique (FCS) - un nouveau statut prévu par la loi de programme du 18 avril 2006 pour la recherche - dont l'Inserm serait le pilote. Cette FCS serait notamment chargée d'animer un "réseau national d'excellence", regroupant les moyens et les équipes de recherche. La lutte contre la maladie d'Alzheimer devrait par ailleurs être inscrite au rang des priorités de l'Union européenne lors de la présidence française en 2008. Les propositions en matière de dépistage s'inscrivent dans le prolongement des deux plans précédents, avec en particulier le développement et la généralisation des consultations mémoire sur tout le territoire. Le rapport Ménard, par ailleurs assez réservé sur l'efficacité du diagnostic précoce, suggère aussi de mettre en place un dispositif d'annonce calqué sur celui en cours de généralisation pour le cancer.

Une "porte d'entrée unique" confiée au conseil général

C'est sans doute en matière de prise en charge que les propositions sont les plus innovantes. La commission préconise en effet la création d'un "forfait Alzheimer" pour les médecins libéraux, qui couvrirait les consultations, mais aussi la réalisation d'un bilan annuel et les actions de coordination avec les autres acteurs investis dans la prise en charge. Un mécanisme similaire serait mis en place du côté des hôpitaux, avec la création d'une tarification spécifique "bilan Alzheimer". De même, le rapport confirme la création d'une "porte d'entrée unique" pour les malades et les familles, évoquée par Nicolas Sarkozy lors de son discours du 21 septembre. La mise en oeuvre de ce lieu, qui aurait également pour mission d'assurer la coordination des acteurs, "a vocation a être assurée par le conseil général". Elle pourrait prendre la forme de la création de "maisons d'Alzheimer", invitées à se rapprocher des maisons départementales des personnes handicapées (qui pourraient elles-mêmes être élargies à la prise en charge de la perte d'autonomie). Outre une "carte d'information" permettant de se situer dans le dispositif, chaque patient - et sa famille - se verrait proposer un plan individualisé de soins et de services, calqué sur ceux accompagnant l'APA ou la prestation de compensation du handicap (PCH). La commission préconise notamment la mise en place d'un "diagnostic logement" (définition des adaptations nécessaires pour compenser la perte d'autonomie) et d'un crédit d'impôt pour réaliser les aménagements indispensables. Elle introduit également la notion de "places renforcées", qui bénéficieraient d'une prise en charge médicale accrue et d'aides diverses à domicile. Les patients et leur famille pourraient aussi bénéficier de programmes d'éducation thérapeutique, sur le modèle de ceux déjà mis en oeuvre pour certaines maladies comme le diabète de type 2. Les aidants familiaux se verraient, pour leur part, dotés d'un statut juridique reconnaissant leur implication dans la prise en charge de leurs proches atteints de la maladie.

Unités spécialisées en Ehpad

Du côté des établissements, le rapport se prononce en faveur d'une double priorité. D'une part, il recommande la création d'unités spécialisées au sein des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des services de soins de suite et de réadaptation. D'autre part, il préconise d'accélérer le développement des alternatives à l'hébergement : accueils de jour, accueils de nuit, services de garde à domicile... Cet effort en termes de places - dans lequel les collectivités devraient être impliquées - se doublerait d'un important effort de formation des personnels, préféré à la solution d'embauches massives. Cet effort devrait être reconnu par une "revalorisation substantielle" des rémunérations et par la création de qualifications spécifiques comme celle d'"assistant de gérontologie".
Il manque toutefois à ce plan très complet - effectivement plus ambitieux que ses prédécesseurs - le volet du financement. La commission, qui n'était pas saisie de cet aspect du problème, se contente de plaider pour "la nécessité d'un choix clair de financement public et de politique publique". La balle est donc, en ce domaine, dans le camp du gouvernement. On sait déjà qu'une partie - non précisée - du produit des franchises médicales devrait être affectée au financement du plan Alzheimer. Xavier Bertrand - le ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité - est par ailleurs missionné pour mettre en place la cinquième branche de la protection sociale, entièrement dédiée au financement de la dépendance. Le chef de l'Etat a cependant indiqué, à plusieurs reprises, que cet effort en termes de financement public devrait être complété par la mise en place d'un système assurantiel, permettant aux malades de bénéficier d'une rente ou de prestations en nature. Nicolas Sarkozy a laissé entendre que ces nouveaux contrats d'assurance pourraient bénéficier d'un mécanisme d'incitation fiscale.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Les Français invités à donner leur avis

L'annonce du plan Alzheimer se double d'une initiative originale. Le gouvernement met en ligne, à partir du 12 novembre 2007, un site internet dédié à la présentation du plan et à l'information sur la maladie d'Alzheimer. Les Français sont invités à y faire part de leur avis et de leurs suggestions sur les mesures envisagées. Dans le même temps, les ministres du secteur social organiseront une concertation avec les professionnels sanitaires et sociaux et les représentants des collectivités. Pour sa part, le ministère de la Santé a mis en ligne un dossier entièrement refondu consacré à la maladie d'Alzheimer. Ces concertations permettront de finaliser le plan Alzheimer, qui sera annoncé par Nicolas Sarkozy avant la fin de l'année et entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2008.

 

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