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"Réarmer" l'État dans les territoires : le gouvernement garde le cap

Le Premier ministre a présidé ce 23 juillet, à Vesoul, le sixième comité interministériel de la transformation publique (CITP). Un grand raout, au cours duquel le gouvernement a confirmé sa volonté de renforcer la présence de l'État dans les territoires. Le Premier ministre a ainsi annoncé la création de postes supplémentaires dans les administrations départementales de l'État et de nouvelles latitudes données aux préfets dans la gestion des services déconcentrés. Ceux-ci disposeront "dans les tout prochains jours" de feuilles de routes interministérielles, à partir desquelles ils seront évalués.

Comme il y a un an - lors de sa déclaration de politique générale -, Jean Castex a affirmé, ce 23 juillet, sa volonté de "réarmer les territoires". Pour cela, il a annoncé de nouvelles mesures en faveur de la déconcentration et de la territorialisation de l'État. Le Premier ministre présidait à la préfecture de Vesoul le sixième comité interministériel de la transformation publique (CITP), en présence de quatre ministres (Gérald Darmanin, Jacqueline Gourault, Amélie de Montchalin et Olivier Dussopt), en sachant que d'autres ministres participaient en visioconférence.
"Plus que jamais", la France "a besoin d'un État agile, (…) déconcentré au service des territoires et partenaire des élus locaux", a déclaré Jean Castex à l'issue du CITP, en saluant au passage "le fameux couple maire-préfet". "La territorialisation et la déconcentration de l'action de l'État" constituent "l'axe conducteur de l'action de transformation publique" conduite par le gouvernement, a-t-il assuré dans les jardins de la préfecture, à Vesoul. En poursuivant : "Faire confiance aux territoires, faire confiance aux représentants de l'État dans ces territoires, c'est (…) au moment où la crise de confiance est forte, (…) le meilleur levier pour améliorer l'efficacité et l'efficience des politiques publiques que nous conduisons."

"Réarmer les territoires"

Ce CITP a d'abord permis d'effectuer un point sur la mise en œuvre de cette promesse de "réarmer les territoires", en particulier à l'échelon départemental. Sur toute la sphère de l'État à l'échelon départemental, 1.400 emplois supplémentaires nets ont été créés en 2021, avec "un effort marqué sur le régalien", a rappelé Jean Castex. Avant d'annoncer que cette politique serait poursuivie en 2022 : "plus de 1500 postes" seront créés dans le champ régalien, un effort particulier étant prévu pour "la justice de proximité". La création de postes dans les administrations départementales de l'État met fin à une période de dix ans, au cours de laquelle l'administration territoriale de l'État a vu ses effectifs "être amputés" de 35%, a souligné le chef du gouvernement.
En parallèle, l'implantation en province de services publics (notamment ceux de la direction générale des finances publiques) actuellement installés en région parisienne ou dans les métropoles, va se poursuivre. De nouvelles annonces, portant sur 1.300 emplois, seront faites "à la rentrée". Au total, 6.000 emplois auront ainsi été "démétropolisé" à la fin du quinquennat.
Le gouvernement a par ailleurs confirmé sa volonté de faire des préfets les véritables patrons de l'administration territoriale de l'État. Lors du cinquième CITP qu'il a tenu le 5 février à Mont-de-Marsan, il avait décidé de déconcentrer en leur faveur des décisions en matière de gestion financière et de ressources humaines.

Marges de manœuvre pour les préfets

Lors de ce sixième CITP, le Premier ministre a dévoilé "trois dispositions complémentaires". Ainsi, à partir de l'an prochain, les préfets "pourront redéployer une plus grande partie des effectifs de l'État dans le département, en fonction des priorités locales". À ce sujet, le Premier ministre a souligné qu'il est aujourd'hui "très difficile de faire passer un agent d'une direction départementale vers une autre". Deuxième évolution : "Alors qu'avant tout était déterminé à Paris directement", les préfets de région proposeront "les objectifs des directeurs régionaux et leur rémunération variable". Enfin, "les préfets et les services de l'État" bénéficieront de 40 millions d'euros pour "investir dans leurs systèmes d'information, notamment "ceux qui leur permettent de mieux piloter les politiques publiques dont ils ont la charge". Ces décisions interviennent alors qu'un volet du projet de loi 3DS (4D) en cours d'examen au Parlement vise à renforcer la déconcentration des décisions de l'État et le rôle de l'administration préfectorale.
"Pilotes" et "responsables de la mise en œuvre des politiques publiques dans les territoires", les préfets de région et de département disposeront "dans les tout prochains jours" de feuilles de route, "avec des objectifs chiffrés et des engagements qui feront l'objet d'une évaluation interministérielle", a aussi indiqué Jean Castex. La mise en place de ces nouveaux outils avait été annoncée en février dernier. Établies pour une durée de trois ans, les feuilles de route précisent sur quels aspects l'accent doit être mis dans l'application locale de 65 "réformes prioritaires" portées par le gouvernement, en fonction des spécificités des départements. En sachant que chaque feuille de route comprendra en moyenne "11 réformes prioritaires et 5 projets locaux structurants", selon le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques. Un tableau de bord interne à l'administration, baptisé "Pilote", doit permettre de suivre l'avancée des chantiers.

"Aller vers l'usager"

Un dernier volet des décisions prises par le gouvernement, lors de ce CITP, concerne "l'accroissement de la qualité du service public" et l'augmentation de la transparence de l'action de l'État". L'occasion d'annoncer le lancement du projet dit "administration proactive". "Plutôt que d'attendre l'usager au guichet, nous utilisons les données de l'administration pour aller vers l'usager et lui proposer des services", a expliqué le Premier ministre. Premier domaine d'application de ce projet : le pass culture, qui sera proposé directement aux jeunes de 15 à 18 ans sur leur téléphone portable ou par internet.
Jean Castex a aussi dévoilé la création d'un outil destiné à permettre aux associations de suivre de manière dématérialisée le versement des subventions de l'État en leur faveur. Enfin, "à compter de ce CITP, plus aucun service public ne pourra proposer des numéros de téléphone surfacturés", a-t-il dit. Le gouvernement avait pris cette décision en février dernier.

  • Mise à jour du baromètre de l'action publique : 7 nouvelles politiques publiques mesurées, 43 au total

À l’occasion du sixième comité interministériel de la transformation publique, Amélie de Montchalin a publié la nouvelle édition du baromètre des résultats de l’action publiques qui intègre 7 nouvelles politiques publiques, portant à 43 le nombre total de politiques mesurées, avec, toujours, des disparités territoriales.

Le gouvernement a publié ce vendredi 23 juillet une mise à jour de son baromètre de l'action publique. Il inclut les résultats de 7 nouvelles réformes prioritaires.  Après en avoir intégré 11 nouvelles en mai 2021 (lire notre article du 6 mai), il en liste désormais 43. Lancé le 13 janvier 2021, (lire notre article du 13 janvier 2021), cette nouvelle édition a été mise en ligne sur le site du gouvernement. Rappelons que cet "outil de pilotage et d'accélération" des réformes revêt une dimension territoriale, puisqu'il permet des comparaisons département par département. 
Parmi les nouvelles politiques mesurées, on relève notamment le plan de soutien aux petites lignes ferroviaires, plan doté de plus de 6,5 milliards d'euros sur 10 ans et qui doit permettre, sur la période 2017-2022, de rénover plus de 1.500 km de lignes. Entre décembre 2017 et mai 2021, les kilomètres rénovés sont passés de 164 à 934 et doivent atteindre 1.500 km en 2022. 
L’accès à l’aide juridictionnelle a également fait son apparition dans le baromètre. "Il s'agit de mesurer l'augmentation progressive du nombre de demandes déposées en ligne, sur le nombre total des demandes déposées par les demandeurs au moyen d'un formulaire papier, estimé à 1,2 million en 2019", est-il précisé dans le dossier de presse. L’expérimentation du système d’information de l’aide juridictionnelle (SIAJ) a débuté dans deux départements : le Morbihan à compter de mars 2021 et l’Ille-et-Vilaine depuis le mois de mai 2021. "Le déploiement dans l’ensemble des territoires s’effectuera progressivement à compter de septembre 2021 jusqu’en 2022", est-il précisé. Pour cette politique, le baromètre affiche un taux de 1,4% (moyenne des résultats obtenus dans les deux départements expérimentateurs) ; la cible à atteindre étant fixée à 15% de demandes en ligne sur le nombre total des demandes déposées.
L’accompagnement des aidants, mis en place depuis octobre 2020 grâce à l’allocation journalière du proche aidant (AJPA), est également désormais mesuré. Cette allocation s’adresse à toute personne résidant en France qui réduit ou cesse son activité professionnelle pour s’occuper d’un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie d’une particulière gravité. En mars 2021, le baromètre recense 2.459 bénéficiaires. Il fixe à 50.0000 l'objectif à atteindre pour 2022.
Le baromètre indique que la mise en place d’un état civil numérique pour les Français de l’étranger, qui consiste à dématérialiser l’état civil pour les Français ayant eu dans leur vie un évènement d’état civil à l’étranger, marche bien. Ce service affiche un taux d’adhésion des usagers à la délivrance dématérialisée d’actes d’état civil spectaculaire de 87% en 2021 ; l'objectif étant fixé à 90% en 2022.
Enfin, lancés en 2019, les apprentissages de la nage et du vélo en toute sécurité pour les enfants sont eux aussi apparus dans le baromètre mais ont été court-circuités par le contexte de crise sanitaire, du moins la natation. En décembre 2020, le baromètre affiche 6.488 enfants bénéficiaires avec une cible de 90.000 enfants à atteindre en 2022.
Depuis la première publication, le nombre d’espaces France Services labellisés a augmenté de 75%, le nombre de contrats d’apprentissage de 40%, le nombre de personnes ayant pris un congé de paternité de 33%, le nombre de bénéficiaires de primes à la conversion et du bonus écologiques de 28%, se félicite le ministère de la Fonction et de la Transformation publique dans son communiqué du 23 juillet. Mais "des disparités persistent néanmoins entre certains territoires", nuance-t-il. Il donne, à titre d’exemple, le délai d’instruction de l’allocation adulte handicapé qui peut varier de 2 à 8,5 mois selon les départements. Et le sempiternel cas de la fibre qui demeure "une fracture entre les zones urbaines/périurbaines et les zones rurales et de montagne" dont les taux de couverture continuent d'avoisiner respectivement 80% et 30 %. Enfin, s’agissant des maisons de santé, "des efforts restent à conduire pour concentrer leur déploiement dans les zones les plus touchées par la désertification médicale", conclut le ministre.

Virginie Fauvel / Localtis