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Cour des comptes - Relative indulgence pour les politiques en faveur de l'hébergement des SDF et de l'accueil des gens du voyage

Dans sa livraison 2017, le rapport public de la Cour des comptes consacre deux chapitres à la question du mal-logement. Le premier traite de l'hébergement des personnes sans domicile, tandis que le second aborde la question de l'accueil et de l'accompagnement des gens du voyage. Dans les deux cas, il s'agit de "rapports de suivi", qui visent à évaluer la mise en œuvre de rapports et de recommandations antérieurs de la Cour (2011 pour l'hébergement et 2012 pour les gens du voyage).

L'hébergement rattrapé par l'urgence

Dans les deux cas également, le jugement de la Cour est mitigé, sans être pour autant négatif. Ainsi, sur l'hébergement des personnes sans domicile, le rapport de 2011 - réalisé à la demande du comité d'évaluation et de contrôle (CEC) de l'Assemblée nationale - avait formulé 25 recommandations. La Cour des comptes relève aujourd'hui que "certaines d'entre elles ont été mises en œuvre et [que] des efforts budgétaires importants ont été accomplis par l'Etat".
Ces efforts n'ont pas été vains, puisque le rapport admet que "la politique publique de l'hébergement d'urgence a enregistré des progrès notables dans le domaine des capacités d'accueil et dans les conditions de prise en charge des personnes sans domicile" (accroissement continue des capacités et humanisation des structures d'hébergement).
Mais, comme le fait aussi le récent rapport de la fondation Abbé-Pierre (voir notre article du 31 janvier 2017), la Cour constate que le dispositif a été quelque peu débordé par l'urgence, subissant de plein fouet l'impact de la crise économique et du contexte international. D'où l'échec relatif - ou le demi-succès - du plan de réduction des nuitées d'hôtel ou du déploiement du dispositif "Un logement d'abord", dont l'efficacité a en revanche été amplement démontrée.
Reprenant pour partie ses propositions de 2011, la Cour des comptes formule donc à nouveau un certain nombre de recommandations, centrées principalement sur la gouvernance : privilégier le logement accompagné sur l'hébergement d'urgence, accélérer "le processus de reconquête par les préfets de leur contingent de logements sociaux", mettre en place rapidement un Siao (service d'information, d'accueil et d'orientation) par département, privilégier la construction de logements très sociaux (en favorisant les PLAI dans l'attribution des aides à la pierre) ou encore - ce qui est une novation - "mettre en place une structure nationale de coordination pour gérer les mises à l'abri résultant des évacuations de campements illicites qui se constituent régulièrement dans Paris depuis mi-2015". 


Gens du voyage : reformuler l'équilibre entre droits et devoirs

Le ton se fait un peu plus critique sur l'accueil et l'accompagnement des gens du voyage. Les progrès réalisés depuis le rapport de 2012 sur le sujet sont en effet jugés "lents et inégaux" et la Cour juge nécessaire de "redéfinir des objectifs". Conséquence : le rapport dresse un bilan "en demi-teinte" des 33 recommandations qu'elle avait formulées dans son précédent rapport. La Cour relève toutefois que la loi Egalité et Citoyenneté devrait contribuer à améliorer la situation, en renforçant "l'ancrage territorial" de la politique en ce domaine et en définissant de nouvelles obligations communales en matière de terrains familiaux locatifs.
Côté positif, la Cour pointe l'augmentation du nombre de places d'accueil (malgré la fin des subventions d'investissement de l'Etat), la clarification de l'aide au fonctionnement (désormais liées à l'occupation effective des aires d'accueil), ou encore une scolarisation mieux encadré malgré "des insuffisances persistantes". Côté négatif, elle relève en revanche "une occupation permanente qui se développe sur des aires non prévues à cet usage", la fréquence élevée des situations de précarité ou la gestion toujours problématique des "grands passages" (rassemblements de gens du voyage).
Parmi les recommandations de la Cour, on retiendra notamment le développement de l'habitat adapté, la recherche d'un "équilibre reformulé" entre les droits et devoirs des gens du voyage et des collectivités (avec en particulier la question des stationnements illicites), la mise en place de mesures d'accompagnement spécifiques, ou encore le renforcement de l'animation et de la conduite de la politique en faveur des gens du voyage.