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Mal-logement - Renvoyée en commission, la proposition de loi sur les marchands de sommeil devrait revenir avec la loi Elan

Rejetée en commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale il y a trois semaines (voir notre article ci-dessous du 28 février 2018), la proposition de loi visant à lutter contre les marchands de sommeil n'a pas connu le même sort en séance publique le 8 mars, mais sans être pour autant adoptée. Les députés ont en effet décidé de la renvoyer en commission. Un choix qui s'explique par l'arrivée prochaine devant le Parlement du projet de loi Elan (Evolution du logement et aménagement numérique), qui prévoit lui-même de nouvelles mesures pour lutter contre les marchands de sommeil (voir notre article ci-dessous du 6 mars 2018).

"Une proposition de loi d'appel", en attendant Elan

Déposée le 24 janvier par Stéphane Peu, député de Seine-Saint-Denis, et Hubert Wulfranc, député de Seine-Maritime, et par leurs collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (PCF), la proposition de loi vise essentiellement à renforcer les sanctions contre les marchands de sommeil - comme le projet de loi Elan - et à renforcer les moyens d'action des collectivités territoriales.
Le texte a été longuement discuté en séance publique le 8 mars - pas moins d'une quinzaine de députés sont intervenus dans la discussion générale -, dans un climat très consensuel. L'esprit et les objectifs de la proposition de loi semblent en effet largement partagés sur tous les bancs de l'Assemblée.
Lors de la discussion générale, Hubert Wulfranc, rapporteur de son propre texte, a d'ailleurs lui-même indiqué qu'il s'agit d'"une proposition de loi d'appel, dont les éléments ont vocation à s'agréger au débat sur le projet de loi portant évolution du logement et de l'aménagement numérique, dit Elan". Projet de loi Elan qui sera présenté en conseil des ministres le 4 avril pour un examen au Parlement à partir de fin mai.
Dans cette perspective, le député de Seine-Maritime s'est dit persuadé que "les planètes s'alignent", soulignant au passage que la proposition de loi "n'aurait, en l'état, aucune incidence budgétaire. Au contraire, elle permettrait de réaliser d'importantes économies : combien d'argent public a été dilapidé pour réparer les conséquences de ce phénomène désastreux, qui perdure à Clichy, à Grigny, à Saint-Denis, à Marseille, à Lille...".

Jacques Mézard saisit la perche

Jacques Mézard n'a pas manqué de saisir la perche. Le ministre de la Cohésion des territoires a en effet "salué le groupe communiste pour cette initiative" et affirmé avoir "bien noté [sa] volonté d'être une force de proposition". Il a rappelé qu'"en dépit des efforts réalisés par les gouvernements successifs" - loi Molle du 25 mars 2009, loi Alur du 24 mars 2014 et loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique -, "ces textes [...] n'ont malheureusement pas permis d'éradiquer ce problème". Il a aussi souligné la complexité juridique du sujet, compte tenu de l'importance attachée au droit de propriété.
Jacques Mézard a également exposé les mesures prévues sur ce point par le projet de loi Elan (voir notre article ci-dessous du 6 mars 2018) et a rappelé le récent durcissement des sanctions infligées par les tribunaux aux marchands de sommeil (voir notre article ci-dessous du 9 février 2018).

Vers des améliorations du projet de loi Elan

Sur le fond, le ministre de la Cohésion des territoires s'est dit ouvert à des améliorations du projet de loi Elan par voie d'amendements. Il s'est dit notamment intéressé par la mesure de la proposition de loi permettant à l'autorité - Etat ou collectivité - qui poursuit un marchand de sommeil de récupérer l'aide au logement suspendue en cas de non-décence du logement, dès lors que les travaux d'office sont réalisés. Jacques Mézard souhaite également "avancer [...] tout en respectant les principes constitutionnels" sur les moyens d'éviter que les marchands de sommeil touchent des indemnités d'expropriation (la ville de Paris avait ainsi dû verser 6,7 millions d'euros d'indemnités au propriétaire condamné en février dernier).
D'autres dispositions de la proposition de loi lui semblent en revanche soulever des difficultés juridiques et devraient donc être réexaminées. C'est le cas, par exemple, du passage de cinq à dix ans de l'interdiction d'acheter des droits immobiliers (cette durée étant en principe réservée aux crimes).
En tout état de cause, plusieurs dispositions de la proposition de loi devraient donc être introduites dans le projet de loi Elan au fil de sa discussion. Il devrait sans doute en être de même pour une seconde proposition de loi sur le même sujet : celle "créant le délit de marchand de sommeil", déposée le 21 février par le groupe Les Républicains (voir notre article ci-dessous du 28 février 2018) et qui ne sera peut-être pas examinée avant l'arrivée à l'ordre du jour du projet de loi Elan.

Références : Assemblée nationale, proposition de loi visant à lutter contre les marchands de sommeil (examinée en séance publique le 8 mars 2018 et renvoyée en commission).
 

 

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