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Simplification de l'action publique : l'Assemblée nationale achève l'examen du projet de loi Asap

Malgré son lot de mesures de simplification administrative assez consensuelles, le projet de loi "d'accélération et de simplification de l'action publique", baptisé Asap, a néanmoins électrisé les débats à l’Assemblée sur des sujets plus clivants, allant de la réforme de l’Office national des forêts (ONF) à l’assouplissement des règles régissant les marchés publics, en passant par le nouveau dispositif anti-squat.  

 

L’Assemblée nationale a clôturé, vendredi 2 octobre dans la soirée, l’examen du projet de loi "d'accélération et de simplification de l'action publique" (Asap), entamé en début de semaine, avant un vote au scrutin public prévu ce 6 octobre dans l'après-midi. Les derniers titres (IV et V) consacrés notamment à la simplification de mesures extrêmement concrètes au bénéfice des particuliers (délivrance de titres d’identité, permis de conduire, certificat médical etc.) ont donné lieu à de nombreuses passes d’armes sur les bancs de l’hémicycle, en particulier sur le sort de l’Office nationale des forêts (ONF) ou encore le dispositif facilitant l'expulsion de squatteurs d'une résidence secondaire, entre partisans de la "protection du droit de propriété" et mise en garde contre une "frénésie anti-squats". Un débat également marqué par un passage en force du gouvernement sur la restriction des enquêtes publiques, au grand dam des députés EDS qui ont dénoncé "un déni de démocratie". Quelques jours auparavant, dans le cadre de l’examen du Titre III, l'Assemblée avait en effet voté, à une majorité de deux voix, la suppression de cette disposition, qui à certaines conditions, permet au préfet de choisir la modalité de participation du public, en optant pour une simple consultation électronique en lieu et place de l’enquête publique. Or, à la demande de la ministre déléguée chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, les députés ont à nouveau délibéré sur l’article 25. "Faire cela un vendredi soir à vingt heures", c’est une méthode proprement "scandaleuse", s’est indigné le député LR Thibault Bazin. Une indignation partagée, sans surprise, par La France insoumise mais également dans les rangs de la majorité : "(…) revenir en fin de débat sur une discussion qui a eu lieu, et qui a fait l’objet de nombreux échanges, ne fait pas honneur à notre institution", a ainsi déploré le député Modem Nicolas Turquois. Un détricotage du droit de l’environnement visant à faciliter l'implantation de sites industriels, sous couvert de relance économique, qui devrait conduire sans aucun doute le groupe EDS à ne pas voter ce projet de loi, tandis que les Républicains partagés sur ce texte fourre-tout qui comporte "des mesures clairement négatives", comme "la part belle faite aux préfets, qui leur donnera encore davantage de pouvoir au détriment des élus locaux", se gardent le temps de la réflexion d’ici mardi. 

Titre IV Diverses mesures de simplification (Articles 29 à 44 duodecies)

Sensiblement enrichi après son passage au Sénat, puis en commission spéciale à l’Assemblée, le titre IV a fait l’objet de quelques ajouts notables en séance, notamment dans le champ de la commande publique.   

  • Formation à la citoyenneté numérique (article 29 bis A nouveau)

Un article additionnel propose ainsi d’ajouter la formation à la citoyenneté numérique et à la protection des données personnelles aux missions que la région exerce dans le cadre du service public régional de la formation professionnelle, ainsi qu’aux compétences de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

  • Tableau de bord de la charge administrative liée aux normes nouvelles (Article 29 quater nouveau)

Chaque Français pourra par ailleurs consulter en ligne "l’évolution de la charge normative, les charges normatives nouvelles et les charges supprimées" applicables aux particuliers et aux administrations publiques. Cet amendement déposé conjointement par les groupes Agir ensemble et MoDem en restreint toutefois pour l’heure le champ d’application au ministère de l’Education nationale, afin d’expérimenter la mesure

  • Sanction des fausses lettres électroniques (Article 30 ter A nouveau)

Il s’agit de rendre effectif le dispositif de sanction des fausses lettres électroniques avec envoi recommandé, en attribuant cette compétence aux agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

  • Délivrance des licences sportives en ligne (Article 30 ter B nouveau)

Le texte ouvre également la voie à une généralisation de la demande et de la délivrance des licences sportives en ligne d'ici la campagne d'adhésion 2022/2023

  • Renforcement de la lutte contre les squatteurs (article 30 ter)

Cet article introduit en commission par le rapporteur, après l'affaire très médiatisée des retraités qui ont vu leur résidence secondaire de Théoule-sur-Mer squattée et ravagée, a fait l'objet de pas moins d'une quarantaine d'amendements en séance publique. Modifiant la loi Dalo du 5 mars 2007 (droit au logement opposable), il étend les dispositions contre les squatteurs au cas des résidences secondaires ou occasionnelles. Il durcit également la procédure. Parmi les amendements retenus, le rapporteur a simplifié la rédaction et levé les incertitudes sur la notion de "résidence occasionnelle", en précisant que l'occupant légitime des lieux doit être protégé contre les squatteurs "qu'il s'agisse ou non de sa résidence principale". Dans le même esprit de simplification – et d'élargissement de la protection –, l'expression "le propriétaire ou le locataire du logement occupé" est remplacée par la notion plus large de "personne dont le domicile est ainsi occupé ou toute personne agissant dans son intérêt et pour son compte".

  • Triplement des peines pour les squatteurs (article 30 quater nouveau)

Un amendement du rapporteur introduit un article supplémentaire destiné à "adresser un signal fort, afin d'assurer l'effectivité de la répression des auteurs des violations de domicile". Pour cela, l'article modifie le Code pénal en faisant passer le quantum des peines pour s'être introduit illégalement dans un domicile et pour s'y maintenir de un an à trois ans d'emprisonnement et de 15.000 à 45.000 euros d'amende. Il semble toutefois peu probable que les tribunaux appliquent de pareilles peines, même si la mesure pourra néanmoins conduire à un durcissement des sanctions contre les squatteurs.

  • Elaboration des arrêtés issus des règles du code de l’environnement (Article 32 bis nouveau)

Le texte supprime une disposition obsolète qui prévoit le contreseing systématique du ministre des Outre-mer pour les arrêtés issus du code de l’environnement applicables à Mayotte. Ce n'est plus justifié aujourd’hui eu égard à la départementalisation de Mayotte, justifie le gouvernement. 

  • Réforme des chambres d’agriculture (Article 33)

Sur ce point d’achoppement, le projet de loi précise désormais explicitement que les chambres départementales et interdépartementales devront donner leur accord pour la création d’une chambre d’agriculture de région qu’elles intégreraient

  • Recours contre les décisions relatives aux projets d’ouvrages d’irrigation (Article 33 quater)

Poursuivant le même objectif de simplifier et réduire les délais du contentieux, le texte propose d’attribuer aux cours administratives d’appel une compétence en premier et dernier ressort en la matière, sur le modèle des litiges relatifs aux éoliennes. Le dispositif de l’article 33 quater adopté en commission spéciale donnait initialement cette compétence au Conseil d’Etat. Cet amendement vise "à ne supprimer qu’une juridiction au lieu de deux", indique le rapporteur Guillaume Kasbarian (LREM-Eure-et-Loir). 

  • Durée de validité de la carte Vitale (article 34 bis A)

L'Assemblée a maintenu l'amendement de sa commission spéciale Asap qui supprimait un article additionnel du Sénat prévoyant, pour lutter contre la fraude, que la carte Vitale est valable non plus "tout au long de la vie" de son titulaire mais "durant la validité" de ses droits. Une disposition jugée inutile, du fait des vérifications et des mises à jour périodiques de la carte Vitale.

  • Dossier pharmaceutique dans les établissements sociaux et médico-sociaux (articles 34 bis B et C)

L'Assemblée a également maintenu, sous réserve d'amendements de forme ou de précision, les dispositions relatives au dossier pharmaceutique. Le texte maintient l'obligation d'ouverture, sauf opposition du patient, d'un dossier pharmaceutique (DP) par les pharmaciens d'officine et par ceux des pharmacies à usage intérieur dans les Ehpad. En revanche, l'Assemblée a adopté un amendement de trois députés LREM, qui annule la disposition introduite par la commission spéciale et qui limitait l'obligation de consultation du DP. Cet amendement, "travaillé avec l'ordre des pharmaciens" selon l'exposé des motifs, revient donc au statu quo ante, avec l'obligation de consulter et d'alimenter le DP en temps réel.

  • Communes dont l'approvisionnement en médicaments est compromis (article 34 bis)

Les députés ont maintenu la rédaction de l'article 34 bis, introduit par le Sénat et déjà validé par la commission spéciale. Cet article prend un relief particulier dans le contexte de la crise sanitaire et intéresse très directement les petites collectivités, notamment isolées. Il permet en effet au directeur général de l'ARS de "garantir l'approvisionnement en médicaments et produits pharmaceutiques de la population d'une commune dont la dernière officine a cessé définitivement son activité, lorsque celui?ci est compromis [...] en autorisant l'organisation de la dispensation de médicaments et produits pharmaceutiques par un pharmacien, à partir d'une officine d'une commune limitrophe ou la plus proche". Il s'agit d'une adaptation à la pharmacie d'officine du principe du cabinet secondaire, qui existe pour les médecins.

  • Protocoles de coopération dans les établissements de soins (article 35 bis A)

Par souci de clarification, les députés ont adopté un amendement qui clarifie l'article (introduit par un amendement du gouvernement) étendant aux établissements de soins, publics ou privés, les protocoles de coopération déjà en vigueur pour la médecine de ville. La rédaction initiale visait en effet "les professionnels de santé exerçant en établissement de santé public ou privé". L'amendement précise que la possibilité d'élaborer un protocole de coopération est également ouverte aux professionnels de santé exerçant dans des établissements différents regroupés au sein d'un même groupement hospitalier de territoire (GHT). Ces professionnels peuvent "à leur initiative, élaborer et mettre en œuvre des protocoles locaux de coopération, sur décision du directeur de l'établissement et, dans les établissements publics de santé, après avis conformes de la commission médicale d'établissement ou, le cas échéant, de la commission médicale de groupement et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médicotechniques". Transmis à l'ARS, ces protocoles doivent satisfaire aux exigences essentielles de qualité et de sécurité.

  • Accès au dossier médical partagé (article 35 bis)

L'Assemblée a adopté en l'état l'article sur l'accès au dossier médical partagé, et notamment les dispositions étendant les garanties des personnes majeures faisant l'objet d'une mesure de protection juridique dans le cas d'ouverture d'un dossier médical partagé. En revanche, les députés ont adopté un amendement du groupe Modem, sous-amendé par le gouvernement, prévoyant d'intégrer au DMP les données de santé collectées par la médecine scolaire dans le cadre des examens, des visites médicales ou du suivi des élèves. Ces données sont recueillies "avec l'accord du représentant légal de l'élève mineur ou de l'élève majeur". Cette mesure devrait entrer en vigueur au plus tard le 1er septembre 2022. L'objectif est de faire en sorte que "le médecin traitant puisse avoir accès à ces éléments, qui resteraient orphelins à l'issue de la scolarité".

  • Réforme des modes de garde de la petite enfance par ordonnance (article 36)

L'Assemblée a adopté, sans aucun changement, l'article habilitant le gouvernement à procéder par ordonnance à une importante réforme des modes de garde de la petite enfance. Supprimé par le Sénat, celui-ci avait été rétabli par la commission spéciale. L'objectif est de solder le fiasco de la précédente ordonnance sur le sujet, prévue par l'article 50 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (Essoc), abrogé au passage par le nouveau texte. Officiellement en raison de l'encombrement du Conseil d'Etat par la réforme des retraites, alors à l'ordre du jour, l'ordonnance, entièrement finalisée, n'avait en effet pu être publiée avant la date limite du 20 février 2020, fixée par l'article d'habilitation. Le texte de la nouvelle ordonnance devrait donc être très proche de celui de son prédécesseur.

  • Création d'un service électronique d'information sur les places d'accueil de la petite enfance (article 36 bis nouveau)

Après de nombreuses tergiversations ces dernières années, le gouvernement se décide à trancher en faisant adopter, par amendement, un article prévoyant l'obligation, pour les établissements d'accueil du jeune enfant (Eaje), mais aussi pour les assistantes maternelles, de communiquer "par voie électronique leurs disponibilités d'accueil à la Caisse nationale des allocations familiales, selon une périodicité et des modalités de transmission fixées par arrêté [...]". Ces informations seront mise en ligne sur le site de la Cnaf monenfant.fr. Jusqu'à présent, cette mesure s'était heurtée à l'hostilité ouverte des assistantes maternelles. En l'occurrence, pour sortir de l'impasse, le gouvernement élargit à tous les Eaje et assistantes maternelles la mesure mise en place dans le cadre de la crise sanitaire par l'ordonnance du 25 mars 2020, afin de faciliter l'accueil des enfants des personnels prioritaires. Toutefois, pour éviter un nouveau conflit, le gouvernement introduit un certain nombre de garanties pour les assistantes maternelles. Celles-ci pourront ainsi demander "que ne figurent pas sur le site certaines informations personnelles les concernant, et qui ne seraient pas strictement nécessaires à l'atteinte des objectifs de connaissance des possibilités d'accueil et de mise en relation pour les familles". Sur la question très conflictuelle d'un éventuel retrait d'agrément pour les assistantes maternelles qui ne respecteraient pas les obligations de déclaration et d'information, le texte prévoit qu'un tel manquement "ne peut faire l'objet, pour sa première occurrence, que d'un simple avertissement et ne peut constituer un motif de suspension de l'agrément ou le seul motif de son retrait". Un formulation qui laisse entendre que cela pourrait en revanche être le cas lors d'une seconde occurrence. Les dispositions de cet article devraient prendre effet au plus tard le 1er septembre 2021.

  • Suppression du certificat médical systématique pour la pratique sportive des mineurs (article 37)

Les députés ont adopté en l'état du texte de la commission spéciale l'article remplaçant l'obligation de production d'un certificat médical par le remplissage d'un questionnaire relatif à l'état de santé du sportif mineur, réalisé conjointement par ce dernier et par les personnes exerçant l'autorité parentale. Cette simplification vaut aussi pour l'inscription à des manifestations sportives.

  • Suivi médical de enfants handicapés à l'école (article 37 bis A)

Les députés ont finalement abrogé l'article, introduit par la commission spéciale, prévoyant que, dans le cadre de l'école inclusive, les suivis médicaux et paramédicaux des enfants en situation de handicap, notamment atteints d'un trouble spécifique du langage oral ou écrit, sont autorisés sur le temps scolaire. L'auteure principale de l'amendement, la députée (Agir ensemble) Laure de la Raudière, a en effet obtenu du gouvernement "la confirmation que ces suivis paramédicaux ou médicaux, dans (quand cela est matériellement possible) ou en dehors de l'établissement scolaire, sont bien autorisés". Elle souhaite toutefois que le gouvernement s'engage à communiquer auprès des rectorats sur cette possibilité.

  • Pratique sportive dans les espaces naturels et responsabilité (article 37 ter)

Un amendement du groupe LREM a entièrement réécrit l'article introduit par le Sénat et modifié par la commission spéciale de l'Assemblée. Désormais, l'article prévoit uniquement que "le gardien de l'espace naturel [au sens juridique du terme, ndlr] dans lequel s'exerce un sport de nature n'est pas responsable des dommages causés à un pratiquant sur le fondement de l'article 1242 du code civil, lorsque ceux-ci résultent de la réalisation d'un risque normal et raisonnablement prévisible, inhérent à la pratique sportive considérée. Les dispositions du Code de l'environnement (article L.365-1) sont donc finalement maintenues dans leur rédaction actuelle. Cet article "distingue le gestionnaire du site de son propriétaire et traite de la responsabilité civile comme administrative dans la mesure où un bon nombre d’espaces naturels sont gérés par des personnes publiques".

  • Faux certificat médical et responsabilité des organisateurs de manifestations ou des fédérations sportives (article 37 quater)

L'Assemblée a adopté un amendement qui élargit la portée de cet article, qui exonère explicitement de toute responsabilité les organisateurs de compétitions et manifestations sportives amateurs en cas d'usage d'un faux certificat par un participant et en cas d'accident dans le cadre de la pratique sportive. Dans la rédaction initiale, cette disposition ne s'appliquait pas à un certain nombre de sports à risques (alpinisme, plongée subaquatique, spéléologie, rugby, sports de combat, mais aussi sports automobiles et aéronautiques). L'amendement déposé par le député (LREM) de la Manche Jean-Marc Zulesi réintroduit ces sports à risques dans le champ d'application de l'article.

  • Amélioration de l'encadrement du service national universel (article 41)

L'Assemblée a adopté en l'état le texte de la commission spéciale, habilitant le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires pour définir des conditions de recrutement et d'emploi adaptées à la diversité des profils des personnes qui encadrent les mineurs participant au séjour de cohésion du service national universel (SNU) : anciens militaires, personnels de l'Education nationale et d'associations du secteur de l'éducation populaire... Face à la montée en charge du SNU (25.000 jeunes en 2021) l'ordonnance facilitera le recrutement des encadrants, notamment pour ce qui concerne l'articulation entre la future "indemnité d'encadrement du SNU" (en cours de préparation par décret) et la perception d'une pension de retraite.

  • Droit de résiliation annuelle de l’assurance emprunteur (Article 42 bis)

Le texte supprime le droit à la résiliation annuelle des assurances couvrant un crédit immobilier, devenu superflu avec l’introduction en commission spéciale (contre l’avis du gouvernement) du droit de résilier l’assurance emprunteur à n’importe quel moment sur toute la durée du contrat de prêt.   

  • Mention dans les contrats d’assurance "risque" de la possibilité pour l’assuré de recourir à une contre-expertise (Article 42 ter)

La commission spéciale a instauré l’obligation pour un assureur d’indiquer dans ses contrats d’assurance risque la possibilité pour ses clients de faire réaliser, à leurs frais, une contre-expertise en cas de litige sur l’évaluation d’un dommage. Le nouveau dispositif prévoit également que doit être indiqué le coût moyen d’une contre-expertise, mais après vérification, cette exigence est "très délicate à manipuler car les experts définissent librement leurs tarifs et les assureurs n’en ont pas la maîtrise". D’où cet amendement du rapporteur qui supprime cette partie de la nouvelle obligation qui incombe aux assureurs.  

  • Quelques ajouts concernent plus spécifiquement les entreprises : 

Le texte permet ainsi à des entreprises sans représentation syndicale, ce qui est souvent le cas des entreprises de moins de 11 salariés, de mettre en place le dispositif du plan d’épargne retraite d’entreprise unique (PERU), regroupant un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif et un plan d’épargne retraite d’entreprise obligatoire (Article 43 bis D nouveau). Il pérennise également la faculté, introduite l’année dernière à titre temporaire, de conclure un accord d’investissement sur des durées plus courtes comprises entre un et trois ans (Article 43 bis E nouveau). Afin de faciliter la diffusion des plan d’épargne interentreprises (PEI), qui s’adressent tout particulièrement aux TPE-PME, il est également proposé de permettre aux entreprises de les instaurer ou d’y adhérer par décision unilatérale, tout en garantissant l’information des salariés sur la mise en place de ces plans (Article 43 bis F nouveau). 

  • Encadrement des promotions (Article 44)

A l'initiative de Jean-Baptiste Moreau (LREM), rapporteur de la loi Egalim, les députés ont aussi prolongé l'expérimentation sur l'encadrement des promotions et le seuil de revente à perte des produits alimentaires jusqu'au 15 avril 2023. L’amendement grave dans le marbre de la loi les dispositions de l’ordonnance n° 2018-1128 du 12 décembre 2018 relative au relèvement du seuil de revente à perte – SRP – et à l’encadrement des promotions pour les denrées et certains produits alimentaires. Il introduit en outre une disposition spécifique pour les produits saisonniers en matière d’encadrement des promotions en volume sur la base de la consultation réalisée avec les fédérations professionnelles en septembre. Il applique pour la fin de l’année 2020 cette disposition sur certains produits saisonniers sans attendre 2021. Enfin, il est proposé qu’un rapport d’économistes soit remis au Parlement avant octobre 2022, afin d’enrichir la première évaluation, qui sera rendue d’ici la fin du mois.  
Dans le secteur de la distribution, des mesures d’encadrement ont là encore été introduites en séance. S’agissant notamment des stratégies de délocalisation des négociations pratiquées par des centrales internationales pour échapper à la loi française et imposer des baisses de tarif très importantes à leurs fournisseurs sans contreparties (article 44 undecies nouveau). Un autre article additionnel (article 44 duodecies nouveau) s’inscrit quant à lui dans la lutte contre l’inflation des pénalités logistiques infligées aux fournisseurs par les distributeurs. Le texte combine à la fois la réintroduction de l’interdiction de la déduction d’office, et instaure une règle de proportionnalité spécifique aux pénalités. 

  • Adaptation des règles de la commande publique en cas de circonstances exceptionnelles (Article 44 quinquies)

Cet article, ajouté à l’initiative du gouvernement en commission spéciale, vise à pérenniser les mesures exceptionnelles prises par ordonnances de mars à juin 2020 pour adapter les règles de la commande publique à la crise sanitaire. Un sujet d’inquiétude pour l’ONG Transparency International France, car ce régime de circonstances exceptionnelles permet "de contourner certaines règles habituellement applicables aux marchés publics, de manière potentiellement continue". "Il y a sans doute un malentendu", s'est défendue la ministre Agnès Pannier-Runacher, "cet article ne porte pas sur les règles de mise en concurrence, mais sur l’exécution des marchés publics pendant une crise – sanitaire ou autre – qui empêcherait le pays de fonctionner". " Il s’agit de prolonger les contrats qui arrivent à échéance le temps de procéder à une remise en concurrence. Il s’agit également d’être en mesure, lorsqu’un fournisseur est défaillant et dans l’impossibilité de livrer, de se tourner vers un autre prestataire, ce qui est normalement interdit", a -t-elle expliqué. En séance, deux amendements ont été adoptés pour clarifier le droit applicable aux délais de prolongation de certaines prestations ou travaux. Le texte précise que la prolongation est "équivalente à la période de non-respect du délai d’exécution résultant directement des circonstances exceptionnelles", mais non pas à la durée de la crise elle-même. Concrètement, ce délai de prolongation peut donc être "plus bref, équivalent, voire plus long que la période de circonstances exceptionnelles". La demande de prolongation de délai doit être présentée, par le titulaire ou par le concessionnaire, au cours de la période de circonstances exceptionnelles et avant l’expiration du délai contractuel prévu pour l’exécution de l’obligation qui n’est pas respectée

Titre V Dispositions portant suppression de sur-transpositions de directives et diverses dispositions (Articles 46 à 51)

  • Marchés publics réservés aux structures inclusives (Article 46 bis AA nouveau)

Par cet article, il s’agit d’autoriser expressément que des marchés soient réservés à la fois aux entreprises adaptées (EA), aux établissements et services d’aide par le travail (ESAT) et aux structures d’insertion par l’activité économique (SIAE). "La suppression du caractère exclusif des deux types de réservation permettra d’alléger les contraintes des acheteurs dans la mise en œuvre de leur politique d’insertion par la commande publique et encouragera la constitution de groupements d’entreprises par les acteurs des différents secteurs de l’insertion et du handicap pour répondre ensemble aux appels d’offres", précise l’amendement LREM. 

  • Nouveau seuil des marchés publics de travaux (Article 46 bis AB nouveau)

Dans le cadre de la relance, le texte relève par ailleurs à 100.000 euros hors taxes le seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence pour la conclusion des marchés publics de travaux, et ce pour une période limitée dans le temps, jusqu’en décembre 2022 – avant de revenir à un niveau plus traditionnel. Le texte précise que cette disposition s’applique également pour les lots de moins de 100.000 euros, "à condition que le montant cumulé de ces lots n'excède pas 20% de la valeur totale estimée de tous les lots". Pour rappel, un rehaussement à 70.000 euros HT (contre 40.000 euros auparavant), là encore à titre temporaire, circonstancié par la crise du Covid 19, avait été opéré par un décret (n° 2020-893 du 22 juillet 2020) pour les marchés de travaux conclus jusqu’au 10 juillet 2021. 

  • Réutilisation du foncier des chantiers par la Société du Grand Paris dans le périmètre des gares (article 46 bis B)

L’amendement défendu par le député Guillaume Gouffier-Cha (LREM-Val-de-Marne) vise à permettre à la SGP, "sans contradiction avec les contrats de développement territoriaux", de construire les immeubles liés aux gares sur les terrains qu’elle a achetés pour les besoins du chantier dans le cadre de la réalisation des gares du réseau de transport public du Grand Paris, ou des infrastructures de transport dont la maîtrise d’ouvrage lui a été confiée. En tant que de besoin, y sont adjointes des parcelles adjacentes nécessaires à l’élaboration d’un projet cohérent, cette extension du périmètre foncier du projet étant soumise à l’accord des communes et EPCI compétents concernés.

  • Rapport sur les ouvrages d’irrigation soumis à contentieux (Article 51 nouveau)

Le gouvernement propose de remettre au Parlement un rapport "dressant un état des lieux des ouvrages d’irrigation faisant l’objet de contentieux". Les modalités dans lesquelles les volumes prélevables dans les eaux de surface ou souterraines sont évalués dans certains bassins en déséquilibre quantitatif seront précisées par décret. C’est l’objet de l’article 33 ter du projet de loi, introduit par le gouvernement en commission spéciale. Outre ces dispositions, le gouvernement propose donc via cet amendement d’étudier précisément les causes des retards des projets d’ouvrages pour l’irrigation soumis à contentieux (récemment clos ou en cours) "afin d’identifier les blocages et les actions nécessaires pour les dépasser".

 

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