Sites Natura 2000 : un décret précise le rôle des préfets dans l’encadrement de l’utilisation des pesticides

En l’absence de mesures volontaires prises par les chartes ou localement dans le cadre contractuel, les préfets auront désormais la main - au terme d’un décret paru ce 30 novembre - pour encadrer l’utilisation des pesticides dans le réseau européen de sites naturels Natura 2000 dédié à la préservation de la biodiversité.

Avec la publication, ce 30 novembre, d’un décret relatif à l'encadrement de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans les sites Natura 2000, la France se plie aux exigences de la directive du 21 octobre 2009, dont l’article 12 impose aux États membres d’interdire ou de restreindre l’utilisation des pesticides de synthèse dans le réseau européen de sites Natura 2000 dédié à  la biodiversité. Plus question de tergiverser, sous la contrainte d’une injonction du Conseil d’État, qui dans sa décision du 15 novembre 2021 a pointé du doigt le gouvernement dans sa gestion des pesticides, lui donnant un délai de six mois pour rectifier le tir dans les zones Natura 2000 terrestres (lire notre article du 17 novembre 2021). Les dispositions réglementaires en vigueur ne permettent pas d'y garantir que l'utilisation de pesticides sera systématiquement encadrée voire interdite sur le fondement du document d’objectifs (Docob), de la charte Natura 2000, voire des contrats Natura 2000, y relève le juge administratif. 

Composer avec le contractuel 

Le décret prévoit donc d’habiliter les préfets à réglementer l’utilisation des pesticides dans les sites Natura 2000 terrestres, lorsque cet encadrement n’a pas été prévu sur une base volontaire par les chartes et contrats élaborés localement. Notons que ces dispositions sont d’application immédiate, puisque la version définitive du texte ne permet plus au préfet d’en différer la mise en oeuvre de six mois, voire d’un an dans des circonstances particulières. 

Pas question pour autant de renoncer au modèle contractuel de gestion des sites Natura 2000 "gage d’une bonne appropriation des mesures", et qui reste donc "l’approche privilégiée dans la gestion de ces sites", insiste le ministère de la Transition écologique. Autrement dit, le préfet interviendra en dernier recours. 

Dans le cadre de la consultation sur le projet de décret, organisée en mai dernier, la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques, avait d’ailleurs relevé "la nécessité de s’appuyer sur l’avis de la chambre d’agriculture départementale, établissement consulaire interface avec l’État, d’ores et déjà impliquée au sein des comités de pilotage de chaque site Natura 2000 dans les différents territoires". Un travail de rédaction des chartes a déjà eu lieu fin 2021, l’utilisation des pesticides a déjà été débattue et prise en compte dans l’écriture des engagements composant ces chartes, rappelait-elle, questionnant la pertinence de revenir sur ces discussions "quelques semaines seulement après leur écriture". La lecture de l’instruction adressée aux préfets, qui devrait prochainement leur fournir la marche à suivre, devrait permettre d'en savoir davantage...

Pas synonyme d’interdiction des pesticides 

Le texte ne marque pas totalement la fin des pesticides dans les sites Natura 2000. L'encadrement arrêté par les préfets est "sans préjudice de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans le cadre de la lutte obligatoire ou de dérogations spécifiques octroyées conformément à la réglementation", explique la notice du décret. Les mesures de réduction ou d’arrêt volontaires d’utilisation des pesticides pourraient par exemple se formaliser par des contrats d’aides à la conversion à l’agriculture biologique ou par certaines mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec), illustre le ministère. Le réseau français Natura 2000 comporte au total 1.756 sites terrestres et marins, représentant une surface terrestre de 7 millions d’hectares (ha). La superficie agricole utilisée (SAU) dans les sites Natura 2000 est de l’ordre de 3 millions d’ha, soit environ 10% de la SAU nationale, "dont la moitié environ est en prairie permanente, avec donc peu ou pas d’usage de produits phytosanitaires", souligne-t-il. 

 
Référence : décret n° 2022-1486 du 28 novembre 2022 relatif à l'encadrement de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans les sites Natura 2000, JO du 30 novembre 2022, texte n° 20.
 

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