Succès du plan France très haut débit malgré les zones d’ombre

Lancé en 2013, le plan France très haut débit est un succès, conclut un rapport de France Stratégie remis au ministre Jean-Noël Barrot. Un plan à la "gouvernance originale" entre collectivités locales, services de l’État et opérateurs privés qui s'est déroulé dans le respect de l’enveloppe de 13,3 milliards d’investissements publics. Seules ombres au tableau, "des difficultés d’opérationnalisation et des inégalités de déploiement dans certaines zones" et la question du financement de la maintenance.  

Le comité d’évaluation du plan France très haut débit (PFTHD), piloté par France Stratégie, a publié son rapport final mercredi 11 janvier 2023 et l'a remis à Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications. Impact économique du PFTHD en termes d’investissements et d’emploi, mais aussi en termes d’attractivité des territoires... ce rapport salue "le travail de gouvernance de ce déploiement par la puissance publique". 

Lancé en 2013, le PFTHD aurait donc atteint aujourd’hui ses objectifs, selon France Stratégie, à savoir "assurer à l’ensemble des Français une connectivité très haut débit (c’est-à-dire supérieure à 30Mbit/s en 2022), avec un mix technologique allant de la fibre au satellite". Et ce, "dans le respect de l’enveloppe de 13,3 milliards d’investissements publics notifiée à la Commission européenne en 2016". Le rapport met en avant que "des effets notables de l’arrivée de la fibre sur l’attractivité des territoires, l’emploi et la performance des entreprises, sont déjà observables".
"La réussite du plan tient pour beaucoup à une gouvernance originale assurée de manière partagée entre collectivités locales, services de l’État et opérateurs privés", selon France Stratégie. Il a fallu "inciter les investissements privés pour assurer la couverture de l’ensemble du territoire tout en prévoyant de financer sur fonds publics les zones moins denses où des carences du marché auraient été anticipées".

Remontada du vingt-sixième au douzième rang européen

Le document rappelle que "77,6% de la population française se situait en zone blanche du très haut débit fixe en 2015, ce qui plaçait la France au vingt-sixième rang européen" et salue le fait qu'en 2022, la France soit remontée au douzième rang "pour le THD et pour la fibre dans le peloton de tête en Europe". 
"À échéance 2022, France Stratégie se félicite que le PFTHD ait atteint ses objectifs en atteignant une couverture très haut débit pour 99% des locaux du territoire, avec un mix technologique allant des solutions filaires (fibre, ADSL, câble coaxial) à la couverture satellite, en passant par les technologies radio." Elle précise que cela s'est fait "en privilégiant progressivement la fibre jusqu’à l’abonné (technologie FttH pour fiber to the home) lorsque les conditions techniques et la viabilité économique" le permettaient. Ainsi fin 2021, plus de 70% des locaux étaient ainsi éligibles au FttH.

Rajeunissement de la population sur les territoires fibrés

À la même période, la France comptait également 33 millions d’abonnements à internet, dont 18,4 millions au très haut débit (soit 60%). "Parmi les abonnements THD, 14,5 millions sont des abonnements à la fibre", précise le rapport. S’agissant des entreprises, les résultats sont moins brillants : "32% disposaient d’un abonnement au très haut débit fin 2020 et, selon la filière, elles seraient 55% en 2022 à être raccordées à la fibre."

Autre conséquence réjouissante, "l’arrivée de la fibre dans une commune s’accompagne de développement du secteur marchand sur le territoire et de l’arrivée d’une population plus jeune". Il faut toutefois une période de 3 ans minimum après le déploiement pour que ces effets s’avèrent statistiquement repérables, tempère le rapport. Enfin, en matière d’empreinte environnementale, France Stratégie met en avant la faible consommation énergétique : "Les réseaux fibre consomment en moyenne 10 kWh par abonnement contre 35 kWh pour les réseaux cuivre."

Des inégalités de déploiement 

Ce bilan extrêmement positif est toutefois tempéré par quelques bémols. "Des difficultés d’opérationnalisation et des inégalités de déploiement demeurent." Ainsi dans les zones d’intervention privée, 88% des locaux sont éligibles au FttH "mais les derniers déploiements tardent à être réalisés notamment dans les périphéries de certaines grandes métropoles". Dans les zones d’initiative publique "au démarrage plus tardif", "seuls 60% des locaux bénéficient d’un accès au THD (au quatrième trimestre 2021) via des technologies filaires, et 51% de locaux sont raccordables au FttH" et "un peu plus de 30% pour la fibre pour les zones rurales". Résolument optimiste, l'institution placée auprès de la Première ministre estime malgré tout qu'"au rythme actuel des déploiements en réseaux d’initiative publique - plus de 5 millions de prises par an - la généralisation de la fibre devrait être atteinte en 2025". 

Quid de la maintenance ?

Au-delà de résultats indiscutables, France Stratégie alerte aussi sur "les conditions opérationnelles de finalisation des déploiements [...] qui sont aujourd’hui un sujet sur lequel prospère le mécontentement des usagers". Et de résumer : "Il s’agit à la fois de sécuriser la qualité des raccordements finaux ; d’assurer partout des solutions pour la connectivité THD des tout derniers locaux, les plus difficiles et les plus coûteux à couvrir ; de garantir la bonne maintenance et la disponibilité des réseaux déployés et enfin de veiller à leur capacité de résilience face aux nouveaux enjeux que représentent les crises climatiques et énergétiques ou les cyberattaques." La maintenance d'un réseau fibre optique a en effet été construit "dans l'urgence" pour quelques dizaines d’années. "Les financements envisagés pour une maintenance 'courante' n’y suffiront pas", prévient le rapport, estimant que ces "financements futurs devront prendre en compte à la fois la montée en gamme technologique de ces réseaux, leur adaptabilité aux transformations du territoire et leurs conditions de soutenabilité".