Transports - Tramway ou bus à haut niveau de service : comment faire le bon choix ?
Lorsqu'une collectivité envisage de réaliser un transport collectif en site propre (TCSP), pour quel système doit-elle opter ? Un bus à haut niveau de service (BHNS) ou un tram ? Beaucoup d'élus s'interrogent. Dans les grandes agglomérations, certains ont développé les deux. Pour tenter d'éclairer le choix des décideurs locaux, la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), qui continue à réclamer à l'Etat un quatrième appel à projets en faveur des TCSP, a commandé aux cabinets TTK et Trans-Missions une étude fondée sur un retour d'expériences de réseaux de tramway et de BHNS. Une façon d'"objectiver" et de "dépassionner le débat", selon Bruno Gazeau, président de la Fnaut. Neuf sites jugés représentatifs ont été sélectionnés – six lignes BHNS, dont deux en Ile-de-France (le Trans-Val-de-Marne-TVM et le T-Zen 1, au sud de la région) et quatre dans les autres régions (Teor à Rouen, Busway à Nantes, Mettis à Metz et la ligne G de Strasbourg) et trois lignes de tramway (T3 à Lyon, Ligne A à Tours et Tram A à Besançon).
Le coût, mais pas seulement
La question du coût mérite d'être analysée finement. Si une ligne de BHNS revient jusqu'à deux fois moins cher au kilomètre qu'un tramway, celui-ci s'avère plus attractif, notamment du fait d'un plus grand confort et de moindre sensibilité aux perturbations de toutes sortes (livraisons, circulations prioritaires et "sauvages"). Grâce à des gains de fréquentation plus importants (+100% pour le tramway par rapport à une ligne de bus contre +30 à +50% pour un BHNS), on peut donc arriver à un coût par voyageur moins élevé avec le tram.
En outre, le tram donne lieu à des aménagements urbains et contribue à l'embellissement des quartiers traversés en réduisant la place de l'automobile et en rendant plus agréable la promenade le long des axes aménagés. Il apparaît donc autant comme un projet d'urbanisme que comme un simple mode de transport. "On observe un effet de densification de l'immobilier plus important dans les projets de tramway", note Marc Perez de TTK. Il est d'ailleurs important selon lui de bien prendre en compte, à l'origine du projet, la fréquentation future qui peut résulter de la construction de logements le long du tracé du tram.
Autre critère de choix déterminant, pour Jean-Marie Beauvais, de Trans-Missions : bien tenir compte des seuils de capacité des différents modes en fonction de la qualité de service que l'on veut obtenir. Selon la fréquentation attendue et la longueur du matériel roulant, BHNS et tramway ont leur zone de pertinence. "En-dessous de 30.000 voyages par jour, le BHNS s'impose, indique Bruno Gazeau. Au-dessus de 45.000, c'est le tram. Entre les deux, il y a débat sur l'optimum économique".
Vers un quatrième appel à projets ?
L'étude recommande également de ne pas se focaliser sur le montant de l'investissement initial mais de prendre en compte les coûts globaux sur toute la durée de vie du projet – infrastructure, matériel roulant et fonctionnement – sachant que les constructeurs estiment qu'un tramway peut rester en service 35 ans contre 12,5 ans pour un BHNS. Avec un taux d'utilisation de la capacité théorique de 65% dans les deux cas, le coût global par an montre un écart de 9% seulement en faveur du BHNS (25,2 contre 27,8 millions d'euros) pour 10 millions de voyages par an (36.000 par jour) et de 7% pour 15 millions de voyages annuels (54.000 par jour), soit 33,3 millions d'euros contre 35,7 millions pour le tramway. De plus, les auteurs de l'étude conseillent de prendre en compte les économies d'échelle réalisées lorsque les projets s'inscrivent dans des réseaux qui ont déjà des lignes de BHNS et/ou de tramways. "Dans le cas de Strasbourg par exemple, des lignes de BHNS reprennent une partie de l'infrastructure de lignes existantes. L'opérateur réalise, en outre, des économies d'échelle sur la formation du personnel, le centre de contrôle ou encore les dépôts de sorte que les nouvelles lignes coûtent de moins en moins cher", a souligné Mathias Cureau de Trans-Missions.
L'étude va être envoyée aux villes et agglomérations qui ont des projets de BHNS ou de tramways. Pour Bruno Gazeau, un quatrième appel à projets de TCSP d'un montant de 450 millions d'euros est plus que jamais nécessaire. "Le montant de la subvention de l'Etat par projet n'est pas très importante - 6-7% de l'investissement total -, mais cela donne une crédibilité aux collectivités qui leur permet de déclencher le financement", a-t-il souligné.